Testa Mise à jour septembre 2021
Fil des révisions
  • septembre 2021
    Biographie de Paul Thoron ajoutée en note de bas de page
  • octobre 2018
    Insertion de la frise à tiroir ainsi que de l'acte de décès d'Angélique
  • juillet 2011
    Création de la page

xviie
xviiie
xixe
Francesco-Draco
Maria Fortis
Les Testa font partie de ces famille de Gênes qui était déjà au XVe installées à Constantinople et qui ont donc assisté depuis Pera à la prise de Constantinople, le 29 mai 1453. Ils sont restés sur place et se sont spécialisés comme drogman (ambassadeurs)
Gaspare
Maria de Négri
Drogman de Russie, puis de Hollande.
Jacques
Marie Cingria
Jacques passe 5 années à Alep avant de revenir à Constantinople toujours au service de la Hollande. La famille vivait sur le Bosphore à Büyükdere où se retrouvait la colonie occidentale.
Mathieu Martel
Paul Thoron
Il est à supposer que Jacques se sentant vieillir a été satisfait de marier sa jeune Angélique de 19 ans à Mathieu même de 20 ans son ainé. Il est difficile d'imaginer comment furent pour Angélique les 20 années qui suivirent où elle aura deux maris, leur donnera 12 enfants, déménagera en France dont elle ne devait pas trop connaître la langue, avant de disparaître à 41 ans en laissant trois enfants de moins de 4 ans !

Testa

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Lors des travaux de restauration de la mosquée Arab-Djami en furent mises à jour des plaques funéraires latines datant de l’époque où cet édifice abritait l’église Saint-Paul des génois . Parmi elles figure la pierre tombale de Thomas de Testa et de son épouse Luchineta de Spinola décédée le 6 septembre 1436. La tête de lion, qui figure toujours dans le blason des Testa, est reconnaissable sur cette sculpture. L’église Saint-Paul fut à la fin du xve siècle confisquée et transformée en mosquée lors de l’exode des Arabes d’Espagne. Elle prit alors le nom d’Arab Djami.

Un autre bâtiment célèbre de Galata est l’église de Saint-Paul (1233) qui a été construite par les Dominicains au cours de l’Empire latin de Constantinople (1204-1261). Le bâtiment est aujourd’hui connu sous le nom Arap Camii (la mosquée arabe) parce qu’il a été donné par le sultan Bayezid II au Arabes d’Espagne, qui se sont installés à Istanbul pour fuir l’Inquisition espagnole de 1492.
Source Wikipédia

Salvago

Dans cette branche, il y a aussi les Salvago pour lesquels nous disposons aussi d’une filiation depuis le début du xvie

Héritiers des Salvago, drogmans de Venise, les Testa furent propriétaires du palais des bayles jusqu’au début du xviiie siècle. Ils louaient ce palais à la République de Venise qui l’utilisait comme ambassade.

Monsieur Bertelé retrace dans son remarquable ouvrage la genèse et la vie de cette ambassade à Constantinople. De sa construction qui se situe vers 1540 jusqu’au milieu du xviiie siècle, l’histoire de ce palais est liée à celle de deux importantes familles génoises de la latinité, les Salvago et leurs héritiers et descendants les Testa.

Parmi les premier drogmans de Venise que cite monsieur Benelé figure, vers 1530, Giannesino Il palazzo degli ambasciatori di Venezia a Costantinopoli Salvago. Son fils, Matteca, et ses trois petits fils, furent drogmans de Venise. C’est, semble-t-il, dans la maison de cette famille située aux Vignes de Pera , que s’installèrent les bayles dès les années 1540. La maison resta en possession des Savalgo jusqu’au milieu du xviie siècle puis passa par héritage chez les Testa.

Beyoğlu

District d’İstanbul situé sur la rive européenne du Bosphore et séparé de la vieille ville (péninsule historique de Constantinople) par la Corne d’Or. Il est connu sous le nom de Pera (l’autre côté en grec) au cours du Moyen âge, et ce nom est resté en usage jusqu’au début du xxe siècle et la mise en place de la République turque.

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Le 7 mars 1652, Catherine Salvago, veuve de Stéphane Fortis, faisait rédiger par le Père Jacques, capucin, son testament. Ses biens étaient légués à ses enfants. Marie Fortis, sa fille, devait épouser vers l660 François Testa et lui apporter la grande maison que l’on nommait alors « le palais de Venise » ?

L’héritage Salvago fut partagé à la génération suivante entre les descendants. C’est ainsi que le « palais », au moment de sa vente le 14 septembre 1746 à la République de Venise, était en indivision entre Antoine Pisani, représentant de sa femme Marie Testa, et Gaspard, Jacques et Bartholomé Testa. Le prête nom de la transaction fut le drogman de France Charles Fornetti.

La famille Testa servit dans la diplomatie plusieurs puissances occidentales dont les Républiques de Gênes et de Venise, la Hollande, l’Autriche, la Suède, la Russie, l’Angleterre, la Prusse, la France et aussi l’Empire ottoman au xixe siècle, avec Paul de Testa, signalé à Bruxelles en 1850 comme consul ottoman.

La Communauté Latine de Pera

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Les sources remontent jusqu’à Stefano né autour de 1560. Cependant des Testa ont joué un rôle lors de la capitulation.

La filiation au-dessus de Stefano pourrait être la suivante : Bartolomeo Testa, cité entre 1560 et 1580, date à laquelle il serait déjà âgé, père possible de Stefano Angelo Testa, fils d’Andrea, cité en 1560, père possible de Bartolomeo Andrea Testa, père d’Angelo, cité sur un monument en 1513 avec ses armoiries que la branche autrichienne porte encore aujourd’hui. La famille est citée à Pera en 1436 (pierre tombale armoriée de Thomas Testa et de son épouse Luchinetta Spinola) et en 1453 (contrat d’affranchissement d’un esclave de Nicolas Testa). (A. Gautier, 11/11/2007)

Pour parfaire le portrait des familles Fenton et Testa, il est intéressant de présenter leur place et leur rôle au sein de la communauté latine de Pera.

Pendant que Constantinople tombait aux mains des Turcs et de leurs alliés, la colonie génoise de Pera, croyant sa dernière heure venue, se soumit de son plein gré à Mehmet II le Conquérant. Bien qu’un des rares défenseurs de Constantinople ait été le Génois Giusliniani et bien que le podestat de Pera ait déclaré avoir envoyé tous les hommes en état de combattre au secours de Constantinople, Mehmet Il fit grâce aux Génois et leur accorda des privilèges : les Capitulations. Témoin de la prise de Constantinople, le 29 mai 1453, Nicolas Testa affranchissait à Pera, deux mois plus tard, « en raison de la situation précaire du moment » un de ses esclaves, le Russe Ivan (9 août 1453).

Les Capitulations fixaient les règles juridiques auxquelles devaient se soumettre les habitants de la cité. La famille Testa posséda jusqu’au début de ce siècle les archives de la Comunita dont l’original de l’acte des Capitulations accordées par Mehmet le Conquérant aux Latins de Constantinople en 1453. Cet acte est aujourd’hui au British Muséum

La colonie génoise de Pera

J. Sauvaget décrit en 1934, au-delà des drogmans, l’histoire de la communauté génoise de Pera. Il fait remonter la fondation de Pera à la 4e croisade où ces commerçants italiens venus avec les Croisés constituaient une source de richesse si considérable qu’on ne pouvait envisager leur expulsion. Afin d’éviter la présence de ces « intraitables génois » au cœur de la cité, on les transféra en 1267 sur la rive nord de la Corne d’Or à Pera (Galata aujourd’hui). À l’intérieur de la concession, la colonie était libre. Son gouvernement était assuré par un podestat venu chaque année de Gênes. Byzance allait bientôt mesurer à ses dépens l’esprit entreprenant et l’opiniâtreté de la nouvelle commune.

De l’ancien nom grec Sykais Peran (littéralement « champ de l’autre côté »)

Lors du siège, les génois ignoraient s’ils seraient traités en alliés ou en ennemis ; ils demeurèrent dans l’expectative. Ils ne tentèrent pas de résister et se soumirent au sultan pour décider du sort de la ville. Constantinople tombée, le podestat et les principaux personnages regagnèrent la mère patrie, laissant le reste de la population capituler le 30 mai 1453. Le sultan affirma son autorité, nomma un voïvode pour remplacer le podestat. La ville put reprendre son activité et son développement.

Pour parfaire le portrait des familles Fenton et Testa, il est intéressant de présenter leur place et leur rôle au sein de la communauté latine de Pera.

Pendant que Constantinople tombait aux mains des Turcs et de leurs alliés, la colonie génoise de Pera, croyant sa dernière heure venue, se soumit de son plein gré à Mehmet II le Conquérant. Bien qu’un des rares défenseurs de Constantinople ait été le Génois Giusliniani et bien que le podestat de Pera ait déclaré avoir envoyé tous les hommes en état de combattre au secours de Constantinople, Mehmet Il fit grâce aux Génois et leur accorda des privilèges : les Capitulations. Témoin de la prise de Constantinople, le 29 mai 1453, Nicolas Testa affranchissait à Pera, deux mois plus tard, « en raison de la situation précaire du moment » un de ses esclaves, le Russe Ivan (9 août 1453).

Les Capitulations fixaient les règles juridiques auxquelles devaient se soumettre les habitants de la cité. La famille Testa posséda jusqu’au début de ce siècle les archives de la Comunita dont l’original de l’acte des Capitulations accordées par Mehmet le Conquérant aux Latins de Constantinople en 1453. Cet acte est aujourd’hui au British Muséum

La colonie génoise de Pera

J. Sauvaget décrit aussi, au-delà des drogmans, l’histoire de la communauté génoise de Pera. Il fait remonter la fondation de Pera à la 4e croisade où ces commerçants italiens venus avec les Croisés constituaient une source de richesse si considérable qu’on ne pouvait envisager leur expulsion. Afin d’éviter la présence de ces « intraitables génois » au cœur de la cité, on les transféra en 1267 sur la rive nord de la Corne d’Or à Pera (Galata aujourd’hui). À l’intérieur de la concession, la colonie était libre. Son gouvernement était assuré par un podestat venu chaque année de Gênes. Byzance allait bientôt mesurer à ses dépens l’esprit entreprenant et l’opiniâtreté de la nouvelle commune.

De l’ancien nom grec Sykais Peran (littéralement « champ de l’autre côté »)

Lors du siège, les génois ignoraient s’ils seraient traités en alliés ou en ennemis ; ils demeurèrent dans l’expectative. Ils ne tentèrent pas de résister et se soumirent au sultan pour décider du sort de la ville. Constantinople tombée, le podestat et les principaux personnages regagnèrent la mère patrie, laissant le reste de la population capituler le 30 mai 1453. Le sultan affirma son autorité, nomma un voïvode pour remplacer le podestat. La ville put reprendre son activité et son développement.

Jacques Testa

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Jacques Testa était au service de l’ambassade de Hollande à Constantinople comme troisième drogman depuis cinq ans lorsque l’ambassadeur Hochepied l’envoya à Alep. Ce dernier justifia ce choix auprès des directeurs du commerce du Levant en indiquant combien il avait apprécié l’intégrité, le soin et la fidélité des services de son drogman. Testa avait alors vingt-neuf ans. Il resta en poste à Alep au moins cinq ans, de 1754 à 17592.

Jacques Testa retourna à Constantinople en l762 et s’y fixa par mariage. Il épousa le 19 avril en l’église Sainte-Marie Draperis de Pera Lucie Fonton, une des filles de l’ancien premier drogman de France à Constantinople Pierre Fonton. Veuf, il se remaria en l’église Saint-Antoine de Pera le 14 août 1768 avec Marie Cingria, fille du négociant ragusain Pierre Cingria. De ces deux mariages, il eut au moins dix enfants. Ses deux fils François et Gaspard furent respectivement chargé d’affaires et ministre résidant de Hollande à Constantinople.

En l766, Jacques Testa occupait le poste de deuxième drogman de l’ambassade de Hollande. Bien que sa famille ait vendu le palais de baile en 1746, il eut l’occasion de rendre service à la République de Venise dans les circonstances suivantes :

À fin de faire faire les réparations nécessaires à l’habitation du palais de Venise, le baile Memmo alla habiter en 1779 sur le Bosphore à Buyukdéré. ll occupait une belle demeure, celle du négociant anglais Barker. Mais après le décès de ce dernier, il dut libérer la maison. Il put se loger à Buyukdéré grâce à la courtoisie du drogman de Hollande Jacques Testa qui mit à sa disposition en 1781 sa maison nouvellement construite. Celle-ci était plus modeste que la maison de Barker et elle n’était pas encore terminée. Le baile offrit 600 piastres à Testa pour lui permettre de prendre en location pour lui et sa famille une autre maison et s’engagea à y faire des travaux.

En 1791, Testa était encore au service de la Hollande. Vers cette même époque, son fils Gaspard était compagnon du fils de l’ambassadeur Dedem de Gelder.

Jacques Testa décéda à Constantinople en 1804 dans sa quatre-vingtième année et fut inhumé le 22 octobre en l’église Sainte-Marie Drapéris.

L’éducation des jeunes Testa en Hollande

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Gaspard et son fils François, sont frère et neveu d’Angélique

Les éléments rassemblés sur l’éducation des jeunes de langues Gaspard et François Testa qui s’illustrèrent plus tard au service de la diplomatie des Pays-Bas montrent que l’apprentissage des langues commençait à l’initiative des parents à Constantinople dès le plus jeune âge des enfants. Cette formation se poursuivait ensuite en Europe et les parents suivaient les progrès de leurs enfants aussi régulièrement que le permettait l’acheminement du courrier.

Le général Dedem de Gelder (1774-1825) retrace dans ses mémoires sa jeunesse à Constantinople avec son père qui y occupait la place d’ambassadeur des Pays-Bas. Il donne dans son ouvrage quelques indications sur la manière dont on apprenait alors les langues. Il avait été l’ami et le compagnon de jeu de Gaspard Testa (1770-1847) dont il avait à peu près le même âge. Gaspard avait été nommé à l’âge de dix ans jeune de langues par l’ambassadeur Dedem de Gelder en récompense des services rendus par son père, Jacques, Testa, alors drogman de l’ambassade des Pays-Bas. Le général Dedem de Gelder raconte :

"Pour que j’apprisse le turc et ma sœur le grec, mon père avait pris chez lui Monsieur Gaspard Testa, un peu plus âgé que moi, qui, pour sa part, apprenait le hollandais. C’est le même qui est aujourd’hui chargé des affaires du roi des Pays-Bas à Constantinople.

Après un séjour en Hollande, Gaspard Testa fut nommé drogman à Constantinople. Il fut ensuite chargé de la chancellerie de l’ambassade. Par ailleurs il accompagna l’ambassadeur Dedem de Gelder au congrès de Sistowa (1791)

Plus tard, ce dernier lui obtint le titre de secrétaire d’ambassade. En 1821, François Testa, fils de Gaspard, se trouvait aux Pays-Bas pour ses études. Quelques-unes des lettres que lui envoyèrent sa mère et son père, alors chargé d’affaires des Pays-Bas à Constantinople, ont été conservées. Les liens entre les parents et les enfants restaient très forts malgré l’éloignement géographique et le temps qui s’écoulait avant qu’ils ne se retrouvent. Gaspard Testa suivait de près les études de son fils François et lui prodiguait, à sa demande, des conseils pratiques quant à sa future orientation.

Le voyage de Constantinople à Alep en 1754 de Jacques Testa

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Jacques Testa entreprit le voyage de Constantinople à Alep en 1754. Il vient d’être nommé drogman à Alep. Ce récit est celui du trajet qu’il fait pour se rendre à son nouveau poste. Il le fit en compagnie d’un haut dignitaire turc : killichly Hussein Effendi qui était alors le cadi ou juge d’Alep, appelé également molla. Leur voyage dura jours, soit six semaines de route représentant 251 heures de trajet à raison de cinq heures, neuf heures ou même douze heures par jour. Il se fit à cheval ou à pied selon la difficulté du terrain. Étant donné le danger de la route et la qualité du cadi, ils furent la plupart du temps escortés par les habitants du pays. Partis le 15 mars 1754 de Constantinople, ils arrivèrent à Alep le 25 avril de la même année.

Celui-ci provient des archives de Vienne. Il a été plusieurs fois signalé à notre connaissance il n’a pas fait l’objet d’une publication. La transcription du texte est faite en respectant l’orthographe du manuscrit. Mais avant de la donner, il est nécessaire de camper le personnage de Jacques Testa et de retracer sa carrière en tant que drogman de Hollande.

Ils avaient couvert plus de 1000 km. Partis de Scutari, ils commencèrent par longer la mer de Marmara, puis s’enfoncèrent dans les terres en suivant une diagonale qui les fit passer par Eskisehir, Bolvadin, Konya, EreËli, Adana. De là, ils longèrent la mer Méditerranée et passèrent par Alexandrette, l’actuelle Îskenclerun, et Antioche, l’actuelle Antakya, avant de rejoindre Alep.

Jacques Testa a fini de rédiger son mémoire le 20 décembre 1754, soit huit mois après son arrivée. Il l’écrivit en langue française. Comme il était drogman au service de la Hollande, ce mémoire fut peut-être pour lui l’occasion d’effectuer un exercice linguistique tout à l’honneur d’un homme ne maîtrisant pas la langue française. En effet, dans son texte, il implore la clémence du lecteur pour les fautes qu’il aurait pu faire. Ce texte est riche en renseignements. En observateur attentif d’un pays, d’une civilisation différente, il note précisément jour après jour ses impressions, la topographie du terrain, les difficultés du voyage, les peuples rencontrés, les vestiges entrevus, les richesses ou pauvreté de la région traversée. En homme connaissant les langues du pays, il recueille quand il peut des renseignements sur les lieux qu’il traverse.

Suivons maintenant Jacques Testa dans ses pérégrinations et laissons-le nous conter son voyage.

Relations du voyage fait par terre, de Constantinople à Alep, par Jacques Testa, drogman de Hollande. en compagnie de Killichly Husseifz Effendi. Cadi ou juge de la dit ville d’Alep, le 15 mars 1754.

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Le vendredi vers 4 heures après-midi, 15 mars de l’année ci-dessus, je passais de Pera a Scutari, et pour préparer le tout a pouvoir entreprendre le voyage, je me suis porté chez le Cadi, où je passai la nuit, et le lendemain… jeuner le peuple 3 jours auparavant la fête, et faire des prières continuellement, pour être délivrés de ce mal contagieux, qui détruisait le pays. des jours après la fête le mal était tout à fait cessé, et jusques à présent ils ne l’ont plus absolument, et a cet affect on fait toujours la festivité, dans tout le pays. Les enterrements turcs aussi sont extraordinaires dans ce pays, avant tout passe quelques pavillons, et après on chante fortement, et font un tapage incroyable ; car ils chantent tous à la fois, et vont aussi des femmes accompagner l’enterrement.

Le faible, ou la crainte de ces gens ici, c’est le sérail de Constantinople, c’est à dire, ils craignent qu’on ne fasse pas de plainte au sérail à leur égard ; car y savent que lorsque l’affaire va au sérail, ils doivent être bien punis, et ordinairement leur punition est de les faire payer leurs fautes, par des bonnes monets, et sommes ; mais présentement ils sont heureux de se trouver auprès Abdullah Pacha, qui est un gouverneur juste, et équitable, que tout le monde fait de ses louanges ; mais autrefois il était bien pis. En voilà ce que je donner du détail, jusques à présent de la ville d’Alep : car je ne suis pas au fait de tout encore de ce pays-ci : et en priant le lecteur de ne pas prendre garde aux défauts, qui trouvera dans cette composition, d’un langage a moi tout à fait étrangère.

J ‘ai l’honneur d’être à Alep ce 20 décembre 1754, le très humble, et très obéissant serviteur

JACQUES TESTA

Angélique Testa

Angélique au destin hors du commun entre Istanbul et Toulouse dont il est peu probable que la langue maternelle ait été le français.
Angélique est la fille de Jacques Testa. Elle a 19 ans lors de son mariage avec Mathieu Martel. Dix ans plus tard, c’est une jeune veuve de 29 ans qui est maintenant seule pour élever ses 6 enfants.

En décembre 1804, elle épouse à Marseille Paul Thoron (âgé alors de 43 ans) où ils résident depuis 1 année. Il y a tout à penser, que Paul, ami de feu son mari, a pris en charge la jeune veuve et l’a ramenée à Marseille avec ses enfants.

Le 21 Frimaire An XIII de la République, Paul Thoron, négociant, âgé de 43 ans, veuf, né sur la commune de Carcassonne, le 14 Février 1756, résidant à Marseille depuis 1 an. Demeurant rue des Phocéennes, isle 65, maison 10, section 5. Fils majeur de feu Jacques Thoron, décédé le 11-1-? en la commune de Montolieu (Aude) et de feu Anne Englade, marié, décédée au dit Montolieu le 20-10-1773 ainsi qu’il nous apparait par son extrait d’acte de décès en date du 22 du même mois, consigné dans le registre de l’état civil de la susdite commune… et

Angélique Testa, âgée de 31 ans née à Constantinople le 11-7-1773. Demeurant rue Phocéenne, isle 66, maison 10, section 5. Fille majeur de Jacques Testa, interprète de la Légation Batave de Constantinople, y demeurant et de feue Marie Cingria, mariés, décédée à Constantinople le 24-12-17**, ainsi qu’il en compte par son extrait de décès, consigné dans le registre de l’Église de Constantinople. Agissant avec le consentement de son père, en vertu d’une pièce dument légalisée par le Maréchal Brune, ambassadeur près la Porte Ottomane, veuve de Mathieu Martel, négociant, décédé au dit Constantinople le 17-9-1802

Témoins : Gery Guerin, négociant, 32 ans, Lazare Estien, aussi négociant, 24 ans, : Vincent Olive Cadet, négociant, 50 ans, Pascal Thoron, négociant, 23 ans.

Paul Thoron : né à Montoulieu en 1756, partit en 1782 à Constantinople sur les conseils de son grand-père Nicolas Poulhariès, qui y était resté plusieurs années. Il y écoulait les draps fabriqués par la manufacture de Montoulieu, ainsi que la garance, venant du Languedoc et de Provence.

Il y créa une importante maison de commerce, société commandite au capital de 50 000 piastres, somme importante à l'époque, sous la raison sociale Paul Thoron et compagnie ; les associés commanditaires étaient Antoine Estieux de Marseille, Pascal et Jacques Thoron de Montoulieu.

Il avait le génie des affaires et réalisa une fortune considérable. En 1802, il rentre en France et voyage sur le même bateau que Mme Martel qui venait de perdre son mari. En 1804, il a 48 ans, il épousa à Constantinople Angélique Testa, une levantine veuve de M. Martel, consul de France, qui lui apporta 5 enfants de son premier mariage ; c'était d'ailleurs une femme solide qui eut encore avec lui six autres enfants. Rentré en France, il s'établit à Toulouse en 1811, dans un bel hôtel qu'il avait acheté rue de la Dalbade au n° 11.

Très royaliste, il fut nommé premier adjoint au maire de Toulouse dans la municipalité de Villèle, puis maire par intérim de novembre 1816 à février 1817, date à laquelle il démissionna.

Physionomie originale, on l'appelait « le turc ». Il fut ensuite maire de Rouffiac où il avait acheté un beau domaine : le vieux château.

Le ménage s’installera ensuite à Toulouse où Paul continuera son activité de négociant et dont il sera maire par intérim pendant 6 mois, d’octobre 1816 à février 1817. Angélique fera à Paul 6 enfants supplémentaires et finira ses jours à Montolieu à côté de Carcassonne. Les descendants à Toulouse de ses 12 enfants sont très très nombreux.

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L'an 1815, et le dixième juin à cinq heures du soir, par devant nous… de la commune de Montolieu, canton d'Alzone, département de l'Aude ; sont comparus les sieurs Guillaume Chamazeille âgé de 65 ans, profession d'agriculteur ami de la décédée et de Claude Gillet âgé de 54 ans d'agriculteur ami de la décédée, tous domiciliés dans cette commune ; lesquels nous ont déclaré que le 10 juin courant à 11h du matin est décédée madame Angélique Testa âgée de 42 ans, domiciliée à Toulouse, née à Constantinople.

Un grand merci à Chantal Fain qui a trouvé cet acte durant l'été 2018.

Drogman

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Despite all these negative conditions, dragomans had ways of compensating for the hardships they endured and the relative ingratitude with which they were treated. For one thing, their knowledge of ’things oriental’ gave them some leverage over the average Frenchman established in the Levant…

De tout temps, les États souverains ont échangé des ambassades entre eux. Lors de ces missions, il était nécessaire de joindre des interprètes pour traduire les discussions et les écrits. Si au Moyen Age, la connaissance du latin et du grec permettait de négocier avec presque tous les pays d’Occident, il n’en était pas de même avec les pays d’Orient. Le refus de ceux-ci à parler d’autres langues que l’arabe, le turc ou le persan, conduisit les Occidentaux à apprendre les langues orientales. C’est dans ce contexte qu’apparaît un personnage assurant l’intermédiaire entre l’Orient et l’Occident, le drogman.

Mais, d’où vient le mot de drogman ?

Dans son étude sur les origines du mot drogman, le professeur Okic donne les explications suivantes :

Les mots utilisés en Occident de drogman, dragoman, truchement, proviennent de la déformation du mot arabe « targuman ». Ce mot est employé dans les textes de certaines traditions islamiques, quelques-unes provenant du Prophète lui-même, d’autres de quelques-uns de ses compagnons.

Le professeur Okiç donne trois significations à ce mot :

  1. celui de traducteur,

  2. celui d’explicateur de certains termes arabes dont le sens est obscur pour une personne peu instruite dans les subtilités de la langue

  3. celui de médiateur. Par exemple « il n’y aura pas le jour du jugement dernier de Targuman entre dieu et ses créatures ».

Il existe une racine russe, Tolmac, qui donne en allemand le mot Dollmetscher.

Avant de parler plus spécifiquement du métier de drogman, il faut situer ses origines, temporelle, géographique et culturelle.

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L’origine du mot est ancienne. Elle est fréquemment rencontrée au xiiie siècle. Elle couvre à cette période une aire géographique qui, en Méditerranée, va de l’Espagne à l’Égypte en passant par Tunis et jusqu’à Constantinople. En mer Noire, cette appellation est rencontrée dans les comptoirs génois de Caffa, en Crimée. Enfin, on trouve également les drogmans en Perse.

Monsieur Dupont-Ferrier, auteur d’un ouvrage qui fait autorité intitulé « Du collège de Clermont au lycée Louis-le-Grand » précise que « les Turcs, les Arabes et les Persans, aux xviie et xviiie siècles, se refusaient, sous l’influence de leur traditions religieuses, sinon de leur indolence, de leur orgueil et de leur dédain à parler les langues occidentales  ».

Il s’ensuivit, pour les Occidentaux, la nécessité de faire appel à des personnes capables de parler les langues orientales. Ces personnes furent recrutées en partie dans les communautés non-musulmanes de l’Empire ottoman, latine, orthodoxe, arménienne ou juive.

Le savant Dehérain indique : « est-il nécessaire d’ajouter que si très peu d’agents français en Turquie surent le turc, aucun haut fonctionnaire turc ne sut le français, aucun grand vizir ou reis efendi, c’est-à-dire ministre des affaires étrangères, ne put s’entendre sans interprète avec les fonctionnaires français  ».

Il semble qu’il y ait eu différentes classes de drogmans, les drogmans de carrière et les drogmans auxiliaires. Pour prendre comme exemple la République de Gênes, on trouve une classe de fonctionnaires de carrière assurant le rôle d’interprète. Plusieurs mentions des drogmans apparaissent dans le recueil de pièces diplomatiques des archives de Gênes publié par Sylvestre de Sacy et dans les précieuses collections d’actes notariés génois, publiés en particulier par monsieur Balard.

Ainsi dans le texte du traité fait entre le roi de Tunis et la République de Gênes, en 1250, apparaissent, entre autres, les gages qui sont payés aux « torcimania », traduisons drogmans.

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Par la connaissance qu’ils avaient des langues du pays, les drogmans participaient nécessairement à toutes les affaires des pays qu’ils servaient et défendaient les intérêts de leurs ressortissants. Leur domaine d’intervention était très vaste et englobait notamment les négociations diplomatiques, l’assistance juridique et interprétariat dans les transactions et les démarches commerciales. La traduction commune de drogman par interprète ne reflète qu’une partie de la fonction.

Les connaissances étendues demandées aux drogmans conduisirent à la création d’écoles de Jeunes de langues, terme utilisé pour désigner les élèves drogmans.

La République de Venise créa son école à Pera en 1551. Elle fut suivie peu après par la petite République de Raguse. Un siècle plus tard, en 1669, la France fonda son école à Pera. En 1754, l’Autriche créa son Académie orientale.

L’enseignement donné aux Jeunes de langues était long et fastidieux. Un mémoire du xviiie siècle liste tout ce qu’un bon drogman doit savoir : « La langue de sa patrie, assez de latin pour pouvoir profiter des dictionnaires et des ouvrages orientaux traduits dans cette langue. L’italien, le grec, le turc, l’arabe et le persan de manière à pouvoir composer et traduire. Il doit être instruit des intérêts généraux des puissances, et des principes du commerce, posséder l’histoire et la géographie, et surtout connaître à fond les lois et les usages de la Turquie, la marche de son gouvernement ottoman, et les formalités de son administration. Cette étude pour un sujet même ait-dessus du médiocre, est au moins de dix ans ».

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Selon un autre mémoire de la même époque, un bon drogman devait joindre à ces connaissances plusieurs qualités essentielles : « Il lui faut un esprit de sagesse, de conciliation et de fermeté, un fond inaltérable de probité et de droiture, assez de courage pour braver le fléau de la peste qui, à Constantinople surtout n’interrompt jamais le cours des affaires, une élévation d’âme qui le rende insensible aux désagréments que lui présenteront l’orgueil religionnaire de Turcs, et leur fierté brutale. Il doit se mettre au-dessus des humiliations auxquelles son amour propre est fréquemment exposé dans ces négociations, pour n’envisager que l’utilité dont il est à son pays et à ses compatriotes ?

Dans l’Empire ottoman, les drogmans de carrière exerçaient leurs fonctions à l’ambassade et dans les différents consulats du Levant et de Barbarie. Le poste le plus prestigieux était celui de premier drogman de l’ambassade à Constantinople. Un mémoire de la fin du xviii siècle fait ressortir cette importance : « Et comme il est essentiel que le premier drogman de cette capitale (Constantinople) soit toujours un homme de mérite, celui qui exercerait cette place aurait le grade et les appointements de consul général et pourrait en cette qualité concourir avec les autres pour l’ambassade.

L’exercice de cette fonction n’était pas sans risque. Le drogman était exposé aux fléaux, comme les incendies, la peste, les tremblements de terre et à la sévérité des autorités ottomanes dont les réactions pouvaient aller de l’humiliation jusqu’à la pendaison en passant par les fers et la bastonnade.

Malgré les vicissitudes encourues, la fonction de drogman était recherchée. Il semble que cet attrait soit dû aux avantages que les capitulations donnaient aux drogmans et au rang social qu’ils occupaient au sein de leur communauté, notamment à Constantinople où leur groupe constituait une noblesse particulière. Cette importance transparaît dans les anciens registres paroissiaux de Constantinople où l’on trouve leur noms précédés du qualificatif « illustrissime » ainsi que sur leurs pierres tombales, lorsqu’elles existent encore, sur lesquelles on peut voir leurs blasons.

Fra Mauri della Fratta, qui visita Constantinople vers 1630, indique que : « plusieurs de ces familles se conservent encore (à Pera) dans leur antique splendeur, s’occupant de tout ce qui regarde l’administration de la communauté, des couvent, des églises… ».

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Cette splendeur pouvait susciter la jalousie des Ottomans. Le grand drogman de Venise Grillo fut étranglé au xviie siècle, d’après les chroniqueurs, car ses filles étaient plus parées que les sultanes elles-mêmes.

Certaines familles monopolisaient les postes de drogmans, créant ainsi de véritables dynasties.

Ce phénomène n’est pas né avec la création des écoles de langues orientales. Pour citer le cas de la France, il trouve ses racines vers l560, un siècle avant la création de l’école des Jeunes de langues par Colbert en 1669.

La première dynastie de drogmans de France connue, celle des Olivieri, apparaît vers 1560 ainsi qu’il ressort de l’analyse de la liste des drogman de France à Constantinople.

L’émergence de ces dynasties n’est pas spécifique à la France. L’étude des drogmans des autres pays européens montre que ce phénomène existe également pour la République de Venise, l’Angleterre, l’Autriche et la Hollande. Au service de Venise se succéderont les familles Salvago, à partir d’environ 1530, Navoni, Grillo, Tarsia et Bruti, à celui de l’Angleterre serviront des générations de Timoni et de Pisani et à celui de la Hollande les Testa pendant plus de trois siècles.

Il n’est pas possible de parler des drogmans sans évoquer leur costume typique. Ils étaient richement vêtus de vestes de satin et de robes écarlates doublées de martre et de zibeline avec de très beaux bonnets fourrés appelés Kalpak. Ils chaussaient des babouches jaunes, couleur strictement réservée aux Turcs.

Dans l’Empire ottoman, l’appartenance à une communauté religieuse a été longtemps marquée par le vêtement et sa couleur. Chaque individu, qu’il soit chrétien, juif ou musulman portait les vêtements propres à sa communauté. À cheval entre deux cultures, les drogmans n’échappaient pas à la règle.

Étudier les drogmans plonge le chercheur au sein de l’histoire diplomatique européenne dans l’Empire ottoman. Ces hommes ne sont plus alors comme on les perçoit communément en Occident, c’est-à-dire de simples subalternes au service de l’ambassadeur ou du consul. Ils apparaissent comme des acteurs à part entière de l’histoire.

Source bibliographique

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