Notice sur le Capcir Mise à jour septembre 2021
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Ce petit fascicule est intéressant pour ce qu’il nous raconte du Capcir où ont vécu les Merlat.

En publiant cet indisponible, je sais bien que je suis en avance de quelques 25 années sur son entrée dans le domaine public, c'est tout à l'avantage d'Albert Cazes qui y gagne un peu en notoriété et bien sûr de tous ces nouveaux lecteurs qui trouveront un intérêt dans son travail.

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Abbé Albert CÀZES

LE CAPCIR

Guide Touristique « CONFLENT »
1975

LE CAPCIR

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Le Capcir est une petite région tout à fait à part, bien délimitée par ses cols et ses montagnes. Il sert de transition entre le Haut-Conflent et le Rases dont il a fait partie dès les temps les plus reculés. Rattaché au comté de Cerdagne au cours du siècle, il constituera au xive siècle une sous-viguerie dépendant de la viguerie de Conflent et dont le siège sera établi à Puigbaladós.

Son ancien nom était apparemment « La Montagne », comme l’indique un acte de 1035, et confirme un autre de 1087 situant la villa de Real dans « La Montagne appelée Capcir » ( ).

Le mot Capcir semble provenir du nom du col de Campser, lieudit délimitant en 873 la territoire de Formiguera au nord, et en 1087 celui de Real à l’est ( ).

Si nous nous souvenons que le lieudit de Vallsera, dans les environs, a été interprété c’est-à-dire Vallée des Ours, en 10Il (Marca), il faudra convenir que Campser serait à traduire par Champ des Ours. Certes, normalement, cela aurait donné Capser ou Capcer et non Capcir, mais justement on trouve la forme Capcer en 1272 ( ). Sous toute réserve

Les habitants du Capcir sont désignés sous le nom de Capcinesos.

Pour ce qui est de la juridiction ecclésiastique, le Capcir a dépendu de l’archevêché de Narbonne jusqu’en 1318, date de la création du diocése d’Alet dont il fit dès Iors partie jusqu’à la Révolution.

EGLISE SAINT-SAUVEUR D’ELS ANGLES

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Dans son diplôme de 908 en faveur de Saint-Jacques de Jocou en Razès, le roi Charles le Simple confirme comme possession de cette abbaye l’église Saint-Sauveur d’Els Angles.

Cette église disparut comme il se doit à l’époque romane qui construisit sa façon un nouvel édifice dont il ne subsiste plus que des ruines informes a 300 mètres au nord du village, au lieudit l’iglesia veIla ; nous savons cependant que son abside semi-circulaire comportait en corniche une série d‘arcs posés sur des consoles et surmontés d’une ceinture de dents d’engrenage comme à Cornellà de Conflent et à Conat ; tout cet appareil de pierre taillée a été enlevé et remployé, et on le retrouve dans la bâtisse d’aujourd‘hui, sans en excepter les modillons du chevet.

L’église actuelle porte la date de 1864 sur le pilier du sanctuaire et de 1866 au fronton du portail ; ce sont les dates de sa construction.

Au bas de la façade, dans l’angle, une croix pattée à pied fiché, accostée de l’alpha et l‘oméga christiques, constitue le symbole la sépulture chrétienne qui accompagnait l’épitaphe, apparemment perdue, de Benefacta (Bienfaite) : Armo ab incarnacionc Christi MCLXIX, xv kalendas septembris, obiit Benefacta. Anima eius requiescat in pace. Amen. C’est-à-dire : « L’an de l’Incarnation du Christ 1169, le 15 des calendes de septembre, est décédée Benefacta. Que son âme repose en paix ! Amen ». Cette croix a été placée à l’envers par un maçon astucieux. Il est non moins astucieux pour une morte de s’appeler Bienfaite.

Pour tout mobilier à signaler, nous n’avons que le saint Michel, le saint Pierre et le saint Paul du maitre-autel, d’époque baroque, c’est-à-dire du début du xviiie siècle. À propos de saint Michel, constatons qu’il est devenu le titulaire officiel en lieu et place du Saint-Sauveur, sans doute en raison de quelque dévotion due à ce que l’abbé de Saint-Michel de Cuixà était seigneur d’Els Angles.

Le retable de l’Epiphanie mérite aussi mention ; c’est monument du milieu du xviiie siècle, présentant essentiellement sur un grand panneau sculpté la scène de l’Adoration des Mages, scène qui doit probablement sa présence solitaire à quelque autre dévotion, celle à saint Gaspard dont témoigne la cloche de 1780.

Une cloche en effet porte l’inscription : 1780. loan R. Chalon, consul. Sancte Gaspare, ora pro nobis. Une seconde : 1607. IHS (Jésus) MA (Marlq). Sit Domini benedictum. Et une troisième : Avs Maria de Balcere. Refondue en 1937 ; cette troisième cloche provient donc de l’église de Vallsera, et nous inférons de cette invocation que la Vierge était la sainte titulaire de cette église.

Le chroniqueur de la cérémonie de bénédiction qui eut lieu en cette année 1937, conclut ainsi son compte rendu : termine en remerciant M. Sanson, le généreux parrain de Marie de Balcère, d’avoir rendu sa belle voix à cette cloche qui l’avait perdue pour avoir trop chanté un jour de confirmation ». Une quatrième cloche enfin est datée de 1857.

EL CASTELL DEL PUIG DELS ANGLES

Au xiiie siècle on construisit un castrum (fortifications) sur le Puig (éminence), ce qui commença d’amener des habitations tout autour, et ce qui explique que le village, situé primitivement aux abords de l’ancienne église, se soit peu à peu transporté à l‘endroit actuel par souci de sécurité, comme dans tant d’autres cas. Il reste à côté de l’église quelques vestiges de ce castell et notamment une porte-tour.

C’est en 1181 que le roi Alphonse d’Aragon autorisa l’abbé de Cuixà à construire des forteresses sur les terres de la seigneurie de ce monastère. ( ).

TOPONYMIE

Le sens du mot Angles donne au village qui s’appelle ainsi une position à l’écart, éloignée et solitaire ; ce qui correspond de fait à notre toponyme. C’est le même nom, mais au singulier, que porte un hameau de Cerdagne, Vilanguli (Vila de I’Angle), devenu par déformation Branguli.

La même signification est à voir dans le lieu-dit d’Els Anglars, qui est un diminutif, et que l’on trouve aussi en Capcir pour désigner un vilar (hameau) sis entré Puigbaladós et le massif des Madras, et que l’on rencontre encore en Roussillon, près de Salelles, ainsi qu’en Vallespir, près de Montferrer.

ll existe enfin dans la même famille le féminin Anglada qualifiant notamment un terroir de Cornellà de Conflent.

LA RIVIERE D’AUDE

L’Aude, explique Pierre Vidal, prend sa source en Capcir, sur les flancs d’un long plateau aux rebords escarpés, appelé Lo Lloret. Ses premières fontaines sont des ruisselets qui viennent du Pic d’Aude et du Roc d‘Aude, se réunissent et vont se jeter dans un petit lac appelé l’Estany d’Auda ; celui-ci occupe un cirque de modeste étendue, entouré à l’ouest et au sud de monticules rocheux. C’est de ce lac que s’échappe le fleuve sous forme de ruisseau.

Après sa traversée du Capcir, la rivière de l’Aude quitte le département des Pyrénées-Orientales et s’en va donner son nom au département voisin.

TOPOGRAPHIE

En 965, Seniofred, comte de Cerdagne, lègue l’abbaye de Cuixà son alleu d’Els Angles avec le marché, et Matamala, avec ses villas et sesvilars. Cet acte nous signale donc la privilège d’un marché aux Angles, apparemment au comte de Cerdagne d’autre part, parmi les dépendances de cet alleu, il faut compter Vallsera comme le précisent des documents postérieurs.

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Cet alleu d’Els Angles et Matamala comporte la délimitation suivante : le ruisseau et la villa de Formiguera, la villa de Creu et le sommet du mont Escalivat, Quillà (La Quillana), El Mel, Camp-as et le Puig-Calb, Camp-Rei de Champ du Roi) et le Puig Elperic, le territoire de Formiguera.

Ce fameux marché mentionné en 965 a donné naissance au lieu-dit au Mercadal qui apparait dans les chartes au xie siècle sur le terroir d’Els Angles et sur celui de Formiguera.

PAUL NAUDO

évêque de Nevers de 1834 à 1842

archevêque d’Avignon de 1842 à † 1848

Paul Naudo est né aux Angles en 1794. Nous donnons simplement ses armes qui portent : d’azur une ancre d’argent, au chef cousu de gueules chargé de 3 croisettes pattées aussi d’argent. Sa devise In te Domine speravi est tirée du livre des Psaumes (XXX-1).

L’abbé Malart, en 1843, décrivant une Adoration des Mages de l’église de Nyer, se permet ces réflexions irrespectueuses : « Saint Joseph, lui,-droit derrière la Vierge, rit avec une pieuse bonhomie. Il est fier de cet enfant et de la triple visite. Le sa compagne est le sien. C’est le frère Naudo qui se croit un grand homme parce que son frère est archevêque ».

EGLISE SAINTE-MARIE DE VALLSERA

Vallsera qui devait faire partie en 965 de l’alleu d’Els Angles cédé par le comte de Cerdagne à l’abbaye de Cuixà, est en tout cas confirmée comme possession de ce monastère par une bulle de 1011, sous le nom de Vallem Ursariam (Vallée des Ours).

Les ruines de son église romane toute simple gisent encore dans la solitude et depuis fort longtemps : en 1701, par exemple, l’abbé de Cuixà concède à la communauté d’Els Angles, la devèse (territoire mis en défens) de Vallsera en laquelle anciennement était édifié et construit un village, lequel appert encore par les ruines des maisons, aux environs duquel était une église, comme à présent appert de ladite ayant voûte entière. ( ). Seule est encore debout la muraille ouest avec sa fenêtre à double ébrasement. La cloche qui nichait autrefois au sommet de ce mur-clocher, s’est réfugiée, refondue toutefois en 1937, au clocher de l’église d’Els Angles.

LE PAYS DU FROID

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Supplique adressée à l’Intendant par le curé des Angles

Monseigneur,

Les habitants de ma paroisse des Angles ont recours à Votre Grandeur pour implorer très humblement sa protection contre les rigueurs de l’hiver, dont ils sont menacés cette année comme ils l’ont éprouvé toutes les autres. Le Capcir est un pays dont les montagnes sont des plus élevées des Pyrénées, et les neiges et la glace y font leur séjour continuel. Par cela même ils demandent les larmes aux yeux que Votre Grandeur leur permette de se procurer le chauffage qui leur est aussi nécessaire que le pain. Ainsi je ne doute point que si Votre Grandeur était informée de cette nécessité, elle ne touchée de compassion, et que la charité déjà portée à la modération de ses ordonnances ; mais il est à craindre que si quelqu’un sait cette nécessité, (il) n’ait surpris votre religion pour obliger mes paroissiens à tomber malgré eux dans le lot rude transgresser les ordonnances, et d’être saisis et condamnés à des grosses amendes. Car, quand on ne leur a permis que de couper des branches qui ne sont que des feuilles de pin portées sur des petits bois comme le doigt, ils ont été dans la dure nécessité de ne pouvoir faire cuire le pain qui est assez difficile à la cuisson par la mauvaise qualité du seigle que produit le pays. Et on attribue la mort de quelques misérables au pain qu’ils mangeaient cet hiver.

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Néanmoins je les exhorte, et je ne me lasserai jamais de les exhorter pour les porter à l’observation de ce que Votre Grandeur leur a prescrit ils le veulent bien, mais ils souhaitent ardemment, et moi avec eux, qu’il soit permis de faire bientôt la coupe du bois nécessaire au chauffage ; ils se contentent de la petite quantité à laquelle ils ont été taxés par experts, qui n’est pas fort considérable, vu que j’ai dans ma paroisse six cents âmes. Et au Mont-Louis il n’y a pas la moitié des habitants d’ici, cependant s’y consume plus que du double de bois, et cela bien compté et bien toisé. S’ils ne font point la coupe du bois bientôt, ils ont à craindre qu’après la moisson ils ne pourront point pénétrer dans les neiges pour en avoir. D’ailleurs quand même ça ne serait pas, le pin qui est le plus mauvais bois pour le chauffage, s’il est vert Il en faut une plus grands quantité sans qu’on puisse s’en chauffer. Si les habitants des Angles ont conservé leurs propres bois, ce n’est que pour le chauffage ; il ne sera jamais propre à être de haute futaie, cela ayant été vérifié par témoins étrangers.

Je suis persuadé, Monseigneur, qu’on n’a jamais pu informer Votre Grandeur du froid extrême qu’on souffre dans le Capcir, puisqu’il n’y a qu’un certain séjour qui puisse en faire décider en quelque saison qu’on l’y fasse. Car le carême dernier, ce peuple étant sur le point de manquer de prêtre, fus envoyé pour faire les fonctions curiales, et, dans plusieurs occasions, voyant venir à l’église plusieurs vieillards larmoyants et tremblants de froid, je leur dis qu’ils étaient dispensés d’assister À la messe. « Hélas, me répondirent-ils, que ferons-nous à la maison, dès que le bois nous manque pour faire du feu ? ». Et dans ce temps-là j’étais obligé de sortir par les fenêtres la neige y venant vis-à-vis. Dans le même temps je fus obligé de différer une sépulture quatre jours, parce qu’on ne pouvait faire la fosse, la glace pénétrant trois pans (palmes) dans la terre. Le premier jour d’avril, le verglas avait quatre pans d’épais dans les rues des Angles, malgré douze jours de pluie ou de vent d’Espagne qui faisait la grande fonte des neiges.

Enfin, Monseigneur‘, Votre Grandeur saura que le bois à chauffer est dans ce pays de Capcir plus nécessaire en été que dans tout le Roussillon en hiver ; car le dix-huit de juin, et le dix et sept de juillet, il a neigé et glacé ici ; de sorte que, me trouvant sans bois, j’étais obligé de suspendre les exercices pour m’aller chauffer chez les particuliers, ce qui était très désagréable pour moi. Et alors monsieur le bayle (bailli) des Angles, voyant ma triste situation, eut la charité de me faire apporter une misérable charretée de ce feuillage de pin ; et c’est aujourd’hui toute ma ressource.

Et si Votre Grandeur ne permet point à mes paroissiens de couper du bois, je ne sais que devenir ; à moins que je ne cherche ailleurs un asile pour me garantir des rigueurs du froid, et par là éviter la mort, que plusieurs que j’ai ensevelis ce printemps n’ont pu éviter faute de bois. Ainsi, Monseigneur, Il me parait que la conservation de la vie est préférable à celle des bois. De là nous espérons que votre bonté ordinaire contribuera de cet été au soulagement d’un peuple qui gémit assez d’habiter des montagnes si désagréables d’elles-mêmes que les bêtes les plus farouches sont obligées d’abandonner en hiver. Et nous prierons le Seigneur d’y faire le reste ; et qu’Il comble Votre Grandeur des bénédictions.

J’ai l’honneur d‘être avec le plus profond respect, Monseigneur, votre très humble et très obéissant serviteur.

Capela, prêtre, curé.

Aux Angles le 15e août 1758 .

ELECTIONS CONTESTEES du 7 octobre 1766

Il nous a été rapporté qu’aux Angles, après que le juge eut annoncé que, suivant l’édit et la déclaration du mois de mai dernier, les curés étaient de droit les premiers notables de leur paroisse, celui des Angles, fort content de cette nouvelle, s’empara de suite de l’esprit des principaux habitants ; il leur fit lui-même les billets de scrutin suivant son et sa fantaisie et réussit par là à faire nommer notables, conseillers et échevins, les personnes qu’il jugea à propos. Le baile (bailli) chez qui on était assemble, qui s’aperçut de cette manœuvre, s’en récria fortement et en porta sa plainte au juge qui dit hautement que cela ne ’pouvait point se faim, mais ni plus ni moins la chose passa ; il se récrie aussi de ce qu’on ne l’a pas appelé à l’assemblée ni en qualité de baile ni en qualité de particulier, et qu’on lui a dit que, suivant l’édit et la déclaration, lui qui en était autrefois le chef, en est totalement exclu.

Voilà d’abord le mauvais effet du scrutin et les mauvaises manœuvre qui résulteront toujours de l’admission des curés dans ces sortes d’assemblées ils feront toujours tout ce qu’ils voudront .

FORMATION DES ELITES

En 1767, Pierre Salvat, pagès (paysan), habitant au lieu des Angles en Capcir, réclame à la communauté de Matemale de lui payer dans 8 jours 10 livres « pour la nourriture du taureau de la commune pendant l’hiver dernier ».

Le viguier estime qu’il y a lieu en effet de lui « payer dans huitaine ladite somme de dix livres pour la nourriture du taureau commun dont il s‘agit » .

« Monseigneur (l’Intendant)… je retire de mon bien les provisions nécessaires pour nourrir et entretenir en bon état l’étalon, et pour preuve que l’étalon est bien chez moi, c’est qu’ils servent plus du temps avec moi qu’ils ne peuvent servir chez les autres… ». Rolland.

À Puyvalador ce 36 janvier 1752 .

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EGLISE SAINT-PIERRE DE MATAMALA

En 1413, Jean de Berques, étudiant en droit, désigne des procureurs pour prendre possession en son nom, de la rectorie de l’église paroissiale Saint-Pierre de Matamala, diocèse d’Alet. C’est la première mention que nous ayons pu trouver de cette église ; par contre le toponyme figure dans un acte de 965 dont nous parlons à la suite de l’église d’Els Angles.

L’église actuelle nous donne apparemment, gravée sur son portail, la date de sa construction : 1626. L’abside est imitée des chevets semi-circulaires romans ; quant à la nef, elle est formée de deux arcs diaphragmes, dont l’un fait aussi office d’arc triomphal, qui soutiennent depuis 1957 une voûte en brique, la charpente antérieure ayant accidentellement. Une porte à l’ouest a été ouverte en 1769.

On ne peut pas ne pas remarquer, il cause de ses dimensions respectables, la pierre d’autel moderne en granit poli. Le bénitier en marbre est daté de 1638. La chapelle sud, percée au siècle dernier, présente un saint Joachim et une sainte Anne baroques. Le trésor comprend un calice en argent avec l’inscription : Francisco Maler. 1708, due à l’orfèvre Michel Guzi.

Sur le claveau central du portail latéral, sont gravées les armes de Matamala avec la date de 1626 ; nous blasonnons : les clés de saint Pierre passées en sautoir et accostées de deux croisettes pattées. Les clés passées en sautoir constituent le blason classique de communes patronnées par saint Pierre ; c’est le cas notamment de Céret et de Page.

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En face de ce portail se dresse une croix en fer forgé provenant du cimetière, lequel, comme toujours autrefois, était attenant à l’église ; elle nous donne sa date de fabrication : 1777, ainsi que le nom de son curé : Causson.

Le clocher, daté de 1868, ne manque pas d’élégance avec ses deux étages en retraite bien prononcée.

Matamala comprenait le hameau de Conangle dont il est question en 1146 à propos de la dime, et qui, disparu depuis longtemps, avait néanmoins laissé un lieudit que le récent barrage a recouvert d’eau et d’oubli.

Dans le village, à l’écart de l’église, se dresse un oratoire dont le mur de façade s’élève extraordinairement pour nicher une cloche à son sommet ; c’était la cloche d’alarme pour les incendies. En 1819, un second petit oratoire a été érigé en l’honneur de saint Pierre, dans les champs, vers Formiguera ; sur un gros pilier bâti, une imposante niche a été taillée dans un bloc de granit.

Dictons du Capcir

QUE POCA COSA ES FRANQA QUAN JO HE VIST QUERIGUT

(Que peu de chose est France quand j’ai vu Quérigut)

Ce dicton ne peut que remonter avant le traité des Pyrénées. Effectivement, du haut du Capcir, Quérigut constitue toute la vision de la France.

EL MINISTRE

« Le ministre » c’est tout bonnement le cochon de la maison qu’on engraisse dans des vues intéressées. Ce n’est pas tellement irrévérencieux ; c’est somme toute une comparaison judicieuse ; on le gave, on a des égards pour lui ; il est normal qu’il se porte bien, car, en fin de compte, l’avenir dépend de son embonpoint. En le servant il sert.

EGLISE SAINTE-MARIE DE FORMIGUERA

HISTORIQUE

En 873, Sigebod, archevêque de Narbonne, se rend dans le comté de Rasès, à Formiguera, à l’appel de Gulfaric, abbé de Saint-Jacques, pour consacrer l’église Sainte-Marie avec ses oratoires Saint-Pierre et Saint-Jean-Baptiste.

D’après cet acte l’église de Formiguera est bâtie sur le ruisseau également appelé Formiguera. En outre la délimitation de la paroisse mentionne à l’est les sommets des monts dits Clariana, au midi. Les Locres et Campsllong, à l’ouest Vantenag (ou Ventenac) et Fenestres, au nord Campser et Les Ares.

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D’autre part cette église, qualifiée de cenobium (maison de religieux) se trouve sous la dépendance du monastère Saint-Jacques de Jocou.

En 1019, Eribert, abbé de Jocou, et Salomon, préfet de Sainte-Marie, agrandissent l’église de Formiguera, qui était petite, et convoquent Guifred, archevêque de Narbonne, pour une seconde consécration.

Si l’on trouve à cette date que l’église est trop petite, c‘est tout simplement que, depuis 873, la population a augmenté.

L’EDIFICE

« Il serait bien téméraire d’affirmer qu’il subsiste une portion quelconque de l’église consacrée en 873 », assure Brutails ; ce qui veut dire qu’il n’en reste rien.

« Peut-être, continue cet auteur, le chevet est-il du xie siècle », donc relevant de la consécration de 1019 ; c’est très vraisemblable.

Il est non moins vraisemblable que l’église de Formiguera, excepté par conséquent le chevet, a été rebâtie dans la seconde moitié du xie siècle. C’est à cette date que nous situons la façade, plus précisément toute la partie en pierre de taille, avec sa porte et sa fenêtre couronnée de dents d’engrenage, fenêtre élargie après coup à l’intérieur, sauf le sommet, ce qui la rend étrange. La nef actuelle ressortit également à cette œuvre romane avec sa voute qui n’a gardé qu’au-dessus de la tribune quelques tronçons de sa corniche, et avec ses deux fenêtres de la face sud, l’une ajourant le sanctuaire, l’autre, murée, donnant maintenant dans la sacristie.

Formiguera fut fortifiée au xive siècle sous le roi Pierre d’Aragon ; son seigneur fit donation de la rectoria per ser encastellada ; en 1383 on se préoccupe de couvrir la sala la fortsa (castell) Formiguera qui esta en perill de caure; de même en 1392 il est question de reparar la casa de la rectoria que es dins la fortse. L’église, partie essentielle du dispositif de défense, vit alors surélever son abside et ménager sur sa une sorte de « C’est l’une des très rares églises de la contrée où une charpente est interposée entre la toiture et la voûte », nous dit Brutails. Ce qui est sans doute vrai pour le Capcir, mais la chose est commune en Conflent ; citons Saint-Clément de Sirac, Saint-Valentin de Corts, Saint-Martin de Noedes, Saint-Cyprien de Saorra, etc… Le toit de l’église constituait en général le dernier retranchement.

Le côté ouest de la face nord bénéficie à l’extérieur d’un petit mur faisant office de contrefort, réclamé sans doute par l’édifice lors de la percée de la chapelle Saint-Antoine, au début du xviiie siècle.

Le mur-clocher, dans son état actuel, doit remonter au xive siècle, à l’époque des fortifications ; la cloche la plus ancienne porte l’inscription : IHS, Ave Maria gracia plena, Dominus tecum. Vox Domini sonat. L’an MCCCCLXXXVIII. Te Deum laudamus. C’est-à-dire : « Jésus Salut Marie, pleine grâce, le Seigneur est avec toi. C’est la voix du Seigneur qui sonne. L’an 1488. Dieu, nous Te louons ».

LE MOBILIER

Nous remarquons dans le sanctuaire la statue de sainte Catherine avec la roue de son supplice, aux traits caractéristiques d’un sculpteur à qui l’on doit diverses statues et reliquaires en Conflent et en Roussillon.

La table de communion, placée en 1892, présente certaines parties en onyx de Fontrabiosa.

La chapelle sud-ouest a été certainement la première à être ouverte dans la nef romane, pour la gloire de N.-D. du Rosaire ; le retable daté de 1737 n’a pas tardé à la garnir ; le voici en tableau :

Les deux têtes, d’homme et de femme, mises de profil sur les médaillons supérieurs, doivent représenter, selon nous, les portraits collectifs de toute la population qui a participé aux frais de l’œuvre.

Les grenades du socle de N.-D. du Rosaire sont sans doute décoratives comme tous les autres fruits, mais la grenade est bien le seul fruit qui comporte une couronne, et puis, et surtout, elle figure dans le Cantique des Cantiques, pour comparer à la couleur de ses graines les joues de l’épouse bien-aimée.

La chapelle d’en face, c’est-à-dire celle du nord-ouest, a dû être ouverte en second lieu, pour la gloire de Saint-Antoine, ermite, auquel est consacré le retable daté de 1727. II s’agit principalement d’une toile passablement enfumée qui représente la visite de Saint-Antoine à Saint-Paul, ermite, dans le désert ; l’un était nonagénaire, l’autre avait 113 ans ; ils s’entretiennent longuement du royaume de Dieu, et voici qu’un corbeau, qui d’habitude n’apportait que la moitié d’un pain, l’apporte aujourd’hui tout entier.

Le médaillon d’en haut porte le buste de saint Jean-Baptiste ; Il y a lieu de se rappeler ici que la première église, de 873, avait un autel dédié à ce saint.

À gauche, un saint Eloi, évêque, tient le marteau de ses professions antérieures, de forgeron et d’orfèvre.

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La chapelle attenante, nord-est, est datée de 1843 sur son œil-de-bœuf, à l’extérieur ; ce qui situe à peu prés son retable à la même époque.

Et venons-en à la chapelle sud-est, construite en 1878 en même temps que la sacristie adjacente. On y voit un grand Christ descendu de la croix qui constitue de loin la plus belle pièce d’art de tout le Capcir et qu’on situe dans la seconde moitié du xiie siècle. Sans doute deux ou trois personnages l’entouraient pour effectuer l’opération, mais il a seul au contraire certaines autres descentes de croix conservées en Catalogne, qui comprennent plusieurs participants. Non seulement ce christ a subsisté, mais, qui plus est, dans un état conservation admirable. C’est l’œuvre en outre d’un maitre sculpteur. Nous ne ferons remarquer que la trace du coup de lance discrètement marquée sur le flanc droit selon la tradition, la symbolique chrétienne considérant ce côté-là comme supérieur au côté gauche ; d’autre part une réminiscence d’Ezéchiel : J’ai vu l’eau sortir du temple du côté droit (XLVII-1-2), n’est vraisemblablement pas étrangère à cette façon de faire

La sacristie garde une Vierge assise, des environs de 1309 ; la Mère et l’Enfant portent tous les deux, symétriquement, l’une dans la main droite et l’autre dans la main gauche, un objet arrondi qui ne peut-être chez la première que de fruit symbolique de la nouvelle Eve, et chez le second la boule du monde qu’il a créé et qu’il vient racheter.

Le trésor comprend seulement une croix processionnelle en argent repoussé et ciselé, portant l’inscription : Ageri, curé, 1710, et due à l’orfèvre de Perpinyà, Manel Codina.

Il reste à mentionner un petit bénitier octogonal en marbre encastré dans la muraille, à l’escalier de la tribune, et remontant au Moyen Age.

MORT DU ROI SANCHE

Le roi Sanche de Majorque qui l’on doit la pose en avril 1324 de la première pierre de la nouvelle église Saint-Jean-Baptiste de Perpinyà (l’actuelle cathédrale), mourut le 4 septembre suivant a Formiguera et fut inhumé dans l’église Saint-Jean-le-Vieux de Perpinyà.

TOPOGRAPHIE

CASELLES. — En 1282 a lieu la vente du vilar de Caselles, sis sur le territoire et dans la décimaire de Sainte-Marie de Formiguera ; sa délimitation mentionne le Puig-Rodon, la Coma Cornebanes, le ruisseau l’étang de Formiguera, l’eau de Vallsera qui descend jusqu’à Formiguera ; ce vilar comporte des moulins au-delà de l’eau de Vallsera jusqu’à la Quera.

GALBA. — En 1098, Arnaud Arnau fait donation à l’abbaye de Cuixà, du vilar de Galba, en comté de Cerdagne, dans le décimaire de Sainte-Marie de Formiguera.

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CREU. — La villa de Creu est donnée en 965 comme confrontant l’alleu d’Els Angles. Cette villa, qualifiée de castrum (village fortifé en 1402, était limitée à cette date par les territoires de Formiguera, de Matamala et de Ralleu ; de fait elle se situe là où subsiste, à demi ruinée, la tour médiévale à plan carré, entre Matamala et Vilanova.

Creu a donné naissance dès le xie siècle à un faubourg lointain qui n’est autre que Vilanova (Ville Neuve par opposition à la Vieille Creu).

Le terrier de 1345 mentionne en fait de lieu-dit : La Calmaselle toponyme qu’on retrouve en Vallespir contracté en Calmella ; Le Erasses ; la Font de Sant Joan (la dévotion à saint Jean est déjà signalé dans l’acte de consécration de l’église de 873); El Queragut (roche pointu), toponyme qu’on retrouve dans la France immédiate, transformé en Quérigut ; El Faig (Le Hêtre) ; Els Conillars (endroits à lapins) ; Volpillera (endroit à renards) ; El Mercadal ; L’Estany ; L’Espital ; El Garravets ; Els Evols ; El Castellar ; El Clot aiguader ; Els Canamar (plantations de chanvre) ; le mas appelé Cabana (faisant donc sans doute fonction d’auberge).

L’ATTAQUE DES FRANÇAIS EN 1598

En 1598 Formiguera fut envahie par les Français, mais le castel (église et presbytère) leur opposa une valida resistencia ; un tiers seulement des ennemis en réchappa (s’en salvaren sols la Zercera part del : qui eran e‘ntrats en lo casteall) .

Il s’agit des incursions des hérétiques français qui mirent à mal toute notre frontière : cette seule année 1598 qui vit la fin de ces hostilités, fut marquée notamment par l’attaque d’Opol, de Vinça, d’Illa, etc..

LE COMTE DE FORMIGUERA

En 1632, Philippe, roi d’Espagne, érige en comté le lieu de Sainte-Marie de Formiguera, en faveur de Pierre-Raymond Ça Forteza, procureur royal de Mallorca .

P.-R. Ca Forteza avait acheté la seigneurie de Formiguera à Louis dez Catllar, de Barcelona, en 1631.

Ce titre de comté subsista apparemment jusqu’é la Révolution puisqu’encore après 1779 Il est fait mention de François-Xavier de Tord de Calvo, comte et seigneur de Formiguera. ( ).

Quant aux dez Catllar, ils semblent avoir possédé le plus longtemps la seigneurie de Formiguera, depuis que Damien dez Catllar la reçut en dot, en 1460, de par son mariage avec Jeanne d’Ortafà et d’Oms : les armes de cette famille portaient : d’or à un château d’azur, maçonné, ouvert et ajouré du champ.

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D’autre part, depuis 1599 jusqu’à l’annexion de 1659, ce fut aussi les dez Cathlar qui, de père en fils, occupèrent le poste de châtelain de Puigbaladós.

FAMILLE DE FURMIGUERA

Cette famille, qui portait donc le nom du toponyme, n’a laissé, à notre connaissance, rien de particulier dans ses faits et gestes. Un seul membre sauvera ici l’honneur : Jacques de Formiguera († 1306), qui nous a légué son épitaphe sur la façade de l’église de Villefranche ; nous traduisons du latin : † L’an du Seigneur 1306, Ie 5 des calendes de septembre, est décédé Jacques de Formiguera, hebdomadier de Saint-Jacques de Villefranche. Que quiconque lira cette inscription prie pour son âme pour qu’elle soit heureuse devant Dieu avec les saints et les anges au Ciel. Amen. Toi qui vois ce tombeau, que ne méprises-tu ce qui est mortel puisque c’est dans une telle demeure que l‘on enferme tout homme. Ce que tu es, je le fus ; ce que je suis, tu le seras.

Contrairement à l’habitude, ce marbre ne porte point gravé sur son cadre l’emblème de la famille ; que ce fut une fourmi, constituant des armes parlantes, ne nous étonnerait guére. D’ailleurs Formiguera, écrivait Pierre Vidal au siècle dernier « semble correspondre au français Fourmiliere. La forêt de La Mata est semée d’habitations de fourmis, et je ne doute pas que le village ne tire son nom de cette circonstance qui dure certainement depuis bien des siècles ».

Ajoutons à toutes fins utiles qu’en Salanca, entre Torrelles et Vilallonga, existait dès 988 une villa de Formiguera d’où est issue une famille du même nom.

D’autre part, un document de 1389 signale sur le territoire de Seners, près d’Estoer, le lieu-dit de La Fromigada qui n’est pas sans rappeler notre toponyme de Formiguera.

LES SABOTS DE FORMIGUERA

Rapport du garde des pasquiers royaux (19 décembre 1766)

…Ayant été informé qu’il se faisait un grand commerce de sabots au lieu de Fourmiguère, provenant de la coupe d’arbres dans les bois de ladite communauté, dont il est également chargé de la garde, mais qui n’a pu vérifier ni en toiser les souches à cause de la grande quantité de neige qui couvre les dites souches (ce qu’il se propose et réserve néanmoins de faire du moment que ledit obstacle sera lève), il se serait mis en attendant aux aguets au dit lieu de Fourmiguère pour tâcher de surprendre les auteurs d’un pareil commerce ; et ayant en effet trouvé le jour de mardi dernier, seizième du courant, entre midi et une heure du soir, le nommé François Puig dit Escola, habitant au lieu de Ralleu, qui tenait à la porte du nommé Emmanuel Aggeri, du dit lieu de Fourmiguere, deux sacs de sabots tout près qu’il voulait sans doute charger sur quelque monture, et ayant interpellé ledit Puig de lui déclarer provenaient lesdits sabots, qui les lui aurait vendus, et ce qu’il voulait en faire, ledit Puig lui aurait répondu que ce n’était pas ses affaires ; en conséquence ledit garde aurait saisi sur le champ les deux sacs et sabots, lesquels ayant été par lui comptés en présence de Jean Coma, bale (bailli), et Jean Soubiela, échevin en premier rang dudit lieu de Fourmiguere, il s’en serait trouvé vingt-sept paires tout neufs, provenant d’arbres pin récemment coupes…

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Les criées générales ou règlements de police de 1744 concernant les villages de Nyer en Conflent et de Real et Odello en Capcir, lesquels relevaient du même seigneur, portent entre autres articles : « Il est défendu à tous habitants et étrangers de faire des sabots dans les forêts du dit seigneur, si ce n’est pour le propre usage des habitants, sous la peine de 6 livres ».

JUIFS À FORMIGUERA

En 1393, le roi Jean fait donation à Jean Garrius, bailli de Formiguera, de set cassades de Jueus que volien habitar en Formiguera (sept familles de Juifs qui voulaient habiter a Formiguera). .

CRIEES DE FORMIGUERA EN 1784

Les criées sont des règlements dz police locale que le seigneur faisait publier et afficher périodiquement au fur et à mesure des besoins et des circonstances.

Voici quelques articles de celles de Formiguera publiées en 1784.

  1. Faisons défenses a tous cabaretiers, hôtes, taverniers, de la ville de Formiguères, de recevoir et héberger dans leurs maisons, gens sans aveu et femmes débauchées plus d’une nuit, à peine de vingt livres d’amende et autres portées par les ordonnances ; leur enjoignons sous pareille amende de les révéler aux bailes (baillis) et consuls de la ville de Formiguères.

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  1. Ordonnons à toutes personnes de tenir les rues, chemins publics et ruisseaux, chacun en droit soi, dans leur terroir et à leur confrontation, bien accommodés à leurs frais et dépens pour le passage libre à pied et à cheval, à peine de six livres d’amende.

  2. Ordonnons à toutes personnes de trainer ou porter leurs bestiaux morts, dans les vingt et quatre heures, a cent pas loin de la ville de Formiguères et des chemins publics, à peine de dix livres d’amende. Leur ordonnons d’enterrer cinq pieds dans terre les bestiaux morts enragés ou de toute autre maladie qui pourrait être communiquée aux autres bestiaux de quelque espèce que ce soit, qui pourraient en manger ou s’en approcher…

  3. Faisons défenses a toutes personnes d’entasser, amasser et jeter ou mettre aucun fumier, charognes, pailles pourries ou autres immondices, dans les places, rues, carrefours, chemins publics ou particuliers de la ville de Formiguères, mais leur ordonnons de les porter aux propriétés ou aux voiries à cent pas loin de la ville et chemin de Formiguères.

  1. Enjoignons au fermier du logis ou au boucher, de donner et livrer au seigneur, et, à son absence, a son baile, toutes les langues des bêtes grosses qu’il tuera au-dessus de l’âge d’un an…

  1. Défendons à toutes personnes de jeter dans les rivières aucunes chaux, noix vomique, coque de Levant, momie ou autres drogues ou appâts dans les dites rivières de Formiguères à peine de punition corporelle.

  2. Faisons défenses sous peine de cinquante livres de faire rouir le chanvre dans les rivières et ruisseaux de Formiguères.

  3. Ceux qui auront la permission du seigneur de pécher, rejetteront aux dites rivières de Formiguères, les truites qu’ils auront prises ayant moins de six pouces entre l’œil et la queue, à peine de cinquante livres d’amende et confiscation contre les pécheurs ou marchands qui en auront acheté ou vendu lesdites truites.

  4. Faisons défenses a toutes personnes de quelque état et condition qu’elles soient et puissent de chasser à pied ou à cheval avec chiens ou oiseaux, sur terre ensemencée, depuis que le blé est en tuyau jusques après la dépouille ou récolte…

  5. Il est défendu de prendre dans les bois et forêts de Formiguères appartenant au seigneur, aucun aires d’oiseaux, et dans tout autre lieu du terroir de Formiguères les œufs des cailles, perdrix et faisans…

  1. Faisons défenses à toutes personnes de peler les arbres étant debout et sur pied…

  1. Faisons défenses aux pâtres et à toutes personnes d’apporter du feu et d’en allumer dans les forêts, landes et bruyères, appartenant au seigneur de Formiguères, ni de faire feu plus près d’un quart de lieue des dits bois et forêts, landes et bruyères, sous la peine‘ d’être punis pour la première fois de la peine du fouet, et de celle des galères en cas de récidive, et au surplus défendons aux dits pâtres et autres personnes de mettre le feu à dessein prémédité dans les dites landes, bruyères, bois et forêts, sous la peine de mort ou telle autre amende arbitraire, et aux dommages et intérêts soufferts par le seigneur propriétaire des dits bois.

  1. Faisons défenses à toutes personnes, telles qu’elles soient, de couper, depuis le lever jusques au coucher du soleil, dans ladite forêt dite del Bac et autres appartenant au seigneur, bois et garennes, aucuns arbres fruitiers, même des chênes et châtaigniers, a peine de 4 livres pour pied de tour ; de sapin, pin, tremble, frêne, saulx (saules), hêtre, tillot (tilleul), orme et charme, a peine de 50 sols pour chaque pied de tour… (La nuit les amendes sont doubles).

  2. .

CHAPELLE SAINTE-MARIE DE VILANOVA

Vila Nova (Ville Neuve), ancien hameau de Creu, village disparu, est donnée en 1087 comme confrontant au midi à la villa de Real.

Sa chapelle est datée de 1735 sur le claveau central du portail, et l’on ne trouve point dans les archives de mention antérieures.

Cette chapelle, qui est trop éloignée des habitations pour en avoir été l’église paroissiale, a dû commencer par un simple oratoire sanctifiant la source qui sourd à ses pieds. À l’exemple de celle de Font-Romeu, cette source a été consacrée à la Vierge, Fons Salutis Maria (Marie, source de la santé), et, la foi aidant cette est devenue miraculeuse, ce dont témoignent les goigs (cantiques catalans) : « Elle fait passer la et rend l’appétit, elle guérit les aveugles, etc… ».

1735 a marqué l’apogée du culte ses constructions dues, si l’on en croit la tradition, à « un vénérable prêtre qui, mis en prison sur une injuste accusation, avait fait vœu de remplacer, si son innocence était reconnue, le petit oratoire l’on vénérait une antique image de Marie, par une chapelle plus convenable. Son innocence fut reconnue en effet ; fidèle a son vœu, il éleva la chapelle telle qu’elle existe aujourd’hui, et y transféra l’image qui était dans l’oratoire ».

C’est donc d’aussitôt après 1735 qu’il faut dater le fastueux retable qui garnit le chevet ; voyez-en la présentation dans le tableau de la page suivante.

La délicieuse Vierge à l’Enfant qui occupe la place d’honneur est antérieure au retable et reflète la grâce gothique ; elle doit provenir de l’église de Formiguera.

On remarquera sur les panneaux de l’Assomption et de la Résurrection, la forme de cuve donnée aux tombeaux respectifs de la Vierge et du Christ.

L’un des bergers de la Nativité s’appuie sur son tirapotes, c’est-à-dire le béton judicieusement terminé par un crochet pour retenir par la patte le mouton qui s’égare.

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Le panneau inférieur racontant la découverte de la statue de N.-D. de Villeneuve, s’inspire des goigs :

En la terra de Capcir,

Centenars d’anys han passat

Que vasta imatge descobri

Un toro en haver grapat

Cerca una font molt fresca.

C’est-à-dire : « En pays de Capcir, Il y a des centaines d’années qu’un taureau découvrit votre statue en grattant auprès d’une source très fraiche ». C’est une légende commune à bien des vierges et notamment à celle de Font-Romeu.

Dans une niche murale est conservée la petite statue de facture artisanale provenant de l’oratoire primitif.

Au bas du retable et au niveau de l’autel, voltigent une demi-douzaine de tètes d’ange aux ailes dissymétriques, c’est-é-dire que l’une est dirigée vers le haut et l’autre vers le bas comme pour prendre un virage ; c’est une des fantaisies de la période baroque.

Quatre fers à mulets sont plantés à titre d’ex-voto sur le battant de la porte, attestant la reconnaissance des propriétaires pour la guérison de leurs montures. Cc n’est pas une exception : on en a fait autant sur la porte de l’église Saint-Martin de Palaldà.

Une ancienne coutume, maintenant disparue, est à signaler : des paroisses environnantes 0n portait dans cette chapelle la dépouille mortelle des défunts avant de la mettre en terre, pour concrétiser sans doute la demande de l’Ave Maria : priez pour nous… à l’heure d’e notre mort.

Cette chapelle possédait des moutons dont tout le hameau sans doute s’occupait, tant et si bien qu’en 1811, le curé de Formiguera, lors d’une séance du Conseil de fabrique, après le compte rendu du marguillier de la chapelle, déclare entre autres doléances : Vous avez entendu que les loups qui dévoré le petit troupeau de la chapelle dispersé dans différentes maisons de Villeneuve. D’où la prise de quelques décisions de réforme, par ces mots : Considérant que ladite chapelle, dite de Villeneuve, est une propriété qui provient des libéralités des communes du Capcir ; que le hameau de Villeneuve n’a d’autre titre que celui de l’avoir à l’extrémité de son territoire ; considérant que cette chapelle a toujours dépendu de l’église de Formiguères ; que le pays regarde cette propriété comme l’ornement le plus précieux ; que la Vénération pour la Mère de Dieu et ses images est grands dans nos communes… Considérant enfin que l’ambition des marguilliers de Notre-Dame de Villeneuve introduisait le fanatisme dans l’esprit des faibles et notamment des femmes, pour recevoir d’elles de plus fortes aumônes ; que les églises paroissiales en ressentaient les effets par le peu de libéralité qu’elles recevaient ; considérant en outre le mauvais usage que ces marguilliers despotes faisaient des fonds provenant des quêtes et libéralités des fidèles… Suivent des mesures d’ordre et de contrôle.

EGLISE SAINTE MARIE D’ESPOSOLLA

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Le vilar d’Esposolla, dépendant Fontrabiosa, est déjél mentionné en 1265. Nous en ignorons l’étymologie et donc la signification. Nous retrouvons également un lieu-dit Spusulla à Llec en Conflent en 1615, et un lieu-dit Tor desposola en 1296 à Cànoes .

L’église Sainte-Marie d’Esposolla est une construction de 1866, selon ce qu’indique le portail.

GROS GIBIER À ESPOSOLLA

En 1392, par acte signé à Formiguera, Pierre Vidal, procureur royal, attendu que les habitants d’Esposolla sont maltraités par bien des animaux sauvages, autant par les sangliers que par les ours, à tel point qu’il est question pour eux d’abandonner les lieux et de s’en aller ailleurs, les autorise à mettre le feu aux forêts de la châtellenie de Puig-Balados, excepté toutefois la Mata dû roi, autant de fois qu’ils le voudront, sans autre formalité que l’accord des consuls .

On trouve à la même date une autorisation de ce genre pour Planés .

LES PETITES HISTOIRES

À Prades le 31 mars 1722.

Les habitants du Capcir, Monsieur (l’Intendant), se plaignent que ceux du Donasan ne veulent pas leur en payant, de sortir de chez eux du bois pour faire des roues de charrettes, de quoi ils ne peuvent s’en passer tant pour leur usage que pour le service du roi…

Bordes (viguier de Conflent).

EGLISE SAINT-SEBASTIEN DE FONTRABIOSA

Dans son diplôme de 908 en faveur de Saint-Jacques de Jocou en Rasés, le Charles le Simple confirme comme possession de cette abbaye l’église Saint-Sébastien de Fontrabiosa.

Ce saint, rare comme titulaire d’église paroissiale (c’est le seul cas en Capcir, Cerdagne et Conflent), a suscité un village voisin une dévotion particulière : « D’après un vœu, nous dit l’abbé Giralt, dont l’origine remonte probablement a la peste de 1348, les habitants d’Aiguatebia se rendent en procession, tous les sept ans, a l’église de Saint-Sébastien de Fontrabiouse, et y apportent une immense roue de bougie filée, laquelle est destinée à briller pendant les offices devant la statue du saint jusqu’au prochain pèlerinage ». C’est la procession dite de la Roda, à laquelle, nous assure Pierre Vidal, tous les villages voisins d’Aiguatebia prennent part. Nous avons assisté à la Roda de 1889, et ce fut un spectacle bien curieux que cette théorie de Garrotxins et Garrotxines descendant par le col de Sansa avec leurs costumes paysans et cette mine dévotement fouinarde qui les caractérise ».

Un vœu semblable, exécuté encore chaque année, conduit les habitants de Montbolo à Sainte-Marie d’Arles, pour offrir aux saints Abdon et Sennen Ia Rodella de leur reconnaissance.

L’église actuelle de Fontrabiosa porte vraisemblablement la date de construction : 1712, sur le linteau du portail. Elle conserve un beau retable baroque comprenant au centre une grande toile du Christ en croix de chaque côté les statues de la Vierge et saint Sébastien, et tout en haut le Ressuscité ; cette œuvre est à rapprocher du maitre-autel de Real.

Un joli tabernacle encastré dans la muraille du sanctuaire, garde les saintes huiles (olea sacra) ; sa porte est garnie de raméaux d’oilivier, comme Il se doit.

Dans un autre registre, signalons que sur le territoire est mentionné en 1392 lo torrent de Caimpilong alias de Caganel .

Quant au nom même de Fontrabiosa (Source Rageuse), il vient très probablement, selon ce que dit Pierre Vidal, d’une source abondante qui jaillit au pied d’un rocher, immédiatement en amont du village.

En 1404, il est fait mention dans le village de Fontrabiosa d’une tour appelée La Tor del Senyor, c’est-à-dire Io capfoc .

En 1308, à l’occasion la vente de Fontrabiosa, on donne comme délimitation à ce village les territoires de Formiguera, Galba, Esposolla, Riutort, Queramat et Puigbaladós

En 1783 un lieudit porte le nom de La Fajosa (lieu planté de hêtres).

EGLISE SAINT-ROMAIN DE REAL

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Dans son diplôme de 908 en faveur de Saint-Jacques de Jocou en Rasés, le roi Charles le Simple confirme comme possession de cette abbaye l’église Saint-Romain de Real avec la petite villa de Querramat.

L’église actuelle garde sur sa face sud les classiques arcatures lombardes du xie siècle, ainsi qu’une toute petite fenêtre absidale de la même époque. Tout le reste est une transformation que le portail nous date sans doute : 1744, et qu’il attribue au maçon Bonerie.

On remarque à l’intérieur que les fonts baptismaux occupent l’emplacement de l’ancienne porte romane, dans la muraille méridionale ; que des restes de fresques médiévales décorent les parties que les transformations de l’église ont épargnées ; que le retable baroque est délabré, gardant seulement à son fronton le panneau de la Résurrection, tandis que deux de ses statues sont placées sur d’autel.

L’une de ces statues représente sainte Maximine : La tradition populaire, nous dit un ancien curé dans ses notes, fait de cette sainte une jeune ermite qui aurait vécu en odeur de sainteté en l’emplacement de l’église actuelle.

La croix en fer forgé du cimetière est digne de mention ; le maréchal y a gravé son nom. : Pierre Bucabelle, et la date de 1790.

Saint Romain n’est pas très commun en fait de titulaire d’église ; on le retrouve en Confllent, en 1375, patronnant un village disparu qu’on situe entre Toès, Fontpedrosa et Llar ; en Roussillon, en 958, patronnant également un village disparu qu’on situe au carrefour des routes de Llupià-Pontellà et Tuir-Trullars ; l’église de Càldegues, en Cerdagne, lui est toujours dédiée, et depuis 839 au moins. Ce sont les quatre seuls exemples que l’on puisse mentionner dans tout le diocèse actuel de Perpinyà.

Lorsque le portail fut fait en 1744, le menuisier tarda quelque peu à y mettre la porte, ce qui valut à celle-ci une inscription qu’on lisait encore à la fin du siècle dernier : Me deficiente non fuit raptus calix, c’est-à-dire : Malgré mon absence le calice n’a pas été volé ; c’était un hommage, opine Pierre Vidal, rendu a. la probité des habitants.

Un acte de 1516 mentionne par deux fois le ruisseau du castrum (forteresse), de Real, sous la seigneurie de Jean de Banyuls .

C’est Guillaume de Banyuls (†1481), père de ce Jean de Banyuls, qui fit l’acquisition de Real et Odello dont la seigneurie demeura dès lors dans cette maison de Banyuls jusqu’à la Révolution.

Le blason de cette famille dont le nom provient de la localité dite Banyuls dels Aspres, portait : fascé d’argent et de sable.

TOPOGRAPHIE

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En 1087, Guillaume, archidiacre, et Guillaume Udalgar font donation à Guillaume, comte de Cerdagne, de la villa de Real qui est située en comté de Cerdagne, dans l’archevêché de Narbona, dans La Montagne qu’on appelle Capcir ; en voici la délimitation : à l’est le col de Berga Stultos et de Campser, au midi Vila Nova, à l’ouest Fomiguera, et au nord Riutort et la cabane de Querramat.

Quer-Ramat (rocher en forme de branches) qui n’a laissé qu’un lieudit, comprenait en 1011 le vilar d’Odello lequel, a cette date, appartenait à l’abbaye de Cuixà.

EGLISE SAINT-MARTIN DE RIUTORT

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Dans son diplôme de 908 en faveur de Saint-Jacques de Jocou en Rasès, le roi Charles le Simple confirme comme possession de cette abbaye l’église Saint-Martin de Riutort.

L’église de Riutort reçoit une consécration en 1019. Il subsiste de cette construction l’abside entière avec ses arcatures et bandes lombardes, et avec sa fenétre murée couronnée d’un bandeau plat ; on devine sur la face méridionale une porte, surmontée également d’un bandeau plat, qui relève de la même époque.

Cette église subit des transformations en 1775. Une sacristie fut ajoutée en 1807 contre le chevet ; sa fenêtre, ornée d’un ostensoir, a servi à boucher l’ouverture malheureuse qu’elle avait provoquée. La porte actuelle est datée de 1901.

Nous ne signalerons que la statuette de saint Martin (vers 1600) placée au-dessus des fonts baptismaux, le bénitier en onyx, une croix du cimetiére aussi en onyx, et de nombreuses autres croix mortuaires en fer forgé.

Relevons aussi les lieux-dits de La Granolla, Palomeres, Queragut et Bac Estramer sur le territoire de Riutort en 1392 .

En 1560, Riutort achète une cloche pour son église à Alphonse Alos, fondeur de Perpinyà .

Riutort (ruisseau tortueux) doit son nom, bien aux sinuosités de son ruisseau, visibles en particulier à la sortie aval du village.

EGLISE SAINT-SAUVEUR DE PUIGBALADÓS

En 1192, le roi Alphonse d’Aragon nommé Pons de Lillet cheitelain du castrum (village fortifié) du Mont-Real qu’il vient de fonder le Puig-Balados pour défendre la frontière du Capcir. Ce nom de Mont-Real (Mont Royal) n’a pas subsisté longtemps ; l’ancienne appellation du terroir a vite repris le dessus, déjà en 1304. et le nom de Puig-Balados a définitivement prévalu : Puig signifie Mont, et Balados nous semble un adjectif qui doit évoquer la configuration de ce mont rappelant une bala, c’est-à-dire un ballot de tissu. Le féminin, La Baladosa, figure souvent dans la région montagneuse comme lieudit.

Il est très vraisemblable que dès 1192 une église ou une chapelle ait été édifiée pour ce village nouvellement fondé. Néanmoins elle n’est mentionnée dans les chartes qu’en 1353, date à laquelle le conseil général de la châtellenie de Puigbaladós se réunit au lieu-dit la chapelle dans le lieu de Puigbaladós.

Dédiée primitivement au Saint-Sauveur, notre église se trouve maintenant sous le patronage de saint Jean-Baptiste depuis 1823 au moins, après avoir connu saint Joseph comme titulaire en 1771 et 1810 par exemple.

Celle des origines doit dormir son dernier sommeil dans les ruines du sommet du puig ; l’actuelle porte sa date de construction : 1826, sur le claveau central du portail.

Le bénitier en granit daté de 1817 semble le frère de celui de Real.

Le reste du mobilier comporte une Vierge à l’enfant et un saint Joseph, du xviiie siècle, et plus particulièrement une Vierge romane qui gagnerait à être débarbouillée.

On garde à la sacristie des reliques de saint Firmin, martyr, enfermées dans un papier qui sent d’authentique, signé de Charles de La Cropte de Chantérac, dernier évêque d’Alet de 1763 à †1793, daté de 1767 et scellé de ses armes : d’azur 61 la bande d’or accompagnée de deux fleurs de lys du même.

Notre gravure est tirée du bréviaire d’Alet paru en 1774 et conservé dans les archives religieuses du Capcir. Une gravure semblable, plus grande, figure dans le missel d’Alet édité cette même année et présentement gardé dans la sacristie supérieure de Formiguera.

EL CABANAT

Un acte de 1760 est intitulé : « Etat des arbres qu’il faut pour la réparation de l’église et cabanat au-devant de dite église de Puyvalador » .

Ce cabanat ne peut-être que le porche, très fréquent dans le pays, sous lequel se tenaient les conseils de la population. Ce mot toutefois ne parait pas avoir été très répandu, et c’est, semble-t-il, le seul exemple qu’on puisse Citer.

Il y a un hameau appelé La Ribera en 1392 à Puigbaladós et le lieudit de Serrallonga .

LA MISSION DE 1640

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En 1640, deux Jésuites prêchèrent une mission en Capcir dont ils établirent eux-mêmes le compte rendu.

Cette relation nous apprend que la vallée de Capcir est quasi tous les jours couverte de brouillards, même au plus fort de l’été qui n’y est que comme un tiède printemps. D’où arrive qu’elle est fort incommode pour l’habitation en raison de la grande longueur et rigueur de l’hiver. D’où arrive qu’il n’y ait aucun arbre fruitier, voire ni d’autre espèce que de pins sauvages…

Ce terroir est médiocrement bon, abondant en prairies et qui fournit de grains pour entretenir une partie l’année le peuple qui arrive environ treize cents communiants partagés en cinq paroisses qui comprennent onze villages

Les deux Pères ont trouvé les églises en assez bon état bien meublées, voire de belles croix et reliquaires d’argent ; mais les esprits des peuples altiers, traitables et surtout colères et vindicatifs, chargés d’ordinaire de deux pistolets et de longs poignards, lâches pourtant et timides, et qui ne font leurs coups de vengeance qu’en trahison et par surprise on avec de grands avantages…

Pavillon, l’évêque d’Alet, profita de l’occasion pour faire sa visite pastorale qui dura plus de trois semaines. Les Pères se voyant obligés d procurer que la sortie de Monseigneur du Capcir réussit avec autant de satisfaction que l’entrée et le cours de la visite en avaient été heureux, et cet effet il était nécessaire d’assembler une fois tout le peuple de la vallée pour recevoir ses dernières recommandations avec sa bénédiction, ayant réservé tout à dessein la bénédiction et dévotion d’un saint calvaire, qu’ils avaient fait ériger au cœur de la vallée, en un lieu relevé et au plus grand passage d’icelle, en la paroisse de Formiguères… C’est là l’origine du lieudit Les Creus.

SORCIERES EN CAPCIR

Le célèbre évêque janséniste (Nicolas Pavillon) fut amené en Capcir pendant l’année 1642 par une singulière affaire. Les habitants s’étaient mis dans l’esprit que l’extrême disette où ils se trouvaient, venait des sorciers et des conjureurs. Ils envoyèrent quatre députés à un homme de Carcassonne qui passait pour bien connaitre les sorciers. Ils l’emmenèrent avec eux, moyennant la somme de cent écus qu’ils lui promirent, et lui firent visiter tous les villages du Capcir. Il trouva partout des sorcières (il n’accusait que le sexe faible, le malin !). Sur la parole de ce nouvel oracle on conduisait les accusées chez le baille de bailli), qui les mettait en prison et les faisait garder par les gens « les plus scélérats du pays ». On incarcéra ainsi trente-deux femmes. L’émotion populaire était si grande que les curés, désespérant de la calmer, en donnèrent avis à l’évêque d’Alet qui résolut aussitôt de se rendre en Capcir.

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On était au cœur de l’hiver ; la neige tombait en abondance depuis plusieurs jours ; un vent du nord-ouest, très froid et très violent, soufflait dans le pays de Sault ; les chemins étaient devenus absolument impraticables. Rien ne put arrêter l’intrépide Pavillon. Au col des Ares « à peine espérait-on tirer le saint prélat : ses deux vigoureux valets n’étaient occupés que le relever des enfoncements de neige il tombait et tout moment et à lui donner un peu de vin pour le remettre de ses fréquentes défaillances ».

Enfin Pavillon arrive chez le baille de Formiguera ; là on lui montre le fameux devin, qu’il fait mettre tout de suite sous les verrous. Le lendemain il l’interroge juridiquement, le curé de Rouze remplissant les fonctions de secrétaire. On lui amène l’une des prétendues sorcières l’imposteur est sommé de dire comment il connait que cette femme est sorcière. Il répond qu’elle a une marque a un endroit de la tête qu’il désigne ; on la rase dans cet endroit : aucune marque ne parait. Il déclare alors que la marque est à l’épaule ; le plus scrupuleux examen de l’épaule incriminée ne découvre point de marque. Alors Pavillon fut pris d’une sainte colère ; il parla avec tant de force que ce misérable, se jetant à ses pieds, lui demanda la vie et le prie de contenir les habitants qui l’auraient mis en pièces, a l’instant même, s’ils n’avaient été retenus par le respect qu’ils professaient pour leur évêque. Il convint ensuite qu’il n’avait nulle connaissance des sorciers, et, qu’étant chirurgien de son état, le peuple lui avait fait cette réputation dont il servait pour tirer de l’argent. On délivra les 32 prisonnières et notre imposteur fut consigné chez le baille. De jour, arrivait d’Olette un officier de justice avec trois archers qui se chargèrent de le faire passer aux prisons de l’Inquisition.

(D’après Pierre Vidal).

DANS LES BOIS DU ROI

(Lettre de Rolland, sous-viguier de Capcir à M. d’Arles, procureur du roi de la commission pour la réformation des domaines du Roussillon)

À Puyvalador en Capcir le 15 septembre 1730

Ayant trouvé cette commodité, j’aurai l’honneur de vous, représenter que les dégradations des bois du roi continuent de telle sorte qu’il ne sera plus nécessaire dans de temps d’y prendre garde, puisqu’on a emporté tout ce qu’il y a de et ce qu’il y a à remarquer, que toutes les communautés conservent leurs bois dont elles font une réserve. Ce qui a donné lieu à ce désordre, c’est qu’on a abusé de la permission qu’on donna à l’Intendance, il y a deux ans, de prendre du bois mort, car en prenant l’un, l’on a pris aussi le vivant ; et pour que vous soyez plus an fait afin d’y porter le remède convenable avec M. le Commissaire, je vous ferai un en peu de mots de ce que les communautés font :

  1. Fontrabiosa qui a un bois superbe d’un bon quart de lieue, avec Espousouille, sa dépendance, ne restent pas pour cela d’aller tous les jours aux bois du roi.

  2. Riutort, qui est la communauté qui fait le plus de dégât avec Fontrabiosa, ont entièrement coupé le Bois Noir appelait, quoiqu’elle ait un grand bois qu’on réserve avec des peines qui ont été imposées contre ceux qui en couperaient, en sorte qu’on ne touche point, et à on faisait une estimation la dégradation que Fontrabiosa a faite avec Riutort, ils y seraient pour huit à dix mille livres.

  3. Real garde sont bois, et prend tout le chauffage de la Come de Portells, bois du roi.

  4. Matamala a un bois des plus beaux et de haute futaie qui tire demi-lieue et auquel on ne me touche point.

  5. Les Angles a plus de bois que deux des autres communautés, cependant ils vont aux bois du roi. ’

  6. Formiguères a un joli de demi-lieue, mais cela n’empêche pas qu’ils n’aillent aux bois du roi, quoique moins fréquemment que les autres communautés.

  7. Quant au bois de la Mate qu’on devrait garder comme une trouvaille, et duquel on ne saurait se passer pour la forteresse de Villefranche et du Mont-Louis, et pour un incendie qui peut arriver au pays, Il va dépérir, car depuis deux ans on a coupé six à sept cents arbres, et fait dix-huit-cents charges de planche, suivant un état que l’ancien baille de Matemale m’a fait voir. On ne saurait alléguer pour excuse que le Mont-Louis ou les entrepreneurs aient fait ce dégât, car je ne crois pas qu’ils en aient pris, et par ordre de l’Intendance, 50 ou 60 arbres ; et si on n’y remédie bientôt, ces abus augmenteront au lieu de diminuer ; et quoique M. Bordes, viguier du Conflent, soit venu en Capcir par ordre de l’Intendance, il y a deux mois, et qu’il ait saisi beaucoup de planches, on ne reste pas pour cela de continuer les dégradations de ce bois ; car si on faisait aujourd’hui une visite tau lieu des Angles, on trouverait plus de cent pièces de bois de toute espèce dans les rues et basses-cours, et plus de 300 cordes de bois pour le chauffage ; le tout procède du bois de la Mate, ce qui mérite attention.

  8. J’ai cru devoir vous détailler toutes ces circonstances afin que M. le commissaire et vous, Monsieur, y donniez vos attentions ; je me flatte que si les puissances en connaissaient les conséquences, qu’on donnerait des ordres vigoureux pour la conservation de ces bois ; je dis ce que je pense, et je crois que les personnes connaisseuses en diraient de même…

FONTRABIOUSE EN CAPCIR

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Son ancienne carrière d’onyx ; sa grotte

Situé au sud du village, aux abords du massif boisé, un filon d’onyx a été exploité dans les années 1925, pendant une dizaine d’années. Des travailleurs émigrés, italiens principalement, composaient le personnel de cette entreprise.

Ce marbre fut débité longtemps à la main. La technique du fil fut pratique par la suite.

L’onyx était expédié assez loin. Les principaux acheteurs étaient la Belgique et la Suisse.

À Perpignan nous pouvons admirer le placage de l’escalier d’honneur du Palais Consulaire construit en 1932, qui est fait de plaques d’onyx extraites de la carrière de Fontrabiouse qui furent traitées et polies en atelier spécialisé à Péronne dans la Somme.

Il semble que les difficultés de transport soient cause principale de l’interruption de l’exploitation de cette carrière. Le petit train jaune aurait peut-être apporté une solution, si le projet de faire passer a Fontrabiouse une ligne en direction d’Escouloubre les Bains par la vallée de l’Aude, à l’époque station thermale très fréquentée, s’était réalisée. Mais ce sympathique petit train jaune n’est jamais venu en Capcir. Nous le regrettons ’encore…

Une autre carrière fut ouverte dans le massif calcaire un peu en dessous de l’ancienne pour tirer de la pierre pour la réfection des routes et la construction du barrage de Matemale.

C’est durant cette exploitation qu’en 1962, à la suite d’un tir de mines, un trou béant apparut aux ouvriers carriers étonnés ; une profonde galerie fossile de rivière souterraine était découverte.

La curiosité fit rentrer peut-être imprudemment les gens du village les plus hardis. L’émerveillement était grand : la pureté des concrétions du plafond, des parois ; le sol scintillant de coulées pailletées ; de petites vasques d’eau pure et bleutée donnant à la lueur de l’éclairage de fortune de ces premiers explorateurs, des reflets de ce monde fascinant, pour certains angoissant de silence et de majesté.

Le travail sérieux de prospection et de topographie fut confié au seul club de la région, à l’époque L’Entente Spéléologique du Roussillon, à Perpignan.

Plusieurs kilomètres de galeries furent ainsi répertoriés. La rivière qui résurge aux abords du village fut remontée sur 2,500 km.

Depuis 1 an un groupe de spéléologues s’est organisé dans le village ; des Spéléologues de tous azimuts participent la continuelle exploration de cette magnifique qui développe actuellement environ 8km de méandres. Ils sont peu nombreux, sans grands moyens, mais fervents.

Leur but faire un jour la jonction résurgence perte (du clos del bidet), lieu connu un ruisseau de montagne se perd dans le massif ; l’eau fut teintée et la coloration est apparue à la fontaine du village.

Le nom de Fontrabiouse qui signifie « Fontaine rageuse » aurait été donné au village à cause de cette résurgence à débit variable, mais ceci étant un phénomène saisonnier. Une idée est venue à un des spéléos qui connait le mieux cette grotte, lorsqu’il remarqua à 800 mètres dans le réseau, un éboulement d’une dizaine de mètres ouvrant une grande salle supérieure empreinte de marques de remplissage d’eau.

…Un lac se serait un beau jour brutalement déversé dans la rivière souterraine ; imaginez des centaines de mètres cubes d’eau résurgeant d’un seul coup les témoins, s’il y en eut, durent évidemment trouver cette fontaine rageuse

Cette grotte en cours d’aménagement, livrera prochainement ces merveilles aux touristes.

Moïse DEVENDEVILLE,

Président de l’A.E.G.F.

A.E.G.F. : Association pour l’Exploration de {la Grotte de Fontrabiouse.

LES BARRAGES

Le barrage de Matamala construit dans les années 70 est situé à 1.200 m en amont du village dont il porte le nom ; il accumule les eaux de la haute vallée de l’Aude.

Le remplissage du réservoir est complété par la dérivation de la Lladura, affluent de la rive gauche.

Cette réserve, s’ajoutant à celle de Puigbaladós, permet la régularisation de la chaine d’usines : Carcanet-Escouloubre-Nentilla.

Quant au barrage de Puigbaladós, il fut mis en service en 1932.

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Revue « CONFLENT » Rédaction - Administration « Les Castors » 66500 PRADES


Cet ouvrage est sorti des presses de L’IMPRIMERIE DU CAPCIR Rue Léon-Brousse

PERPIGNAN Tel. 50.35.25


(Toutes les photographies sont de Bernard PLANAS, de Villefranche)