Nous savons :
que Auguste qui a 74 ans est retraité et habite la maison de la rue Saint-Sauveur ;
que Philippe qui a 28 ans habite chez ses parents et exploite avec son frère Émile une maison de commerce dans laquelle il a mis un capital de 50 000 francs et dont il a liquidé l’année précédente pour 38 000 francs de bénéfices ;
que Pierrine de son côté apporte 104 000 francs composée de 25 000 francs pour sa moitié de la ferme de Lafrenaye et 79 000 francs pour la succession de son père. Sa mère gardant un usufruit, elle n’en touche que 60 000 francs dont son mari est tenu d’en faire le réemploi sous 8 mois sous forme d’immeubles.
Du 8 août 1854
Mariage entre Monsieur Espinasse et Mademoiselle Héron
Napoléon, par la grâce de Dieu et la volonté nationale, empereur des Français, à tous présents et à venir, salut…
Ont été présents
MM. Philippe, Jean, Jules Espinasse, négociant né à Toulouse, où il demeure, Faubourg Saint-Etienne, rue Saint-Sauveur, n° 2, fils légitime et majeur de M. Jacques Auguste Espinasse, ancien négociant et de Mme Marie Antoinette Mayran.
Contractant en présence, de l’avis et consentement de son père tout comme avec l’agrément de sa mère, domiciliés et demeurant à Toulouse, susdite rue Saint-Sauveur.
d’une part
et demoiselle Pierrine Marie Baptistine Héron, demeurant aussi à Toulouse avec sa mère, rue Sainte Ursule n° 11, native de Rouen (Seine inférieure), fille légitime et majeure de feu M. Pierre François Héron, négociant et de sa veuve, dame Marie Rosalie Eugénie Graffin, épouse en secondes noces de monsieur Guilhaume Prosper Héron, négociant à Toulouse.
Contractant en présence, de l’avis et consentement de madame sa mère, celle-ci, pour ce assistée et spécialement autorisée, dudit M. Guilhaume Prosper Héron, son nouvel époux.
D’autre part, entre lesquelles parties ont été faits et arrêtés par les articles suivants, les accords et conventions du mariage qui va unir M. Espinasse fils et mademoiselle Pierrine Marie Baptistine Héron.
--- Article 1er
Les futurs époux adoptent pour loi de leur union le régime dotal, auquel ils se soumettent sauf les modifications ci-après.
--- Article 2
Il y aura entre les futurs époux, nonobstant leur soumission au régime dotal, une société d’acquêt telle qu’elle est permise par l’article 1581 du code Napoléon.
--- Article 3
Monsieur Espinasse, futur époux, apporte en mariage, mais à titre de bien propre, expressément exclu de la société d’acquêts, un actif net de 98 380 francs
en capitaux numéraire, marchandises, effets et créances de commerce actif lui provenant dans la proportion, savoir :
de 50 000 francs pour sa mise de fonds dans la maison de commerce Espinasse fils de l’ainé, établie à Toulouse ;
de 38 393 francs pour les montant des bénéfices liquidés au trente et un décembre 1 ;
Sommes égales à 98 392 francs.
Selon que le tout se trouve établi, constaté et réglé au compte du futur époux sur les registres de ladite maison de commerce ; et selon d’ailleurs qu’il en a été justifié à la future épouse et à madame sa mère, qui reconnaissent très exact en son entier le dit actif.
--- Article 4
Mademoiselle Héron, future épouse, se constitue en dot, tous ses biens présents et à venir, sous la seule exception, ci-après :
Il est reconnu que ses biens présents, consistent, savoir :
En la moitié de deux rentes sur l’état, 4 ½ % consolidés, inscrites au Grand livre de la dette publique, l’une de 77 francs sous le numéro… et l’autre de 9 francs sous le numéro… Lesquelles deux parts de rente sont exceptées de la présente constitution dotale, étant expressément réservées à titre de bien libre et paraphernal à la future épouse pour qu’elle en dispose à son gré.
En une somme de 1 038 francs, fruit de ses économies qu’elle a placé, savoir : 701 francs dans la maison de commerce Héron et Cie de Toulouse et 337 francs dans la maison de commerce Alexandre Héron de Bordeaux ; laquelle somme totale est également réservée comme bien libre et paraphernal, et conséquemment exceptée de ladite constitution dotale.
En tous ses droits successifs paternels se portant à une valeur totale de 102 998 francs, composée :
de la moitié d’une ferme, située dans la commune de Lafrenaye (Seine Inférieure) d’une valeur de 49 630 francs des dits droits successifs paternels, moitié qui s’élève à 24 815 francs.
de la somme de 4 750 francs lui provenant du remboursement qui lui en a été fait par un acte au rapport de Me Belin, notaire à Rouen, sous sa date, enregistré, comme formant la moitié des 9 500 francs qui lui étaient dus, ainsi qu’il est établi par un acte public retenu par Me Gueswillers du 20 juillet 1842.
de la moitié d’un capital de 146 866 francs, montant total des diverses recettes faites par Mme Héron, en sa qualité de tutrice, et par M. Héron, son nouvel époux, comme cotuteur solidaire de Mlle Héron, future épouse et de Mme Marie Françoise Eugénie Héron, sa sœur, épouse de M. Jean Prosper Héron, négociant, demeurant à Toulouse ; moitié 73 433 francs.
Somme égale à la valeur totale de 102 998 francs des dits droits successifs paternels, 102 198 francs.
--- Article 5
Il sera payé en numéraire au futur époux, avec intérêt au taux légal de 5 %, à compter de ce jour par Mme Héron, mère de la future épouse et par M. Héron son cotuteur, la somme de 52 250 francs, qui sera prise sur le montant des recettes ci-dessus signalées dans leur gestion de tutelle commune.
Il sera également payé en même espèces au futur époux, avec intérêts au taux légal de 5 %, à partir de ce jour, par Melle Héron, future épouse, la somme de 4 759 francs produit de la recette signalée au paragraphe 2 de l’article 4 ci-dessus.
Ces deux sommes fourniront un total de 60 000 francs.
Il est à remarquer que c’est tout ce que la future épouse peut exiger maintenant de ses droits successifs paternels ; tout le surplus de ces droits étant soumis à l’usufruit viager de madame sa mère, en vertu du premier contrat de mariage de cette dernière avec M. Pierre François Héron, passé le 13 août 1830 devant le dit Me Gueswillers et son collègue, usufruit dont Mme Héron fait de plus fort une réserve expresse.
En recevant cette somme de 60 000 francs actuellement exigible, le futur époux sera tenu d’en faire emploi dans le délai de 8 mois à partir du jour du mariage en acquisition d’un ou de plusieurs immeubles payés à leur valeur et dégagés de tous privilèges et hypothèques ; immeubles qui devront être à la convenance de la futures épouse, et conserveront sur sa tête leur caractère de dotalité.
Il sera fait pareil emplois et remplois immobilier de toutes les sommes et valeurs mobilières et immobilières provenant de ce qui doit revenir encore à la future épouse de tous ses droits successifs paternels après le décès de madame sa mère.
--- Article 6
Le futur époux recevra aussi toutes les autres sommes et valeurs mobilières provenant des biens présents et à venir de la future épouse, mais à sa charge par lui d’en faire emploi, soit en acquisitions immobilières soit en placement par contrats à intérêts sur bons privilèges ou hypothèques ; quant aux dites sommes et valeurs mobilières seulement ; le tout avec l’agrément de la future épouse.
Dans aucun cas et sous aucun prétexte aucune des dites sommes et valeurs mobilières ne pourra être dispensée de l’emploi convenu.
--- Article 7
À quelque époque que ce soit du mariage, tous les immeubles dotaux présents et à venir de la future épouse seront indéfiniment aliénables par ventes ou échanges avec son consentement sans aucune formalité de justice, mais toujours à la charge de remploi immobilier agréé par elle.
La surveillance des emplois et remplois appartiennent exclusivement aux futurs époux.
Et les remplois une fois accomplis, les acquéreurs des biens dotaux seront déchargés de toute responsabilité.
--- Article 8
Tous les emplois et remplois ci-dessus prescrits cesseront d’être obligatoires lorsque le futur époux pourra utilement reconnaître sur des immeubles lui appartenant une pleine propriété et jouissance, et libre de tous privilèges et hypothèques, les sommes et valeurs mobilières et immobilières dont il devrait être fait emploi et remploi, pourvu néanmoins que la valeur des dits immeubles excède au moins d’un quart les dits sommes et valeurs dotales.
--- Article 9
Il sera libre à la future épouse, à quelque époque que ce soit du mariage, d’exiger et toucher sur ses seules quittances, le tiers des revenus de tous ses biens dotaux généralement quelconques, pour son entretien et ses besoins personnels.
Mais faute par elle d’exercer cette faculté tous les ans, elle ne pourra rien exiger sur les revenus antérieurs au jour de sa demande.
--- Article 10
Le survivant des futures époux prendra par préciput conventionnel, et avant tout partage, sur les biens de la société d’acquêts une somme de 5 000 francs en meubles à son choix, sur la prisée de l’inventaire, et sans crue, ou bien cette somme en deniers comptants, comme bon lui semblera.
Et si c’est la future épouse qui survit, elle prendra en outre au même titre de préciput : 1° sa chambre garnie convenablement et son lit en essence et 2° ses dentelles, bagues, bijoux, joyaux et généralement tout ce qui servira à ses parures, linge, vestiaire et garde-robe, ou bien en numéraire, leur valeur constatée par la prisée de l’inventaire, aussi à son choix.
La future épouse aura droits aux avantages qui viennent d’être stipulés en sa faveur, même en renonçant à la société d’acquêts.
--- Article 11
Conformément à la stipulation permise par l’article 1525 du code Napoléon, le survivant des futurs époux aura sa vie durant l’usufruit et jouissance de la totalité des biens de la société d’acquêts ci-dessus constatée, sans être tenu de fournir caution.
Mais dans le cas où le survivant des futurs époux convolerait en secondes noces, et où il existerait un ou plusieurs enfants de son premier mariage, il serait alors tenu de fournir caution pour toutes les sommes et valeurs mobilières dont il aurait l’usufruit.
--- Article 12
En signe de leur affection mutuelle, sur l’avis et conseil de leurs parents respectifs, les futurs époux ont réglé leurs gains de survie de la manière suivante.
Si elle survit au futur époux, la future épouse aura sa vie durant l’usufruit et jouissance de l’universalité des biens qui composeront la succession du futur époux.
Si c’est au contraire le future épouse qui décède la première, le futur époux jouira pendant toute sa vie de l’entière constitution dotale et généralement de tout ce que la future épouse laissera à son décès.
Le tout sans dérogation aucune à l’article 11 qui précède, lequel sera exécuté selon sa forme et teneur.
Les futurs époux seront tenus de fournir caution pour l’usufruit présentement donné, sans contrôle de la part des héritiers ou successeurs collatéraux des futurs époux, contrôle qui leur est expressément inhibé.
Mais en cas d’existence d’un ou plusieurs enfants de leur mariage à l’époque de sa dissolution, l’usufruit dont ils viennent de se gratifier serait réduit à la moitié, ce toujours à la charge par le survivant de donner caution, ou de faire emploi valide quant aux sommes et valeurs mobilières qui entreraient dans son usufruit.
Telles sont les conventions que les parties ont arrêtées et respectivement acceptées, après avoir entendu la lecture qui leur a été faite par Me Lansac, l’un des notaires, de chacun des derniers alinéas des articles 1291 et 1394 du code Napoléon.
Dont acte – Fait en double minute pour l’une rester au pouvoir de Mme Dondet et l’autre à la garde de Mme Lansac à Toulouse, en la demeure de M. et Mme Héron, rue Sainte Ursule, n° 11
L’an 1854 et le 8 août.
Le tout en présence de monsieur Émile Espinasse, Paul Espinasse, frères du futur époux, de Mme Despaignol, née Espinasse, sa sœur et de monsieur Despaignol son beau-frère.
Mme Eugénie Héron, sœur de la future épouse, de monsieur Prosper Héron, son cousin et beau-frère, de monsieur Alexandre Héron son oncle, de Mme Gautier, sa tante maternelle, de mademoiselle Gautier sa cousine, de mademoiselle Séguin, sa cousine, de Mme Seyrolles, née Héron, sa cousine, de monsieur Seyrolles et monsieur Léonce Seyrolles.
Tous les comparants et assistants soussignés avec les notaires après lecture.
Enregistré à Toulouse, le 16 août 1854…
En foi de quoi, les présentes ont été scellées et délivrées pour première Grosse à monsieur Espinasse.
Versement de 9 000 francs sur la part d’héritage de Pierrine
L’an 1865 et le 25 juillet à Toulouse.
Par devant Jean Jacques Lansac et son collègue, notaires à la résidence de Toulouse, soussignés.
Ont comparu
Monsieur Philippe Jean Jules Espinasse, négociant et dame Pierrine Marie Baptistine Héron, son épouse, demeurant ensemble à Toulouse.
Monsieur Espinasse, agissant au présent, tant de son chef personnel, comme administrateur des biens dotaux de cette dernière, aux termes de leur contrat de mariage, reçu par Me Lansac et Me Fourtanier, substituant Me Daudet, notaire à Toulouse, le 8 août 1854 que pour l’autorisation de cette dernière.
Lesquels reconnaissent et déclarent avoir à l’instant reçu.
De Mme Marie Rosalie Eugénie Graffin et de Monsieur Guillaume Prosper Héron, propriétaire négociant, son mari, qui l’assiste et l’autorise, tous demeurant à Toulouse à ce présents et délivrant.
La somme de 9 000 francs en numéraire que M. et Mme Espinasse, ont prise, vérifiée, retirée à la vue des notaires soussignés, à valoir et imputer sur celle de 12 000 francs leur restant encore sur celle de 60 000 francs encore exigible et grevée de la totalité dont M. et Mme Héron sont comptables vis-à-vis de Mme Espinasse, ainsi qu’il résulte du contrat de mariage plus haut ramené.
Aux termes de ce même contrat, cette somme de 9 000 francs doit être l’objet d’un remploi en acquisition d’immeubles payés à leur valeur et dégagés de tous privilèges et hypothèques, immeubles devront être, à leur convenance de Mme Espinasse et conserveront sur sa tête leur caractère de dotalité.
Pour effectuer ce remploi, M. et Mme Espinasse comparants, ont acquis de monsieur Jean Joseph Noël Bonnal, architecte, demeurant à Toulouse, un bâtiment à rez-de-chaussée, situé à Toulouse, rue Delpech faisant partie à l’aspect du levant de la maison de monsieur Bonnal, sise au dit lieu, rue du Rempart Saint-Etienne, n° 14 et dans le côté midi donne sur ladite rue Delpech suivant acte reçu par Me Lonsac l’un des notaires soussignés le 18 janvier 1865, transcrit le 1er février suivant…
Cette réquisition a été faite avec mention du remploi de la dotalité dont le dit immeuble devait être grevé à l’avenir et pour exécuter les obligations contractées dans le dit acte d’acquisition, M. et Mme Espinasse, vont employer ladite somme de 9 000 francs, ainsi qu’ils s’y obligent de plus fort à payer le prix du dit immeuble avec déclaration de l’origine des deniers, pour que M. et Mme Héron soient définitivement libérés et affranchis de toute responsabilité.
En conséquence M. et Mme Espinasse, déclarent leur fournir quittance de cette somme de 9 000 francs et se désistent dans la même proportion de tous les droits et actions qui peuvent résulter à leur profit du dit contrat de mariage ainsi que de l’utilité de toute inscription d’hypothèque, sous quelque ligne, date, volume ou numéro et à quelque bureau qu’elle puisse avoir été prise.
Et de tout ce qui précède, il a été requis acte concédé aux parties qui ont signé avec nous.
Signé à la minute.
Enregistré à Toulouse, le 28 juillet 1865