Correspondance d'une vie Création janvier 2013

Toulouse le 29 décembre 1885

Ma bien chère Maman

J’aurais bien voulu quitter la glaciale ville de Toulouse pour aller à Narbonne te sauter au cou et te dire combien je t’aime et combien je désire que tu conserves ta bonne santé. Le premier jour de l’an ravive en moi les plus doux souvenirs du passé. Je me rappelle quand j’étais tout enfant, les petits compliments naïfs que je vous faisais ce jour-là, à toi et au pauvre papa, dans le petit salon, compliments qui me valaient tant de baisers de vous et aussi de la pauvre mamette.

C’était le jour des cadeaux, des joujoux, des bonbons, plus tard au collège et au lycée, c’était le jour des vacances si impatiemment attendues. Il faisait si froid aux salles d’études et dans les classes, et l’on était si heureux de songer au coin du feu de la maison. C’est en me rappelant le passé que je me rends compte de tout ce que je dois à votre bonté et aux conseils que le pauvre papa m’envoyait dans toutes ses lettres. Il eut la bonne idée de les conserver ; alors je n’y attachais que peu de prix et aujourd’hui je les relis les larmes aux yeux car ce qu’elles contiennent fait revivre un moment le temps passé.

Combien je me reprocherais aujourd’hui de vous avoir rendus malheureux et combien je suis heureux en rÉlisant ces lettres de voir que je ne vous y annonçais toujours que de bonnes nouvelles. Je ne changerais pas ma profession pour une autre et c’est à vous que je le dois. Je ne donnerais pas pour tout un monde l’instruction que vous m’avez donnée les moyens d’acquérir et qui me permet de passer des moments délicieux dans l’étude de travaux dont tant de gens ne comprendront jamais l’attrait. Malgré leur or et leur… je suis bien loin d’envier le sort des hommes d’affaires, des commerçants dont la vie n’est remplie que de banalités et dont le seul mobile est l’intérêt. Aussi je vous en remercie du fond du cœur et toute ma vie je conserverais le souvenir de vos bontés et des sacrifices que vous vous êtes imposés pour nous élever et nous donner un rang des plus honorables dans la société ; aussi ma chère maman, bonne année, bonne santé et que Dieu te donne de longs et heureux jours et nous permette de te donner encore de nombreuses satisfactions. Je t’embrasse bien tendrement, ton fils qui t’aime bien.

Jules Paloque

Je viendrais au plus tard pour le carnaval et je vais prévenir mon capitaine que je compte demander 8 jours de permission à Pâques et que je serais très heureux qu’il ne prit pas de permission à cette époque.

Vendredi 5 mai 1880

Ma bien chère Maman

Transcription Lucie Paloque.

Je suis revenu de Champs dimanche. Le temps y a été très mauvais malgré cela j’ai fait mon travail complètement quoique la pluie et un grand froid le rendissent très pénible.

J’étais tout seul à Champs mais j’y ai fait des connaissances. Entre autres un médecin de Paris, dont le père possède un château à Champs. Ce monsieur a été charmant avec moi, et j’ai été invité à dîner au château. Après le dîner qui avait été charmant le maître de la maison m’a dit que dorénavant mon couvert serait mis tous les jours mais je n’ai pas voulu abuser de son amabilité, et je me suis contenté de lui faire des visites sans accepter le repas.

J’étais logé dans une petite chambre toute neuve et très propre, et je prenais un repas avec un jeune chef de gare charmant. Champs est un très joli village sur l’Yonne avec beaucoup de maisons de plaisances et de jolis points de vue. Aussi j’avais emporté avec moi mes appareils photographiques et malgré le mauvais temps j’ai pu prendre quelques vues.

Je suis allé passer hier la journée dans la petite maison de campagne d’Alphonse à La Varenne. Elle est assez agréable et si Alphonse se décide à y aller passer tous ses dimanches ce sera une économie, car la location est de 800 Fr. par an, c’est-à-dire 400 fr pour chaque famille.

Ils ont une jolie chambre pour eux, une salle à manger commune et 4 autres chambres pour la famille Lazarus, le tout au rez-de-chaussée. En haut un grenier et une chambre pour les bonnes, et dans le sous-sol les cuisines. Le jardin est assez grand avec des pelouses, un puits et une pompe, des tonnelles pour dîner en plein air avec des escaliers qui les font communiquer à la cuisine. Ils sont engagés pour trois ans. Depuis mon arrivée je tire le canon tous les jours. Les écoles à feu dureront jusqu’à la fin du mois et ce n’est qu’au commencement du mois de juin que je pourrais demander un congé pour aller au ministère. Je t’écrirais immédiatement après ma démarche. Je vais d’ailleurs écrire ces jours-ci à Léon.

Adieu, ma bien chère Maman, je t’embrasse de tout mon cœur ainsi qu’Aimé, Blanche, Albert et les enfants. Ton fils qui t’aime bien

Jules Paloque

Toulouse le 14 août 1886

Ma bien chère maman

La fête de la pauvre mamette me porte bonheur ; je n’ai le temps que de te dire quelques mots mais chacun est une importante nouvelle. Première nouvelle : mes pelotons se sont présentés à toutes les instructions d’une façon merveilleuse. Le général Dejeau m’a fait de grands éloges devant tous les officiers réunis dont la plupart se mordaient les lèvres. Le général laissera pour moi un ordre de félicitation. Deuxième nouvelle : ma permission de 30 jours est accordée et j’irais te sauter au coup à la fin du mois. Troisième nouvelle : mon ami… aide de camps du général Nismes directeur de l’artillerie au ministre de la guerre, m’écrit de la part du général, que l’on prépare au ministère une grande promotion de capitaine, dont je ferais partie. D’ici à 20 jours je serais capitaine. Je voudrais bien être nommé à Toulouse ou au moins dans un poste que je demande. Adieu ma bien chère maman, j’ai mille courses à faire et suis obligé d’être concis. Je t’envoie mille et mille baisers. Ton fils qui t’aime bien.

Jules Paloque

Narbonne le 15 janvier 1887

Mon cher Jules

Je t’envoie en même temps que cette lettre un gilet de flanelle par la poste, quand l’autre sera prêt je te l’enverrais de même. Je me porte bien mais ce temps froid me fatigue un peu surtout le matin quand je me lève je suis engourdie et j’ai froid. Ce n’est que quand j’ai déjeuné et que je me suis réchauffée un peu que j’ai un peu plus de courage. Je dors bien et j’ai bon appétit. Le mariage de mademoiselle… a été très brillant. Le dîner a été somptueux, c’est le maître d’hôtel du Progrès à Toulouse ou va toujours la famille… qui a fait ce dîner, Aimé qui vint le dimanche m’a dit que ce dîner devait coûter bien cher, on l’avait commandé pour 60 personnes.

Il y était 50 demi-douzaines d’huîtres, toutes sortes de gibier, deux saumons magnifiques etc. etc. rien n’a manqué, si cette demoiselle avait été millionnaire on n’aurait pas mieux fait, les nouveaux mariés partirent dimanche après leur dîner pour Marseille. Ils sont revenus de leur voyage et sont rentrés à maisons. Albert était avec moi depuis dimanche est aller les rejoindre hier au soir, Berthe est restée à maisons, doivent la prendre jusqu’à Capendu où elle va passer quelques jours avec les parents de Douzens, je ne comprends pas Aimé et Blanche d’avoir laissé Berthe chez les…, à Douzens en ce moment ils sont bien triste à la veille de la fête de Douzens. Théodorina est bien occupée et la tante ne peut pas marcher à cause de ses douleurs, malgré que Berthe ne soit pas un étranger, elle causera un peu d’embarras. Enfin c’est comme cela. Alias ton ami vient d’être nommé contrôleur à Montpellier, il est bien content. Aimé fit le bout en train à la soirée, il fit tout ce qu’il put pour amuser la société, il dansa, il chanta et fit chanter. Berthe tenait le piano avec mademoiselle Montague. Quand Aimé arriva à Narbonne il avait une fluxion, il partit à…h du soir, assez fatigué. Angèle me porta une boite de dragée pour toi. Tu me dis que tu as bien pataugé dans la neige. Je pense que tu prends des précautions pour ne pas prendre mal. Soigne-toi bien mon cher Jules pour ne pas être malade avec le temps humide et froid, il faut se tenir sur ses gardes.

Je t’embrasse mille fois, ta mère qui t’aime bien.

Pauline Paloque

Albert a fait l’inventaire de l’année 1986. La maison a rapporté 10 872, ; dépenses 1 713, ; revenu net 9 158, ; ce qui vient à chacun d’entre vous 1 145 Fr.

Narbonne le 1er janvier 1897

Mon bien cher Jules

La dépêche de Thérèse m’annonçant la bonne nouvelle que tu viens d’être nommé chevalier de la légion d’honneur, me comble de joie, et j’en suis bien heureuse. Ce grand honneur que tu reçois, tu ne le dois pas à la faveur mais à ton mérite, par tes bonnes notes et tes grands travaux de toutes sortes, depuis ta sortie de l’école de Fontainebleau qui t’a fait remarquer par plusieurs généraux et principalement le pauvre général Dejean qui fût si bon pour toi et qui sut t’apprécier. Cette promotion fera des jaloux, mais tout de même ils comprendront que tu le mérites.

Mon cher Jules, je suis bien heureuse de cette citation et je suis avec toi et notre cher Thérèse pour vous envoyer mes bons souhaits de bonne année, que Dieu vous donne la santé et conserve à votre amour vos chers petits chérubins. Je vous adresse mes meilleurs vœux pour la continuation de votre bonheur et de ton élévation. Votre mère qui vous aime de tout son cœur

Ma bien chère Thérèse

Merci de tes bons souhaits de bonne année que tu m’adresses à l’occasion du nouvel an. Tu es si bonne et si aimable pour moi que je t’aime comme si tu étais ma fille et te fais mille souhaits de bonne année pour ta santé et celle de ta petite famille et la continuation de votre bonheur. Je voudrais bien ma chère Thérèse assister avec toi à la revue où notre Jules sera décoré mais mon infirmité m’empêche de voyager ce que je regrette beaucoup dans cette circonstances. Ton papa est venu me voir la semaine dernière, il ne manque pas quand il vient à Narbonne de venir me voir, ses visites me font bien plaisir, il se porte très bien et me donna de bonnes nouvelles de toute sa famille.

Ce matin Aimé m’a dit tu as une lettre dans la boite, pense si j’ai été surprise quand j’ai déplié cette lettre, et que j’ai vu que c’était mes petits chéris Georges et Émile qui me souhaitaient la bonne année. Tu ne saurais croire ma chère Thérèse du plaisir que j’ai eu en lisant ces deux petites lettres remplies de tendresse de mes chers mignons. Que j’aurais voulu les avoir en ce moment auprès de moi ces chéris pour les manger de baisers. Je les remercie bien de cette attention pour moi et leur souhaite pour cette année d’être bien sage et bien écouter papa et maman.

Pauline Paloque

Narbonne le 5 décembre 1898

Mon bien cher Jules

La bonne nouvelle que tu m’annonces que tu es classé avec le numéro 8 me comble de joie et de bonheur. Je te félicite de ce grand succès que tu mérites sur tous les rapports. Comme tu me le dis, cette bonne nouvelle produira je l’espère une heureuse diversion pour notre chère Thérèse qui vient de subir un si grand chagrin, je la remercie de sa lettre si affectueuse.

Mon cher Jules après une année d’ennui, te voilà débarrassé de toutes préoccupations, ce qui te fera grand bien pour ta santé et ta tranquillité. Encore dieu voudra peut-être que je te vois chef d’escadron. Tu as raison de penser que c’est le général Nismes qui t’a donné un bon coup de main, pauvre général Dejean qui te protégeait et qui te fit tant de bien.

C’est toujours par la bonne porte que tu entreras, ce sera toujours par les généraux qui connaîtront ta valeur, ne te fie jamais à ceux qui se disent tes amis, qui au contraire ne sont que des jaloux.

Adieu mon cher Jules, je t’envoie mille tendres baisers ainsi qu’à notre chère Thérèse et nos petits chéris Georges et Émile. Votre mère bien heureuse qui vous aime de tout son cœur.

Pauline Paloque

Narbonne 15 octobre 1900

Mon cher Jules

J’ai été bien heureuse de te voir et de t’embrasser et de causer de tant de choses, tu m’as fait une visite au galop, ce qui ait très fatiguant pour toi. Je t’en remercie beaucoup. J’adresse à notre chère Thérèse à l’occasion de sa fête mille vœux de bonheur et de santé.

Henry partit lundi soir pour Marseille Toulon se rendant dans un village chez des amis, Élisa est partie samedi, Henry devait la rejoindre à Tarascon et ils devaient se rendre ensemble à Vienne où Berthe et René les attendaient. Ils devaient rentrer à Annecy hier dimanche.

Élisa se porte très bien, elle a mis de l’embonpoint qui lui va bien, elle est restée presque toujours avec moi à causer, elle s’est bien promenée avec Blanche, Jeanne et Adrienne enfin. Elle n’a pas perdu un moment, aussi elle est partie de Narbonne très satisfait. Aux fêtes de Pâques j’aurais le bonheur s’il plait à Dieu de vous revoir, il me tarde bien d’embrasser notre chère Thérèse et nos chéris Georges et Émile.

Ne te donne pas tant de soucis pour ce qui se passera en fait d’avancement, ce ministre ne sera pas toujours, tu es un officier de mérite, tous tes chefs te connaissent, tu n’a rien à te reprocher, advienne que pourra ! Je te recommande de ne pas te laisser abattre mon cher Jules sois énergique comme moi, regarde en dessous, les officiers tes camarades qui sont bien plus frappés que toi, Aimé dit que ce décret ne te concerne pas, que tu pourrais être retardé au mois d’avril au plus tard, dans tous les cas ne te fait pas de la bile.

Quand tu verras Albert, Angèle, Antoine et Jean tu les embrasseras bien forts pour moi, je souhaite à mon cher Antoine qu’il réussisse à son examen. Il doit travailler sérieusement pour réussir, tu me diras si Angèle est bien portante. Blanche souffre ces jours-ci de la tête, Paul est venu hier, je le trouve un peu mal, il va prendre un mois de congés. Adieu mon cher Jules, je t’embrasse bien tendrement ainsi que Thérèse et nos chéris Georges et Émile, votre mère qui vous aime de tout son cœur.

Pauline Paloque

Je vais bien malgré que je sens que je deviens très faible, l’appétit est assez bon, et je me trouve bien dans mon lit.

Narbonne 6 novembre 1900

Mon bien cher Jules

La bien heureuse dépêche que m’envoya ma chère Thérèse que tu étais nommé commandant me combla de joie et de bonheur, je reçois ta bonne lettre à l’instant, que j’ai lu avec un grand plaisir tous les détails qu’il me tarde de connaître, je m’attendais à ta nomination, Aimé me tenait au courant, malgré cela on n’est jamais sur. Aussi quand j’ai reçu votre dépêche pense si j’ai été heureuse, et qu’on te laissa à Versailles à la même condition.

Je voudrais bien être en ce moment auprès de vous pour vous féliciter de tout mon cœur et vous embrasser mille et mille fois, tu dois être bien fier mon cher Jules de tous les honneurs que tu reçois de tous tes chefs qui te connaissent et qui t’apprécient à ta valeur. Je comprends que tes camarades soit un peu blessés et jaloux de ton succès, ils doivent comprendre que tu le mérites.

Quand tu verras Albert et Angèle tu leur diras de ma part qu’il me tarde de recevoir une dépêche que notre cher Antoine est reçu à son examen, tu les embrasseras bien fort à tous pour moi. À l’occasion de ta nomination tu as reçu des nouvelles de tous tes frères, je voulais t’écrire pour te féliciter le même jour, je ne suis pas malade, mais je n’ai pas de courage. Je dors bien et l’appétit laisse à désirer, les digestions ne se font pas bien. Je deviens toujours plus faible, les ressorts commencent à se rouiller, j’en prends mon parti à la volonté de Dieu.

Mon cher Jules depuis que j’ai perdu ton pauvre père tu as tout fait pour me rendre heureuse, par ton affection, tes succès dans ta carrière militaire. Tu as été toujours désigné par tes chefs un officier d’avenir, je suis bien fière de toi et t’adore ainsi que ma chère Thérèse que j’aime beaucoup parce que son Jules est tout pour elle avec ses enfants. M. Bessières doit être très content qu’on t’ai nommé commandant, quand tu lui écriras ne manque pas de lui envoyer mes bonnes amitiés. Théodorina et son fils Alphonse viennent de venir pour me féliciter.

Adieu mon cher Jules, je t’embrasse bien tendrement ainsi que ma chère Thérèse et nos chéris Georges et Émile. Je demande à Dieu de vous donner la santé et la continuation de votre bonheur que vous méritez si bien tous les deux, votre mère qui vous aime de tout son cœur. Encore mille tendres baisers.

Pauline Paloque

Narbonne 22 décembre 1900

Mon bien cher Jules

Le jour de ma fête me rappelle de bien bons souvenirs, tous les ans en revenant de la messe de Saint-Paul, je trouvais les lettres de bonne fête de mes chers enfants qui m’annonçaient presque toujours des succès dans leurs carrières. Je suis une bien heureuse mère et je remercie Dieu tous les jours de m’avoir donné de tels fils.

Toi mon cher Jules tu es celui qui me donne et qui m’a toujours donné les plus grandes satisfactions. Tu m’as toujours témoigné une grande tendresse, et un vif amour pour ta mère, moi aussi je t’aime de tout mon cœur. Tu me dis dans ta lettre je suis le plus heureux du monde, comme je suis heureuse de ton bonheur.

Êtes-vous tout à fait rétabli de votre légère grippe. Je te remercie des vœux de bonne fête que tu formes pour ma santé et pour mon bonheur ainsi qu’à mes chéris Georges et Émile. La lettre de Georges est très bien faite et charmante, Émile fait aussi de grand progrès. Ces chéris, je voudrais bien les avoirs auprès de moi pour les manger de baisers, pour les récompenser de leurs charmantes lettres de bonne fête. Pour le 1er de l’an je leur envois 50 fr pour en acheter ce que leur maman décidera.

Je viens d’avoir une crise qui m’a duré longtemps, je vais mieux mais je ne suis pas tout à fait remise. Je ne fais presque rien, j’ai perdu mes forces, un rien que je fasse il me faut vite asseoir sur le fauteuil. Malgré cette faiblesse, j’ai assez bon appétit, je dors bien et me ménage beaucoup. N’en parle pas à Aimé. Aimé a le don de m’agacer les nerfs.

Berthe et René m’ont envoyé une lettre charmante pour me souhaiter la fête. J’ai dîné chez Aimé le jour de Saint-Paul. Ils sont tous bien aimable pour moi. Quand tu verras Henry, tu lui diras de ma part que je le remercie de sa lettre de bonne fête, et que je lui envoie mille tendres baisers. Je finis et t’envoie mille baisers ainsi qu’à ma chère Thérèse et mes mignons chéris Georges et Émile. Votre mère qui vous aime beaucoup beaucoup.

Bien chère Thérèse

Je te remercie ma bonne et bien aimée Thérèse, des vœux que tu formes pour ma santé et pour mon bonheur. Tu peux croire ma chère Thérèse que je suis une mère privilégiée et j’en remercie tous les jours le bon Dieu de ce qu’il fait pour moi et pour ma famille. Je voudrais bien vous voir souvent vous et mes chéris Georges et Émile, mais je suis avec vous par la pensée, dans vos joies et dans tous les évènements heureux que Dieu vous prodigue. Bon noël et bonne année ! Que 1901 te comble de toutes les satisfactions que tu mérites.

Envoie de ma part à ton papa et à ta sœur mes meilleures amitiés. Adieu ma Thérèse chérie et mes chéris je vous embrasse mille fois de tout mon cœur. Aimé et les siens vous envoient mille tendres baisers. Je vais bien mais je n’ai pas de force. À Pâques !

Pauline Paloque

Narbonne 19 février 1901

(La dernière lettre de ma pauvre chère maman !)

Mon bien cher Jules

Comme tu dois le penser je suis bien heureuse d’avoir Albert auprès de moi. Je l’ai trouvé magnifique de santé enfin ! Toujours le même, il va repartir vendredi matin pour Paris à 10h. Berthe et son mari sont venus passer le carnaval avec ses parents. René part ce soir et Berthe va rester quelques jours de plus, ils paraissent très heureux.

Albert a pris ses repas chez Aimé. Dimanche et aujourd’hui nous nous sommes réunis, Blanche nous a régalée, tout a été excellent. Nous avons bien parlé de vous et nous avons trinqués à votre santé et à toute la famille. Élisa ou Léon envoient une carte tous les deux jours pour nous faire connaître son état de santé. Aujourd’hui j’ai reçu de Léon une carte où il me dit qu’il est toujours fatigué. Il mange assez mais les nuits sont presque toutes mauvaises, il lutte toujours avec sa maladie d’estomac compliquée. Il a pris du bromure de potassium qui lui a procuré quelques heures de sommeil calme. Ce qui veut dire que mon cher Léon n’est pas guéri, ce qui m’inquiète beaucoup. J’ai espoir que le beau temps achèvera de le guérir, ces grands froids que nous subissons auront une fin.

Ici il fait un soleil radieux mais le froid est très vif, il gèle tous les jours bien fort. Il est bien rare qu’il fasse dans ce pays un temps si rigoureux au 20 février. Jeudi dernier j’ai eu la visite de ton beau-père que je trouvais resplendissant de santé. Nous causons tout le temps de vous, de notre chère Thérèse et de nos chers Georges et Émile. De chez moi il alla chez Aimé.

Quand vous lui écrirez, remerciez-le pour moi de sa bonne visite qui me fait bien plaisir et je lui envoie mes meilleures amitiés. Je vais bien mieux depuis qu’il gèle, ce que j’ai eus je n’en sais rien mais c’est un grand coup que j’ai reçu, j’appelle cela une crise d’âge. Théodorina et Alphonse sont ici à l’occasion du passage d’Albert. Narbonne sous ce grand froid serait un petit Paris. Albert vous donnera tout les détails de cette fête sans précédent. Je t’embrasse mille fois bien tendrement ainsi que ma chère Thérèse et nos chéris Georges et Émile, votre mère qui vous aime de tout son cœur.

Pauline Paloque

Versailles le 7 mars 1901

Ma bien chère maman

Nous venons de recevoir une aimable lettre d’Aimé nous donnant de bonnes nouvelles de vous tous. Tu as vaillamment résisté à ce retour d’hiver qui ici nous à tous entamés. Nous traversons une période assez pénible : j’ai été fortement grippé et dans l’impossibilité de rester chez moi. J’ai pu réussir à faire marcher de pair les soins indispensables et le service, mais je ne suis pas encore tout à fait revenu à l’état normal. (Émile n’a pas cessé de se bien porté.) Georges, qui avait été enrhumé 8 jours avant le carnaval, s’est grippé à son tour et ne va pas au lycée depuis trois bonnes semaines. Enfin Thérèse est aussi assez fortement grippée et ne sort pas depuis 8 jours.

J’espère que tout mon monde sera sur pied dimanche. Nous attendons ce jour-là Angèle, Antoine, Jean et Albert qui nous racontera tous les détails de son voyage. Tu penses s’il nous tarde de causer avec lui de toi, ma chère maman, d’Aimé et de tous les siens. J’ai reçu une carte de Léon qui va de mieux en mieux. Henry nous en apportera encore des nouvelles dimanche. Il nous tarde beaucoup d’être à Pâques, ma chère maman pour passer quelques bons et heureux moments en famille.

Je t’écrirais pour te dire quelles dispositions nous comptons prendre pour t’éviter toute espèce de fatigue. Nous désirons que le bonheur de te voir ne soit pas amoindri par la peine que nous éprouverions à te voir fatiguée. Nous ne ferons que de courts séjours à Narbonne et nous désirons qu’ils ne soient pour toi qu’une occasion de joie sans mélange de fatigue aucune. En attendant, soigne-toi bien, ma chère maman et n’abuse jamais de tes forces. Thérèse, Georges et Émile joignent leurs caresses et leurs embrassades aux miennes pour leur chère maman Pauline. Embrasse aussi pour nous Aimé, Blanche, Jeanne et Louis, sans oublier Paul quand il viendra. Encore mille baisers chère maman de ton fils qui t’aime bien.

Jules Paloque

St Amand le 30 mars 1901

Ma chère maman

Je viens d’apprendre à l’instant que Jules a été décoré des palmes académiques ; cette nouvelle nous a fait bien plaisir, car nous savons que Jules la désirait beaucoup, et je me suis empressé de lui écrire pour lui adresser nos félicitations. Dans quelques jours tu vas avoir le bonheur de le voir avec Thérèse, Georges et Émile ; nous espérons que tu as repris ton courage, mais nous te recommandons cependant de ne pas te fatiguer pour recevoir Jules. Il te faut éviter toute espèce de tracas.

Nous attendons Henri qui va arriver jeudi prochain en compagnie de ses cousins Antoine et Jean. Il vient égayer notre intérieur si calme. Nous tâcherons de leur procurer des distractions.… restent à Paris pour terminer leur grand travail, qui est très productif à ce qu’il parait. Jules a promis de venir avec sa famille, passer la fête de la Pentecôte à Saint-Amand. Nous serons heureux de les recevoir. Henri se croit déjà à la veille de quitter l’École, il nous prie de nous occuper de son trousseau d’officier. Nous lui ferons comprendre qu’il est un peu tôt pour cela, puisqu’il n’aura l’épaulette que le 1er septembre.

Marguerite nous a envoyé la photographie de son petit Marcel. Tu as dû la recevoir aussi. Cet enfant est tout à fait gentil. Nous ne nous lassons pas d’admirer nos deux petits-fils, ou du moins leur image que nous avons placée dans notre chambre.

Malgré quelques giboulées intermittentes, le printemps a commencé à se faire sentir. J’éprouve un vrai plaisir à me promener dans notre jardin. Élisa s’amuse à soigner les fleurs, à ratisser les allées et à réparer le désordre occasionné par la mauvaise saison. Les violettes fleurissent pourtant. Ce sont les premières fleurs. Nous avons aussi des jonquilles, du muguet et des tulipes. Les lilas bourgeonnent. Dans un mois tout sera vert.

Je reviens sur ma première appréciation au sujet de notre résidence et je crois que nous nous y trouverons bien. Mais quel triste hiver j’ai passé. La gaieté m’est revenue et j’ai tout oublié de mes misères passées.

Nous souhaitons que tu passes de bonnes fêtes de Pâques avec tes enfants Aimé, Jules et leurs familles.

Adieu, ma chère maman, Élisa se joint à moi pour t’embrasser mille fois de cœur, ainsi qu’Aimé et toute sa famille.

Ton fils qui t’aime bien.

Léon Paloque

Toulouse le 9 septembre 1916

Mon bien cher Jules

Reçu ton mot du 3 nous annonçant la continuation de tes glorieuses prouesses. Bravo ! Petit frère bravo ! On voit maintenant ce que tu sais faire et combien il est regrettable qu’on n’ait pas utilisé, plus tôt, pour la défense nationale, ta grande science de l’artillerie, ta grande compétence et tes qualités de grand organisateur et de grand chef. Tes ennemis, les jaloux plutôt, doivent bien, au fond de leur conscience, se repentir de ce qu’ils t’ont fait. Je suis absolument certains que maintenant pas une voix n’osera s’élever contre la sanction qui ne tardera pas à te récompenser des services que tu rends à la patrie.

Je lis tous les jours les journaux et je suis heureux de te voir avancer peu à peu et d’obliger notre ennemi implacable à te céder du terrain. On dit que le Kronprinz a été disgracié et cela nous fait honneur que ce soit à notre frère que nous le devions.

Léon et Élisa sont ici, depuis lundi, Madeleine et Mirette qui les avaient accompagnés à Toulouse sont rentrées à Gaillac le même soir. Léon a vu hier le Dr Escat au sujet de son mal à l’oreille gauche. Ils ont parlé de toi. C’est en arrivant à Toulouse que nous avons reçu ta carte du 3. Nous avons tous déjeuné chez Paul le jour de notre arrivée. Inutile de dire que nous avons bu à tes succès. Dès que tu auras une minute à toi, envoie l’ordre de laisser partir le jeune Dupré, médecin auxiliaire, en permission. Je t’en serais personnellement bien reconnaissant.

Reçu hier des nouvelles de Marguerite toujours bien attristée, toujours rien de ce pauvre petit Jean ! ! Bonnes nouvelles d’Antoine, de […] et de leurs familles. Reçu hier une bonne lettre de Thérèse qui se plairait bien à Paris si elle avait le bonheur de s’y trouver avec son cher mari et ses chers enfants. Elle attend Émile d’un moment à l’autre et Georges bientôt. Je cède la plume à Léon qui ne veut pas laisser partir ma lettre sans te féliciter. Je t’embrasse de tout mon cœur. Ton frère qui t’aime bien

Albert Paloque.

Bravo mon bien cher Jules, pour le brillant succès que tu viens d’obtenir grâce à l’admirable organisation de ton artillerie. Nous sommes émerveillés à la pensée que tu commandes une si formidable puissance de 1 000 canons. Pour un pareil effort il faut une tête de premier ordre. Nous t’adressons nos plus vives félicitations. Je suis venu à Toulouse avec Élisa pour consulter le Dr Escat qui t’a donné des soins particuliers et suivis du meilleur effet. Je souhaite qu’il obtienne pour moi un aussi beau résultat et par conséquent qu’il me rende l’ouïe de l’oreille gauche. Mille baisers d’Élisa et de moi mon bien cher Jules. Ton frère qui t’aime bien

Léon Paloque

Nous avons appris avec plaisir les bonnes nouvelles de Thérèse, de Georges et d’Émile.

Remerciement du Général Marchal, le 6 janvier 1917

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Le 6 janvier 1917

Merci mon cher ami de vos compliments que je sens si sincères et dont je voudrais tant vous… l’équivalent. Il n'en faut pas que je me fasse d’illusion ; je récolte ce qu’ont semé tous les bons et vaillants artilleurs qui ont participé aux affaires et c’est à eux que je rapporte tout l’honneur qui m’est fait. J’espère qu’on vous rendra justice, je m’y emploie et j’ai déjà réussi auprès du Général Pétain ; c’est un premier succès qui aura plus tard des conséquences, mais ce que j’ai plus apprécié que vous belles qualités militaires, ce sont de très hautes que j’ai admiré chez vous et qui peuvent servir d’exemple à tous,

Bien cordialement à vous

Général Marchal

Toulouse le dimanche 7 janvier 1917

Mon cher Jules,

M. Dup… m’apprend que tu es nommé au commandement de l’artillerie du 18e corps. On te devait beaucoup mieux mais enfin c’est quelque chose et je t’adresse mes plus affectueuses et plus vives félicitations. Je viens de voir également le frère de Dartigues le capitaine d’artillerie qui t’apprécie comme tu le mérite et qui te conserve un bien sympathique souvenir pour la façon tout à fait aimable dont tu l’as accueilli. Il m’a dit « votre frère est le plus grand artilleur que nous connaissions et tout le monde l’aime dans son régiment, soldats, maréchaux de logis et officiers ». Tout cela m’a fait grand plaisir. Je t’embrasse de tout mon cœur, mon cher Jules et je te prie de me faire connaître ta nouvelle adresse. Ton frère qui t’aime bien.

Albert Paloque.

Félicitations de Leguen, le 10 janvier 1917

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Prisăcani, le 10 janvier 1917,

Mon colonel,

Une carte du Général Eon que ma famille m’a envoyée par la valise diplomatique vient de m’apprendre la bonne nouvelle. Je regrette que la distance soit cause que mes félicitations soient bien tardives, mais vous me connaissez, assez, mon Colonel, pour savoir j’espère combien je partage votre joie, celle de votre famille et combien je suis heureux de vous voir à une place que vous auriez du occuper depuis longtemps ; et, quoique aussi heureux ici qu’il est possible de l’être, je regrette de n’être plus près de vous. Il y aura dans notre corps d’armée un S.R.A. admirable et il s’y fera de bien beaux plans d’actions et calques merveilleux !

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Ici, nous sommes beaucoup moins avancés. Je suis capitaine (à titre très temporaire) et chef d’état major en quelques sortes d’un colonel commandant…

Mon chef roumain est le colonel Vladesce, ancien chef d’état major du 1er C.A. et grâce, mon colonel, à tous ce que cous avez dit et écrit de flatteur sur moi, j’ai toute la confiance et presque l’amitié de mon chef, et nous faisons du bon travail, secouant énergiquement les officiers roumains, qui, pour la plupart, en ont franchement besoin.

Au point de vue français, je dépends du Général Vouillemin, par l’intermédiaire du Colonel…

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Vouillemin par l’intermédiaire du colonel Lafont, celui que nous avions relevé à… et avec lequel nous avons échangé des souvenirs du front français.

Je suis grand… de l’instruction des officiers et suis heureux de mettre à profit toutes les leçons d’artillerie, de tactique de… que vous avez daigné me donner. Et j’espère que vous aurez lieu d’être fier de votre élève qui vous envoie, avec ses félicitations, toute sa reconnaissance et l’assurance de son respectueux, affectueux et presque filial dévouement.

Capitaine Leguen, Mission militaire française, Roumanie

21 novembre 1927, lettre de Léon

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Saint Nicolas, 21 novembre 1927

Mon bien cher Jules, et ma bien chère Thérèse.

J’ai lu hier avec le plus grand intérêt l’approbation du Général Hirschauer dans le discours qu’il a prononcé pour l’inauguration du monument élevé à Craonne sur la part prise par le Général Paloque, c’est un artilleur merveilleux qui commandant l’artillerie et qui pas son admirable… par le terrible feu de ses canons à la victoire de Craonne.

Mon frère Jules doit… et j’y prends la plus grande part.

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Je suis retourné à Saint-Nicolas pour procéder à l’installation de nos nouveaux métayers. Ils ont fort à faire pour remettre la propriété en bon état, faire les labours et les… Ils sont très laborieux et très intelligents. Ils ne voudront plus rentrer en Italie. Ils trouveront en France plus de liberté et une terre plus fertile. J’ai fait des améliorations aux bâtiments d’habitation et de l’exploitation.

Plusieurs de leurs compatriotes sont dans la région voisine et exploitent les terres, soit comme propriétaires, soit comme métayers, avec un plein succès.

J’espère que les nôtres suivront leur exemple.

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Madeleine et… sont rentrés à Toulouse. J’espère aller les voir dans le courant de décembre. Vous n’allez pas tarder à partir pour passer l’hiver sur la côte d’Azue. En janvier, de la douceur de ce bon climat. Ici, les brouillards commencent à couvrir la campagne pendant toute la journée. Le soleil ne se montre plus. Il faut songer à allumer les calorifères. Marcel vient nous voir tous les dimanches, Henri… à Saint-Nicolas vers la fin de l’année. Madeleine et Mireille viendrons se joindre à nous.

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Je vous embrasse tous… se joignent à moi pour féliciter encore Jules du brillant éloge du Général Hirshauer. Ils vous embrassent affectueusement, ainsi que Georges, Émile et leur famille.

Votre frère qui vous aime,

Léon Paloque.


Mons cher oncle et ma chère tante,

Frédéric et moi avons là avec fierté l’appréciation d’un grand général sur la valeur de notre cher oncle. Nous félicitons aussi Émile de ses succès et nous vous embrassons de tout cœur ainsi que tous vos enfants et petits-enfants.

Marguerite

1930, lettre d’un neveu

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Paris, le 9 mars 1930

Mon cher oncle, ma chère tante.

J’espère que le cataclysme qui vient de frapper le sud ne vous a pas atteint. Mais il est si difficile de se faire une idée exacte par les journaux que je… de nous rassurer par un mot sur les propriétés et aller de…

Ici nous avons depuis un mois une température si clémente qu’un ne peut imaginer qu’à quelques centaines de kilomètres, l’inclémence du ceil accumule les désastres

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j’ai eu l’occasion de m’entretenir récemment de mon… le général Matter, directeur de l’infanterie. Il m’a appris, entre autres choses qu’oncle Jules est de plus en plus versé dans la science des champignons et qu’au cours d’une période de demi repos… un peu néfaste de cette science à lui général Mattes ainsi qu’au général Guillaumet : d’ailleurs on me demande souvent dans les milieux… si je suis le parent d’un certain général Paloque si remarquable et si aimé… et cela ne fait… si possible le culte des neveux.

Écrivez nous, rassurez nous. Des tas de baisers de nous trois.

Vœux de Paul Appel

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Paris, le 24 rue de l’abbé Grégoire jusqu’en avril.

Général,

nous avons pris ce pied à terre à Paris pour l’année. Très sensible à vos bons vœux, je vous remercie et vous envoie les miens pour vous et pour les vôtres. Avec mon cordial souvenir.

Paul Appell

Le 14 janvier 1917

Mon bien cher papa

Avec quelle joie j’ai appris par votre affectueuse lettre ta nouvelle affectation, tu le devines sans peine. Te voilà à la tête de l’artillerie du C.A. c’est à dire à une place de général que tu devrais occuper depuis bien longtemps pour le plus grand bien des […] du pays. Je souhaite ardemment qu’à ton nouveau poste tu conserves ta bonne santé et que tu ais des chefs et des camarades sympathiques. Mais où sont maintenant ceux qui te connaissaient et qui avaient pu t’apprécier. Bien peu ont pu résister comme toi à l’effroyable cataclysme et la plus part ont depuis longtemps abandonné la lutte pour planter leurs choux.

Maman et Georges sont en ce moment réunis à Paris. J’espère que maman ne tardera pas à se […] et que Georges ne se ressent pas de la période de […] qu’il vient de traverser. Ici s’est toujours on ne peut plus calme à 40 km du front et en arrière d’un secteur que l’on rallie. Aujourd’hui dimanche il fait un temps splendide, grand […] en perspective. Reçu […] aimable lettre de Capestang, on insiste pour que maman vienne dans le midi. Aimable lettre du Colonel Leleu.

Adieu mon bien cher papa, mille et mille baisers de tous cœur de ton fils qui t’aime

Émile Paloque

Le 30 janvier 1917

Mon bien cher papa

Maman m’a écrit la brillante citation dont tu vas être l’objet et qui évoque les différentes phases de la guerre auxquelles tu as fait plus que prendre part puisque c’est en grande partie à toi que le succès a été du – Artois, Champagne, Verdun. Tu devines avec quel plaisir j’ai lu les phrases élogieuses du Général Eon mais tu sais aussi que rien ne peut nous rendre plus fier que nous le sommes de notre cher papa et jamais on ne réparera toutes les injustices dont tu as été victime au grand détriment du pays.

Tu dois être fort occupé en ce moment par la préparation des graves événements que 1917 fait prévoir aussi tache de conserver une santé parfaite malgré ce surcroît de travail. Maman a eu bien des ennuis depuis quelque temps, mais j’espère qu’elle ne tardera pas à en être complètement débarrassée. Bonnes nouvelles de Georges. Ici c’est toujours très calme. Je compte avoir une permission vers le 10 mars, quel bonheur si nous pouvions nous trouver tous les quatre réunis.

Adieu mon bien cher papa. Mille et mille baisers de tout cœur de ton fils qui t’aime beaucoup.

Émile Paloque

16 février 1917

Mon bien cher Jules

Dans le cours de ta brillante carrière, j’ai eu souvent l’occasion de t’exprimer toute la part que je prenais à tes succès, et la haute estime que j’éprouvais pour toi. Je t’ai suivi dans les diverses phases de la guerre, grâce à notre correspondance, et je t’ai adressé souvent l’expression de mon admiration pour ton énergie morale et ta résistance physique. Par ton mérite et tes excellents services, tu étais en droit de prétendre aux plus hautes dignités de l’armée.

Il a fallu que le général Malcor, profitant d’une journée malheureuse pour ton régiment, ait tenté de faire retomber sur toi des responsabilités qui ne t’incombaient pas et qu’il ait présenté, à ta place, le colonel Taurignac pour général. Malgré la brillante citation du général Eon te concernant, et les superbes résultats que tu as obtenus, à Verdun, comme commandant de toute l’artillerie, on n’a voulu t’accorder aucune récompense. Tu es victime d’une injustice flagrante. Mais tu peux être persuadé que je n’apprécie pas moins ton immense valeur, quoiqu’elle ne soit pas consacrée par une dignité quelconque.

Tu quitteras l’armée avec la tête aussi haute que si tu avais obtenu les honneurs les plus grands, et surtout, tu pourras être fier d’avoir conservé, dans toutes les circonstances de ta vie militaire, une conscience droite et sans reproche.

Comme tu le dis avec raison, tu as eu une existence des plus heureuses et c’est principalement dans l’amour de ta chère femme et de tes braves fils et aussi de tous tes parents que tu trouveras un bonheur sur plutôt que dans la vanité et la fragilité des honneurs du monde.

Élisa partage entièrement mes sentiments ; elle se joint à moi, mon bien cher Jules, pour t’embrasser mille fois de tout cœur.

Ton frère qui t’aime bien.

Léon Paloque

5 mai 1917

Ma petite Thérèsette adorée, nos prédécesseurs ayant échoué on nous a chargé de l’affaire. Tu verras par les journaux mes deux belles victoires d’hier et de ce matin, aussi bien qu’à Douaumont. Je puis te dire d’être fière. Je n’ai que le temps de t’envoyer un millier de baisers et de caresser ton petit […] que j’adore.

Jules Paloque

Il s’agissait de la prise de Craonne 4 mai et de Vauclerc 5 mai 1917

6 mai 1917

Ma petite Thérèsette bien aimée. La grêle que nous venons d’infliger aux boches les a calmés. J’ai pu dormir. L’autre nuit ils sont venus déposer du […] jusqu’à 10 mètres de ma chambre avec bombardement de ma popote aux heures du repas. Tout le monde me complimente non qu’il soit très bon. […].

Je vois que tu as été enrhumée mais que ça passe, prends bien des précautions. En ce qui concerne Émile et Georges, je veux adopter avec toi et nos enfants, bien d’accord une ligne de conduite. Dis-moi bien tout ce qui s'est passé au cours de cette permission sans passer un détail. Fais une longue lettre à ce sujet. Tu me dis aussi que Mme Laurent fait retomber sur toi sa mauvaise humeur, de quoi se plaint cette Dame ? J’écrirais à Émile […] tout ne va bien pas d’inquiétude pour moi. J’ai composé un bel opéra, je l’ai fait jouer par un orchestre comme jamais les hommes en avaient connu. Les prisonniers affluent. […]

Jules Paloque

Le Thillot le 22 septembre 1917

Mon Bien Cher papa

Ce matin avant de quitter L. définitivement, Poggoli le sergent major du Canevas est venu à bicyclette m’annoncer la bonne nouvelle qui lui était téléphonée par le Capitaine Massenet. Elle nous comble tous de joie et nous réjouissons tous avec toi. Comme il y a longtemps que cet événement serait arrivé sans de basses intrigues. Comme maman va être contente. Je suis à la première étape de mon voyage et viens de déjeuner à Thillot à l’hôtel où j’étais descendu il y a quelques jours. Je compte ce soir dîner et coucher dans l’hôtel à R et me présenter demain matin à la caserne des Char…

Adieu mon bien cher papa, mille et mille baisers de tout cœur de ton fils qui t’aime beaucoup

Émile Paloque

Le 23 septembre 1917

Ma petite Thérèsette bien aimée, je suis devenu général en dormant. Pendant la nuit de vendredi à samedi Massenet est venu m’éveiller pour me l’annoncer. Le Général Pétain a tenu à me faire dire, à deux reprises sa joie d’avoir réussi cette nomination tout à fait extraordinaire étant donné les… du jour qui sont aux plus jeunes. Le Général Duport avait écrit au Général Hirschauer « on ne va pas nommer général un colonel né en 189 ». C’est fait. Le Général Pétain avait envoyé exprès le Général Herr passer 2 jours avec moi. J’étais en bonnes dispositions, gai, enjoué, bon jarret. Je l’ai fait monter…au sommet d’arbres de 30 mètres de haut pour lui montrer la bataille. Mon artillerie s’est parfaitement présentée et en me quittant il m’a dit qu’il venait exprès pour moi et que ça marcherait. Je n’ai pas voulu t’en parler n’y croyant pas. C’est le Général Hirschauer qui m’a proposé à fond et qui a fait les 2 miracles en un mois.

Le gros obstacle c’était Falque . Dès le jour ou Bourgeois était là il commençait à dire à Bourgeois devant moi : « je ne comprends pas pourquoi Hirschauer veut proposer Paloque pour commandeur (lui ne l’est pas), il ne faut pas courir 2 lièvres. Proposons Paloque pour général et laissons la légion d’honneur de côté ». Alors moi j’ai dit ceci « c’est la première fois qu’on parle de ces questions devant moi. Je ne demande rien qu’une seule chose sur cette terre, en ce qui me concerne personnellement, c’est de savoir quel est le cochon qui m’a fait… les tortures morales du début de la guerre et de savoir ce que ce cochon a dit ou écrit.

Gabriel Paul Vincent Falque, X 1878

Cela dit si vous voulez parler de décoration ou d’étoiles pour moi, laissez-moi sortir ». Le surlendemain je donnais grand diner à Bourgeois, Hirschauer et Falque, il y avait aussi Penel, qui a toujours été parfait. Deux jours après, sans s’attaquer à moi directement, Falque vient tomber brutalement sur mon second colonel commandant l’artillerie lourde et sur un commandant de groupe des plus distingués, les traitant de je ne sais quoi mauvais artilleurs, alors qu’ils en savent cent fois plus que lui. Je ne savais quelle attitude adopter croyant Falque un grand ami. Le lendemain je lui demande de m’aider à faire passer Émile dans l’artillerie. Je le vois se redresser subitement et se mettant à parler, à parler, à parler avec violence, il me dit que ce n’est pas possible, qu’Émile doit faire… dans l’infanterie etc., etc. Le lendemain l’officier de liaison du Corps d’Armée rentrant de l’armée rapporte cette phrase : « à l’armée on a l’impression que ça ne marche pas à l’artillerie du 18eme Corps d’Armée, pas d’entente avec l’aviation etc., etc. ». Je vais trouver mon Général Hirschauer et je rends mon tablier. Je lui dis : « tu me remplaceras comme tu voudras, mais tu ne peux perdre ton commandant d’artillerie lourde sans compromettre l’artillerie du corps d’armée ».

Le Général Hirschauer me répond : « tu as la confiance de ton chef, qui est moi, que veux-tu de plus ? Dans quelques jours tu ne seras plus sous les ordres de ce F, et…. Je vais inviter Falque à diner demain soir et j’arrangerais ça ».

En effet le lendemain soir 14 avril, il invite Falque à diner et voilà qu’au cours de ce diner un coup de téléphone du Général commandant l’Armée leur apprend ma nomination de commandeur. Falque riant très jaune est obligé d’accompagner Hirschauer à ma popote et me voit épingler la rosette argentée. Depuis ce moment il se démène comme un diable dans un bénitier et je reçois un rapport signé Falque, passé par l’Armée me faisant des observations, des rappels à l’ordre et signalant un tas d’imperfections. Le Général de l’Armée déclare qu’on ne peut pour tant de fautes commises s’en tenir à des observations. Il ordonne une enquête à la suite de laquelle il veut des punitions soit pour moi soit pour mes colonels.

Que faire chère Thérèse, tous les torts venaient justement du service de Falque, dont un officier était venu faire éclater un de nos canons. Je n’en vais rien dit,…, en me faisant mettre aux arrêts arrêter ma nomination de général ou bien il fallait mettre mes colonels aux arrêts et les torts étaient tous au service de Falque. C’était au-delà de la mesure supportable et je te l’ai dit c’est trop d… la guerre.

J’espère que tu pourras déchiffrer. Pas le temps de relire. Trop pressé.

Capestang le 23 septembre 1917

Mon Julette bien aimé, toutes mes félicitations. Je vois sur le journal la Dépêche ton nom comme général. Tu le mérites bien et c’est avec une grande émotion que je viens d’apprendre cette nouvelle. Je reçois l’Éclair de Montpellier. Lorsque j’ai vu cette longue tirade de généraux, cela m’avait fait de la peine de ne pas te voir : il y a le colonel d’Artillerie Alogue sur l’Éclair, c’est sans doute une faute d’impression mais j’ai envoyé chercher des journaux chez des voisins dans le rue de la Roque et je vois bien. Le colonel d’Artillerie Paloque en remplacement du général Gossard. Cela me fait beaucoup de plaisir car il y a longtemps que tu l’as mérité. Encore toutes mes félicitations mon petit général.

Si nos parents étaient là ils auraient une bien grande joie. Nos chers enfants vont être bien heureux d’apprendre cette nouvelle. Hier au soir dans Capestang il y a des personnes qui avaient déjà lu ta nomination, il a fallu que sur mon journal cela n’y soit pas. Je t’envoie une dépêche je ne sais si elle t’arrivera bientôt. Je suis avec toi par la pensée et par le cœur. J’arriverais à Paris le samedi 29 vers les 10 h du matin à moins que tu me dises de venir plus tôt. Je vais sans doute te revoir. Je suis bien contente. Émile sera classé comme nous le désirons. Georges va bien il a une bonne situation bénissons le ciel. Conserve ta santé. Je vais aller à la messe. Adieu mon Juleton bien aimé, mille tendres baisers et caresses de ta petite femme qui t’aime beaucoup beaucoup.

Thérèse Paloque

Toulouse le 30 septembre 1917

Mon bien cher Jules

Vous avez dû être bien heureux d’avoir pu vous réunir, Thérèse, Georges, Émile et toi pour fêter le triple anniversaire de ton mariage et de la naissance de tes enfants. Je souhaite que vous réalisiez ces réunions le plus souvent possible et qu’après la guerre, nous fêtions bientôt les mariages de Georges et d’Émile qui seront des partis très désirables, étant donné d’abord les grandes qualités qu’ils possèdent et leur grosse fortune. Il parait qu’il y a 30 jeunes filles pour un garçon, ils n’auront que l’embarras du choix.

J’ai reçu de tes deux fils de bonnes lettres le 28 août et le 19 septembre. J’ai déjà répondu à Émile, dont je ne connais pas la nouvelle adresse. Georges aura bientôt une lettre de moi. Antoine qui t’aime beaucoup, qui me parle de toi dans toutes ses lettres (il a beaucoup souffert, comme nous tous, des injustices dont tu as été victime) a été bien heureux de te voir arriver aux étoiles et compte bien qu’on te récompensera encore.

Il a bien regretté de ne pas t’embrasser lors de sa dernière permission. Il n’a parait-il pas reçu de Thérèse le pneumatique qu’elle devait lui envoyer pour te rencontrer, mais tu ne manqueras pas de le voir quand tu feras une inspection du côté de Verdun. Il en sera bien satisfait.

Jean a eu une permission de détente qu’il est venu passer avec Henriette et Huguette partie ici et partie à Caraga… chez sa belle-mère. J’ai été bien heureux de les voir. Malheureusement le temps qu’ils m’ont donné a été bien court. Je pense que son administration le rappellera bientôt à ses anciennes fonctions à Chabarrais où il rendra de plus grand service au pays que dans les fonctions qu’il occupe. J’ai écrit à Léon […] pour avoir des nouvelles de Roger qui doit être actuellement en convalescence, d’après ce que tu me dis de lui. J’ai vu avec un grand plaisir Paul et Germaine à leur passage, au moment de leur départ pour Paris. Vous devez Thérèse et toi être bien contents de ce voisinage. L’affaire de Paul contre […] ne tardera pas à être jugée le 6 octobre prochain, sauf renvoi. Excuse-moi si je suis […] un peu trop de temps à t’écrire. Je te promets d’être plus régulier dans ma correspondance à l’avenir. Je t’embrasse bien fort et de tout cœur ainsi que Thérèse et tes enfants. Ton frère qui t’est tout dévoué

Albert Paloque.

Toulouse le 9 décembre 1927

Mon bien cher papa

Ma bien chère maman

Je viens de lire Bertrix, quelle terrible journée mon pauvre papa. Après avoir passé ta vie à travailler la meilleure utilisation possible de l’artillerie, voir dès le premier jour ton beau régiment anéanti d’une façon aussi tragique et aussi bête, quel cauchemar. Que de […] ont du se produire et pourtant l’affaire de Bertrix n’est pas un cas isolé. Sur tout le front, le premier engagement s’est produit de façon analogue.

En Alsace nous entrions à Mulhouse sans coup férir, l’infanterie défilait dans les rues l’arme sur l’épaule, puis tout à coup encerclement, coups de feu partant de toutes les fenêtres. Obligation pour nous de reculer jusqu’à la frontière. Au sujet de Morhange on m’a raconté des choses analogues. Il y avait donc manœuvre pour tirer parti de notre esprit d’offensive trop téméraire, pourtant il faut avouer que la fatalité s’est abattue sur ton pauvre régiment. Il eut peut-être suffi de peu de choses pour qu’un demi-tour soit possible avec protection arrière de l’infanterie. La providence n’en a pas voulu ainsi, mais elle t’a épargné ce qui pour nous est tout.

Je relierais encore et plus tard je compte aller voir plan en main le théâtre de ces terribles moments. Nous espérons que petite maman va beaucoup mieux et que […] et entérite étaient dues a une même cause grippale qui ne tardera pas à disparaître. Vous aurez sans doute la visite de Marie Ferran qui a reçu hier soir un télégramme de ses cousins Py « pars de suite Henriette très fatiguée », elle est donc partie hier soir ! Nous ne sommes pas en peine ayant dès ce matin femme de ménage + Jeanne, mais nous comptions recevoir dans le courant de la semaine le ménage de Marcelle… et son mari qui sont passé à Toulouse se rendant à Lourdes, nous les aurions gardés deux jours.… À l’instant même nous recevons votre affectueuse carte. Nous espérions qu’elle nous annoncerait la guérison complète de maman. Restez au coin du feu par ces froides journées tant que vous n’êtes pas entièrement guéries. Yvonne se joint à moi pour vous embrasser mille et mille fois de tout cœur.

Vos enfants qui vous aiment.

Émile Paloque

Embrassez bien fort pour nous Georges et les siens s’ils viennent vous voir.

Toulouse le 15 décembre 1927

Mon bien cher papa

Ma bien chère maman

Nous espérons que maman va de mieux en mieux et que rien de vous empêchera de mettre à exécution vos projets de départ pour Nice, mais là-bas ne ménagez rien pour être très confortablement installés (chauffage central) et pour que le cas échéant vous ne soyez pas obligés de sortir pour prendre vos repas car même à Nice il y a parfois de vilaines journées. L’hôtel… où vous preniez vos repas du soir est peut-être ce qu’il y a de mieux.

Je viens de relire Bertrix crayon et papier en main et marquant la position des unités. Quelle terrible situation dans ce bois occupé aux deux extrémités, c’est miracle que tu aies pu en sortir la plus grande partie de ton régiment et encore ce n’était que le commencement des épreuves ! Quelle journée mon pauvre papa.

Le commandement supérieur est impardonnable de ne pas vous avoir mieux renseigné sur l’ennemi et d’avoir donné des ordres pour une marche militaire au lieu de donner des ordres pour une bataille (rejeter l’ennemi au-delà de telle ligne ou bien résister sur telle ligne) l’état d’esprit eut été tout autre.

Mais je trouve que la plus grande responsabilité incombe au général Fraisse qui a engagé sa brigade sur une route sans aucune couverture à droite. Mais enfin il serait naïf de ma part de dire il aurait fallu faire ceci et cela. Je serais toujours hanté par ces terribles évènements.

Hier bonne nouvelle,… m’annonce que ma nomination d’astronome adjoint était arrivée, j’ai immédiatement demandé à voir x à qui j’ai exprimé mes remerciements. Je l’ai d’ailleurs revu quelques instants après à une réunion des professeurs et on a fait le trajet de retour ensemble très cordialement. Hier soir nous sont arrivés de Montpellier en auto le jeune ménage Bouchet que nous avons pour deux jours. Après dîner nous sommes allés écouter quelques morceaux au café des Américains et ce soir ils nous invitent à dîner et nous mènent au théâtre, ils ont apporté de beaux jouets aux enfants. Après leur départ nous nous mettrons en quête d’auto… mais…. Vraiment vous nous avez trop gâtés. Embrassez bien fort pour nous Georges et les siens quand vous les aurez. Nous comptons bien les avoir à Toulouse quand ils pourront voyager. Temps définitivement gâtés qui me laisse beaucoup de répit en ce moment. Je m’aperçois qu’au sujet de Bertrix j’oublie de parler du principal, la magnifique conduite du 18e qui s’est couvert de gloire. La résistance admirable de la 9e batterie est vraiment admirable.

Yvonne se joint à moi pour vous embrasser mille et mille fois de tout cœur.

Vos enfants qui vous aiment.

Émile Paloque

Toulouse le 9 janvier 1932

Mon bien cher papa

Ma bien chère maman

Il nous tarde de vous savoir enfin débarrassé de votre rhume et ne toussant plus. Ici nous allons tous bien. Yves a repris sa belle mine. Bernard semble jusqu’à présent avoir échappé au microbe de la varicelle. J’ai attendu pour lire Bertrix de pouvoir le faire à tête reposée, quelle terrible journée mon pauvre papa, que de dangers avec la vision horrible de l’écrasement sans riposte possible ; il t’a fallu une énergie peu commune pour ne pas perdre la tête. Mais vraiment le commandement est impardonnable de n’avoir tenu aucun compte des renseignements reçus et surtout de ne pas vous les avoir communiqués, cela eut créé un état d’esprit qui aurait évité le désastre. En tous cas la lecture est saisissante même pour qui n’aurait eu aucun parent dans la tourmente. J’ai reçu aussi la France Militaire ou la publication est annoncée en termes vibrants et bien sentis, je le conserve précieusement avec les deux plaquettes.

Demain nous aurons quelques amis pour goûter. Bonnes nouvelles de Marseillette. Ci-joint une lettre de Bourgeais ( ?) et une autre de Pouydrajens ( ?) qui montrent surtout l’amitié et l’estime qu’ils ont pour papa. Au point de vue des évènements elles ne sont guère rassurantes.

Nous nous unissons pour vous embrasser mille et mille fois de tout cœur. Vos enfants qui vous aiment.

Émile Paloque

Le coffre Fichet pèse 200 kg, c’est un cube absolument lisse et sans aspérité de 60 cm de côté environ. Il est très solidement fixé au mur par une forte tige fixée au coffre juste au milieu de la face qui est contre le mur. Il ne craint rien de l’incendie ni des outils perforants. Les seules choses à craindre sont le vol et le chalumeau. Le vol n’est possible qu’après démolition totale de plusieurs mètres carrés de murs épais, enfin l’objet n’est pas transportable sans éveiller l’attention. Le chalumeau nécessite aussi un attirail encombrant et bruyant.

Toulouse 21 février 1932

Mon bien cher papa

Ma bien chère maman

Nous avons reçu votre affectueuse lettre du 17 et votre carte du 20. Nous voyons que vous n’allez pas mal et que vous profitez du beau temps pour aller vous aérer à Capestang. Ici tout le monde se porte à merveille. Bernard ne va au lycée que l’après-midi et il a repris une mine superbe. L’annonce de la Dépêche a produit son effet. Je suis passé chez… Bertrix était épuisé et on venait d’en commander un deuxième lot chez…, j’en ai retenu un d’avance. Chez Richard depuis trois jours Bertrix est très bien placé en vitrine. Yvonne et moi y sommes passés successivement pour tacher d’épuiser le lot. Donc grand succès.

Nous allons cette après-midi chez les Delteil. Hier le fils Casserat est venu me faire ses adieux, car le déménagement a eu lieu ces jours-ci, il a tenu à me montrer qu’il avait pris grand soin de n’emporter aucun livre de l’Observatoire. M’a fait visiter toute la maison. Il y aura fort à faire pour rendre agréable cette maison glaciale, mais ce n’est qu’un détail. Nous nous unissons pour vous embrasser mille et mille fois de tout cœur- vos enfants qui vous aiment.

Émile Paloque

Toulouse le 10 mars 1932

Mon bien cher papa

Ma bien chère maman

Nous recevons votre affectueuse lettre et sommes heureux de voir que vous n’allez pas mal. Je vous écris à la… pour vous transmettre un article de l’Express qui me parait très convenable. On a d’ailleurs téléphoné à l’Observatoire de l’Express pour demander l’adresse de papa.

Nous serons bien heureux de vous revoir prochainement mais nous allons aller à Lodève surtout pour régler la succession, je me chargerais sans doute de la maison pour une somme modique, Marcel prenant F… Je ne m’arrêterais d’ailleurs en tout que quelques jours. Les enfants passeront donc surtout leurs vacances à Toulouse mais nous serons bien heureux de nous réunir avec vous à l’aller et au retour, et les enfants s’en font déjà une très grande joie.

J’avais proposé à Georges de nous rencontrer dimanche prochain à mi-chemin entre Toulouse et Carcassonne, à Foix ou à Revel mais l’état de santé de Bernadette n’a pas permis la réalisation de ce projet remis à une meilleure saison. Nous avons déjeuné samedi chez des amis à la campagne, avons invité François Guy à déjeuner pour dimanche mais il est encore collé, et il a deux jours de vacances qui lui permettront peut-être d’aller à B…, il doit nous écrire. J

e suis tout à fait de l’avis de papa et je vais m’informer pour la carte de combattant. Merci beaucoup. Ce pauvre B… était le seul qui avait répondu à mes lettres de juillet dernier qu’il s’intéresserait à ma candidature. Il avait été très gentil avec moi en novembre. Je l’avais vu à l’institut. Ça va être évidemment une place… Aujourd’hui même je vais accepter d’aller en Amérique. J’écris à D. et E., mais sans insistance. Je me mets à leur disposition pour aller là-bas s’ils jugent que cela pourrait avoir quelque utilité. J’écrirai aussi ces jours-ci à Antoine pour savoir où en est mon affaire. Il est vrai que je suis déjà saturé de travail et que malgré tout M. en me débarrassant des questions matérielles, factures à payer, comptabilité, facilite ma tâche. J’ai envoyé mon projet d’introduction à B., F. et P. Nous allons voir dans quelques jours ce qui va sortir de là. À bientôt le jour de vous revoir. Nous nous unissons pour vous embrasser mille et mille fois de tout cœur. Vos enfants qui vous aiment.

Émile Paloque

Les enfants vont très bien. Bernard va maintenant au lycée matin et soir. Yves a été 7e en géographie. Ils sont ravis de leurs bicyclettes.

Carcassonne le 17 mai 1940

Mon cher grand-père et ma chère grand-mère

Malgré le mauvais temps et les émotions que nous avons actuellement j’espère que vous allez bien. Nous recevons assez souvent des nouvelles de papa mais nous préfèrerions l’avoir auprès de nous comme Yves et Bernard qui ont le leur. Nous pensons que tante Yvonne est tout à fait remise et qu’ils vont bien. Les professeurs d’Henri sont très contents de lui, il est sage et travailleur. Maman est très occupée et je la seconde de mon mieux. Tout le monde nous envoie leurs meilleurs souvenirs. Maman et Henri se joignent à moi pour vous embrasser bien affectueusement.

Votre petite-fille qui vous aime beaucoup.

Lili

Carcassonne le 16 décembre 1940

Bien cher grand-père, bien chère grand-mère

C’est avec beaucoup de plaisir que j’ai reçu votre aimable envoi ; les boucles d’oreilles me plaisent et me vont très bien… vous serez contents de me les voir sur mes oreilles ; elles sont très jolies en grenat et perles, je vous en remercie encore de tout cœur.

Henri est en classe, il travaille bien, mais il lui tarde d’être en vacances. J’espère que vous allez bien malgré l’hiver et les restrictions… ici nous avons eu très mauvais temps…

À bientôt, papa, maman et Henri se joignent à moi pour vous embrasser bien affectueusement.

Votre petite-fille qui vous aime

Lili

Carcassonne 3 juillet 1942

Mon bien cher papa, ma bien chère maman

Hier soir, 2 juillet, en revenant de Capestang j’ai trouvé votre affectueuse lettre datée du même jour. Nous voyons avec plaisir que vous allez bien, étant rétabli de votre état grippal. Bonne santé également à l’observatoire.

Voici le résumé de l’état des travaux à Capestang. Une cloison sépare la maison en deux parties de bas en haut. Dans chaque partie un escalier. L’escalier de l’aile ouest, c’est-à-dire l’aile de la chambre du balcon est pourvu de la rampe. La cuisine de cette aile ouest est terminée, avec grande cheminée ressemblant à celle de l’autre aile, potager, évier avec robinet d’adduction d’eau. L’évacuation d’eau est assurée par tuyauterie amenant à un puisard. Tout cela est réalisé. La cloison de séparation est seulement plâtrée mais pas encore peinte. Cette cloison se prolonge à l’extérieur sur la terrasse par un mur qui partage la terrasse, mais ne se prolonge pas pour le moment dans le jardin. Ce mur soutient le balcon, ce qui rend son utilité double.

Chaque aile est donc habitable. Mais voici le hic.

Malgré mon insistance, je ne suis pas parvenu à faire exécuter l’installation électrique. L’entrepreneur ne dispose pas du matériel nécessaire mais il compte l’avoir incessamment.

Mes ordres (aussi bien pour les travaux d’entrepreneurs que pour les travaux viticoles) sont classés par ordre d’urgence.

La première urgence pour l’installation électrique comporte :

On verra ensuite pour la deuxième urgence. Je vous tiendrais au courant. Veuillez me dire dans votre prochaine lettre ce que vous pensez de cette question d’électricité.

De nous quatre, mon cher papa et ma chère maman, nos plus affectueux baisers. Votre fils qui vous aime beaucoup.

Georges

Et un travail d’art. Chaque battant de la grande porte en bois ouvre sur chaque vestibule. D’après nos prévisions, c’est le jeudi 9 juillet que nous nous installerons à Marseillette.

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17 septembre 1914

Mon cher Pierre,

J'espère que vous allez bien ainsi que toute votre famille, quant à moi, je me porte très bien comme le prouve cette photo prise le 46e jour.

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12 janvier 1917

Mon cher Pierre

J'ai reçu l’aimable lettre de vœux de Mlle Alba et une de son père. Je vous remercie et je vous souhaite bonne santé et souhaitons aussi la grande victoire finale.

J'ai reçu un autre poste beaucoup plus important qui met dix colonels sous mes ordres. Mon adresse est : colonel Paloque, commandant l’artillerie du 18e Corps d’Armée…

Je vous envoie 50 fr., dites mois la récolte totale de 1916.

Sentiments très cordiaux.

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