Eugène Création décembre 2010

Lettres d’une vie, les difficultés, la stabilisation et aussi la Commune, l’apaisement à la fin de la vie.

Eugène est le frère à problèmes de Valentine. La série de lettres qui est présentée ici s’étend sur presque 40 ans. En 1858, à 31 ans, Eugène a déjà un rapport à l’argent complexe. Leur père est mort en 1851, leur mère en 1855 et leur frère Jules en 1856. Il s’agit de s’entendre sur la valeur de la maison familiale de la rue Saint-André des Arts.

Eugène prend la mauvaise voie et tous ses projets sont compliqués, courts en financement. Les années à Orléans sont très difficiles, pour lui et aussi pour Valentine et Charles qu’il harcèle pour obtenir de l’argent.

Par la suite, il s’installera comme mécanicien à Lyon puis reviendra à Courbevoie où il trouvera un emploi de cocher. Il terminera sa vie à Paris, sans doute dans une pension.

Peu d’informations sur sa femme et ses enfants qui disparaissent de l’histoire sans explications.

Montereau, le 31 mai 1858

Monsieur Alfroy Neveu, pépiniériste à Lieusaint, près l’église.

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Je reçois à l’instant une lettre de Monsieur Foucher dans laquelle s’en trouve intercalé une de toi disant que tu ne peux prendre la maison pour cent mille francs. Je trouve ceci fort peu loyal car cette estimation a été faite devant toi. Tu y as consenti et je trouve très extraordinaire maintenant que tu ne finisses ce que tu avais accepté ; quant à moi, tu le sais bien, je ne puis me mettre cette maison sur le dos. C’est pour cela que tu voudrais ne la prendre que pour 40 000 francs, chose à laquelle je ne puis consentir car cette estimation a été faite suivant… et d’une manière je crois très consciente car elle rapporte 4 400 francs net et c’est à dire tout frais faits, et les loyers ne descendrons pas de sitôt. Elle est vielle, c’est vrai, elle n’est pas à l’alignement, c’est encore vrai, mais pour cela même ; vous dussiez accepter car le gouvernement vous la faisant démolir pour la remettre à l’alignement, vous pouvez ou la lui vendre suivant son rapport ou obtenir une forte indemnité et après cela vous aurez une maison qui sera doublée de valeur.

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Mais, s’il fallait calculer sur les non-valeurs futures, je crois qu’avec des actions je me trouverais dans un même cas car elles sont en ce moment cotées très bas. C’est vrai mais qu’il arrive un bouleversement elles dégringoleront de plus belle et tomberont en dessous des prix. Il y a donc autant de craintes à avoir d’un côté comme de l’autre. On a raison de dire que c’est toujours le plus malheureux qu’on cherche à dépouiller car ce serait me faire tort de dix mille francs que d’accepter ta proposition. Ce n’est pas pour moi mais pour mon enfant que je défends ses intérêts.

J’ai écrit à Me Fourcher pour lui apprendre ma décision à ce sujet et le prier, malgré tout l’intérêt que j’ai de voir terminer ces affaires, de reprendre momentanément son travail ; ainsi voit, réfléchissez que ce retard me fera encore grand tort car je ne veux et ne puis me chercher une place avant que tout cela soit finit, et pour l’instant je suis très gêné et ai pourtant un pressant besoin d’argent.

Adieu, embrasse Valentine et Fernand pour nous.

Eugène Picheran

Répondre de suite.

Ps : Je ne conçois d’ailleurs pas pourquoi tu te sers de l’entremise de M. Foucher et pourquoi tu n’as pas toi même fait cette proposition et la discuter ensemble, c’est probablement parce que tu avais honte de ce que tu voulais faire car ta conduite n’est pas du tout celles que tu affiches toujours au vis avis du monde en ayant l’air de tant vouloir défendre mes intérêts.

Saisie, septembre 1865

Eugène vend à sa sœur Valentine sa part d’une maison rue Saint-André des arts moyennant un paiement en dix ans. Mais en 1865, Eugène revend sa créance à Monsieur Desouche qui entend la faire honorer.

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D’un acte reçu par maître Moreau jeune et son collègue, notaires à Orléans, le 22 septembre 1865, portant cette mention Enregistré à Orléans, le 23 septembre 1865, folio 48, reçu 50 francs, signé de Bruneau, a été extrait littéralement ce qui suit : ont comparu monsieur Eugène Laurent Picheran, propriétaire tenant l’alcazar Orléanais et ci devant mécanicien et madame Catherine Joyer son épouse qu’il autorise, demeurant autrefois à Montereau et aujourd’hui à Orléans, rue Dauphine N° 4, faubourg Saint-Marceau. Lesquels avant de passer au transport objet des présentes ont exposé ce qui suit :

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et Madame Tredi Ventôse Delgoffe son épouse, leurs père et mère que leurs successions respectives & encore de celle de Jules Louis Picheran leur frère germain décédé saisi… des successions de monsieur & madame Picheran, ses père & mère, Madame Alfroy & monsieur Picheran ont rapporté à la masse de la succession de la dame leur mère chacun la somme de quarante-trois mille cent cinquante francs, formant la valeur de la moitié de la maison rue Saint-André des Arts, numéro soixante-deux nouveaux, 4 par le résultat des opérations au dit acte il est revenu net à… Eugène Laurent Picheran une somme de cent huit mille sept cent trente-deux francs vingt-six centimes, pour la réception de laquelle il lui a été abandonnée entre autres choses la somme de quarante-trois mille six cent cinquante francs pour le prix de la moitié de la maison rue Saint-André des arts vendue à madame Alfroy.

À la suite de diverses opérations & dans le même acte… Picheran & madame Alfroy ont réglé le compte des sommes qu’ils se devaient relativement aux communautés & successions liquidées, et il est résulté de ce règlement que madame Alfroy n’est plus restée débitrice de M. Picheran que d’une somme principale de trente mille francs sur celle de quarante-trois mille six cent cinquante francs, près de la moitié de la maison rue Saint-André des arts.

Ces faits exposés, il a été passé comme il sied au transport des objets des présentes. Transport, monsieur Eugène Laurent Picheran & madame Catherine Soyer son épouse pour parents, ont, par ces présentes, cédé & transporté sans la garantie de droit solidaire entre eux et même avec une promesse de payer eux-mêmes à défaut pour le débiteur de le faire dans le mois d’une simple mise en demeure, tant le capital ci-après transporté que les intérêts, à monsieur Adolphe Desouche, entrepreneur de travaux publics, demeurant à Orléans, Faubourg Saint-Marceau, rue Dauphine, numéro seize, précédemment & actuellement rue neuve Eudelle, numéro vingt-cinq, à ce présent & ce acceptant aux cédants dans cette principale de trente mille francs restant due à… Picheran aussi qu’on le soit par l’exposé qui précise par monsieur et madame Alfroy sur celle de quarante-trois mille six cent cinquante francs près de la rente de la moitié de la maison rue Saint-André des arts, numéro 70 ancien et 62 nouveau.

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Pour M. Desouche jouir et disposer de cette somme en pleine propriété n’avait droit aux intérêts à % qu’elle produit, le tout à compter de ce jour. Par suite Monsieur et Madame Picheran mettent et subrogent avec la même préférence au dit sieur Desouche dans tous leurs droits, nous raisons, actions privilège, hypothèque, action résolutoires et effet d’inscription, le tout jusqu’à concurrence de ladite somme de 15 000 francs en principal et accessoires. Prix : le présent transport est fait moyennant pareille somme de 15 000 francs que Monsieur et Madame Picheran reconnaissent avoir reçue de Monsieur Desouche en espèces du cours comptés et délivrés à la vue des notaires soussignés, dont quittance remise de titres. Monsieur Desouche reconnait que remise vient de lui être faite de la grosse de la dette du 23 juillet 1858 et d’un extrait de la liquidation du même jour. À la charge pour sieur Desouche de les communiquer à Monsieur et Madame Picheran à tous les soins et sous récépissé.

Ce trait littéralement par Maître Moreau jeune, notaire à Orléans, soussigné sur la minute du dit acte de transport étant en sa garde et possession (signé) Moreau jeune, pour copie conforme

L’an 1865, le 26, à la requête de Monsieur Adolphe Desouche, entrepreneur de travaux publics, demeurant à Orléans, ci devant rue Dauphine, numéro 16 actuellement rue Neuve Eudelle, numéro 25, pour lequel domicile est élu en mon étude.

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J’ai, Jean Edmond Dubois, huissier près le tribunal civil de Melun, demeurant à Brie Comte Robert, soussigné signifié et en tête de la présente, laissé copie à Monsieur Charles Ferdinand Alfroy, cultivateur pépiniériste et à Madame Valentine Picheran, son épouse, demeurant ensemble à Lieusaint, canton de Brie Comte Robert (Seine et Marne) en leur domicile où étant et parlant à M. Alfroy de l’extrait en la forme littérale d’un acte passé devant maître Moreau jeune son collègue, notaires à Orléans, le vingt-deux septembre mille huit cent soixante-cinq, enregistré, contenant cession et transport au profit de Monsieur Desouche requérant par Monsieur Eugène Laurent Picheran propriétaire tenant l’Alcazar Orléanais et ci-devant mécanicien et Madame Catherine Joyer son épouse, demeurant ensemble ci-devant à Montereau… et actuellement à Orléans rue Dauphine numéro quatre, de la somme de quinze mille francs à prendre sur celle principale de trente mille francs restant due… d’un acte de liquidation passé devant maître Faucher et son collègue, notaires à Paris le 23 juillet 1858, par Monsieur et Madame Alfroy, solidairement à Monsieur Eugène Laurent Picheran, frère de cette dernière, sur la somme de quarante-trois mille six cent cinquante francs, prix moyennant lequel et suivant contrat passé devant maître Jozon et maître Faucher notaires à Paris, le 23 juillet 1858, enregistré, mandat… Picheran à vendre à madame Alfroy sa sœur, la moitié lui appartenant indivisément avec elle propriétaire de l’autre moitié dans une maison située à Paris, rue Saint-André des Arts numéro 70 ancien, et 62 nouveau.

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À ce que du contenu au dit acte de transport, Monsieur et Madame Alfroy n’ignorent et aient à ne payer d’autre qu’au sieur Desouche,…, ladite somme transportée, à peine de payer deux fois et de tous dépends, dommages intérêts.

En outre, à même requête, demeure et élection de domicile que…, j’ai huissier sus dit soussigné fait sommation aux dits époux Alfroy en parlant comme dessus, de me déclarer s’il existe déjà entre leurs mains des oppositions ou des signification de transports, leur déclarant que le requérant entend les rendre responsable de l’inexactitude de leur réponse à la présente interpellation, à quoi il m’a été répondu par M. Alfroy qu’il n’avait entre les mains aucune opposition ni signification de transport et il a signé l’assignée.

Dont acte, pour toutes réserves. Et j’ai aux sieurs et Madame Alfroy, à domicile et en parlant comme dessus, laissé en autre, la présente copie.

Courrier

27 octobre 1866

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Mon cher Eugène

Je m’attendais bien à payer ton premier effet numéraire en faisant de… si seulement cela pouvait t’aider. Nous pourrions encore nous consoler des sacrifices que nous faisons pour toi. Mais le triste métier que tu as… ton incapacité et incapacité et ton entourage. Nous… pour toi et tes pauvres enfants en faisant une ruine complète pour autant… de nous rassurer dont nous avons grand besoin.… accable te bonne sœur de peine et de chagrin… à ma femme le peu de santé qu’elle possède encore est

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pour plus longtemps la martyriser. Je t’assure que c’est bien pénible et bien ingrat de ta part de faire continuellement déplaisir à cette bonne sœur. Arme-toi de courage et si tu possèdes encore un peu d’amitié pour Valentine, trouve ton travail que tu peux faire et ramène donc chez nous…

Orléans, le 29 septembre 1866

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Mon cher Alfroy

Je m’attendais à ta réponse. Je ne comptais que ce soit toi, je te croyais plus bon cœur car tu ne me feras pas accroire que pour sauver un frère de la misère tu n’aurais pas pu trouver deux mille francs argent. C’est fait pour moi, je suis né pour le malheur, car en outre de tous mes tourments, je suis complètement inondé. J’ai en ce moment deux mètres d’eau dans mon jardin et ma salle de couvert. Il ne me manquait plus que ce dernier coup pour mettre le comble à mes afflictions car tout mon rez-de-chaussée est complètement… Je n’ai donc plus qu’à tomber complètement et forcé de mendier mon pain, car il n’est pas dans ma position que je puis trouver à me caser et

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tout cela rien que par la haine que vous portez à ma femme, votre conduite en cette circonstance est très lamentable et s’il y a bien un ciel, cela ne vous portera pas bonheur d’abandonner ainsi une famille toute entière pour une haine mal placée.

Enfin adieu donc puisque vous ne pouvez rien pour moi.

Adieu, Eugène Picheran

Renvoyez moi donc mes enfants. Ils seront comme nous, ils supporteront notre misère car il me sera impossible maintenant de les mettre en pension et ils seront comme vous le désirez bien de malheureux… ou mendiants. Ce sera très honorable pour notre nom.

Orléans, le 7 septembre 1866

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Ma chère sœur,

ne m’en veux pas si je ne t’ai encore remercié de ton aimable envoi de gibier. Cela nous a infiniment fait plaisir et est arrivé fort à point car nous sommes de plus en plus malheureux. Depuis mon retour, nous n’avons pas encore une bonne soirée. Tous les soirs, comme une fait exprès, au commencement de la soirée, la pluie commence à tomber par torrent et pour nous c’est le beau temps qu’il nous faut. Juges donc si je dois être contrarié surtout ayant un fort billet à payer pour lundi. Je ne vois comment faire car il nous manque trois cents francs et je ne sais où trouver cette somme. Tu vas te dire que je ne t’écris que pour te demander de l’agent, mais que veux-tu, je n’ai que toi de parent à présent et je ne puis m’adresser qu’à toi. Si tu pouvais m’envoyer cette somme en billets. Je te renverrais un reçu par le courrier. Je compte donc sur ton obligeance habituelle et ton bon cœur.

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Embrasse bien pour nous tous nos deux gros bébés qui je le pense sont toujours raisonnables, embrasse aussi Fernand, serres la main à Charles et à Nanteuil de notre part.

Tout à toi, ton frère.

Eugène Picheran

Orléans, le 21 mars 1867

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Je serais ingrat ma chère Valentine si je ne te faisais connaître ce dont mon cœur est soulagé grâce aux bontés que tu as eu pour moi ; car mes constructeurs après avoir vu les difficultés que j’avais eu de réaliser les intérêts qui leurs étaient dus au mois de Janvier (610 francs) s’imaginaient qu’en ne me suscitant un nouveau paiement, je ne pourrais y… faire se voyaient déjà possesseur de mon établissement, objet de toute leurs convoitises, n’ayant du reste aucun sujet de m’en vouloir, si ce n’est l’envie de recueillir ce que j’ai semé, car ils savent parfaitement qu’il n’y a que profit à tirer de la maison ; c’est pourquoi ils avaient jugé à propos de retirer de chez le notaire l’acte d’inscription que je ne devais payer que la cinquième année, c’est à dire après le remboursement intégral de ce qui leur est dû, aussi bien grande fut leur surprise lorsque je remboursai cet acte (727 francs avec les frais d’huissier qu’il a fallu payer) car l’huissier avait déjà reçu l’ordre de venir faire la saisie de mon mobilier et de mon matériel. Voici donc le service que m’ont rendu les sept cents francs que tu m’as fait avancer.

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Je viens du reste de faire le relevé de tous mes bordereaux jusqu’à ce jour (31 bordereaux), et voici le chiffre des recettes : 6 451,40 francs, le… 1 915,20. Il me reste un chiffre de 4 356.20 sur laquelle somme nous avons dû… payer les mois des employés et donner sur l’arriéré une somme de 2 296.60 depuis le mois de janvier seulement, non compris les sommes que tu as eu la bonté de me faire parvenir, ainsi tu peux juger par toi même si on peut réellement faire des affaires dans cet établissement, surtout venant de passer une saison affreuse et à la suite des dégâts qui nous sont survenus par les inondations, tu vois donc qu’en m’aidant ce ne sera pas de l’argent perdu pour toi et qu’il serait bien malheureux de me voir mettre dehors de chez moi, faute de quelques billets de mille francs, qui me seront nécessaires pour la fin de juin, car il me sera de toute impossibilité que je puisse réunir une somme de cinq mille francs pour cette époque tenant à toujours payer le plus possible sur l’arriéré et éteindre ainsi petit à petit une dette, surtout n’en prenant pas de nouvelle car je n’achètes plus rien à crédit et je paie toutes mes marchandises au comptant.

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Voici donc ma bonne Valentine, ma position actuelle, tu dois bien voir qu’elle ne peut que s’améliorer. Je compte donc sur ton bon cœur pour l’époque dite, et je te ferai connaître quelques jours à l’avance ce que j’aurais pu faire d’économies pour cela, et je pense que tu ne me refuseras pas de me faire parvenir ce qui me manquera à ce moment. En attendant, je compte toujours sur Charles pour le billet du vingt-cinq courant car pour l’instant je suis forcé de jouer serré plus que jamais afin de pouvoir faire mes engagements d’artistes pour commencer notre saison d’été ; chose qui ne sera pas facile à cause de l’exposition, les artistes seront rares et probablement hors de prix.

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Adieu donc, pardonne-moi tout mon bavardage, mais je tenais à te faire comprendre ma position et en ce que tu puisses voir qu’il serait beaucoup plus avantageux pour moi de vendre mon établissement en pleine prospérité qu’en ruine.

Embrasse bien Fernand pour nous tous, serres la main à Charles de tout notre cœur et remercie le bien aussi de toutes les bontés qu’il a pour nous.

Je t’embrasse de tout mon cœur.

Ton frère Eugène Picheran.

23 mars 1867

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Mon cher Eugène

Nous venons de recevoir ta lettre. Ta sœur et moi nous venons la dernière fois l’expression de tous nos regrets de ne pouvoir ne plus rien faire pour toi. Te rappelles tu ta lettre du mois d’octobre dans laquelle tu nous suppliais d’endosser les billets de M. Roulier, chose que j’ai faite par notre trop grand faiblesse. Tu nous disais que tu paierais ces effets. Mensonge, tu as exploité notre bon cœur. Tous les mois que je t’enverrai l’argent nécessaire pour tes billets souscrits au profit de M. Rouler. Il est inutile qu’à l’avenir tu nous écrives.

Nous comptions recevoir ton baril d’eau de vie, probablement ton triste entourage en a décidé autrement.

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Nos intentions étaient de te rembourser la valeur de cette liqueur. Maintenant, je vais écrire et me fournirai ailleurs pour pouvoir remplir la promesse que j’ai faite à ces messieurs. Mon pauvre frère que je te plains.

Je te salue.

Alfroy Neveu

Ci-joint cent francs et prière de me retourner le billet Roulet.

Orléans, le 27 mars 1867

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Je te renvoie le billet payé, mais remarque bien qu’il était inutile de m’en faire la recommandation car dès la première que tu as payé, je te l’ai de suite envoyé sans qu’il soit besoin de me le dire ; n’aie donc pas peur, je ne songes nullement à mettre ni toi ni les tiens sur la paille comme tu as la bonté e me le dire, je j’ai pas encore si mauvais cœur que cela, mais je trouves très naturel, n’ayant plus qu’une seule porte auprès de laquelle je puisse espérer encore une lueur de soutient ;

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je trouve donc très naturel d’y frapper pour faire l’emprunt d’une somme qui n’est pas énorme pour vous, mais qui pour moi serait la pierre de salut à laquelle je puisse me retenir pour sauver mes enfants de la plus affreuse des misères, car il ne me resterait pas un seul asile pour m’abriter puisque par ta réponse tu me fermes même ta porte. Je n’avais plus au monde qu’une sœur et maintenant je n’ai plus rien.

Adieu donc et crois bien que jamais on en m’a nulle part refusé l’entrée d’une maison, c’est toi qui la première m’a fait cet affront.

Je te demande pardon aussi de t’écrire, mais je crois que malgré ta défense, tu ne me refuseras pas de me lire.

Adieu donc

Eugène Picheran

Orléans, le 25 juin 1867

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Madame, c’est à votre cœur de mère que je m’adresse, les huissiers sont chez nous, madame, on nous saisit de tout, maison et meubles. Nous n’avons plus rien, personne ne nous veut venir en aide sans question, plus rien que l’on vous seule pouvez nous sauver. Votre signature ( la somme tout de suite et nous étions sauvés). Vous aviez 10 ans pour le remboursement mais je vous jure que de suite nous cherchions à vendre et par cela sauvions quel et notre ménage. Je vous en conjure au nom de ce que vous avez de plus cher au monde.

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Sauvez nous d’un tel abime. Dieu vous bénira et moi madame ma reconnaissance éternel pour mon mari et mes pauvres enfants. Il n’y a pas de temps à perdre et de suite si vous voulez nous sauver.

Franceline P.

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J’aurais mon cher Alfroy te demander un service encore lequel je crois tu ne me refuseras pas, ce serait de me faire l’abandon du dividende que tu auras à toucher, c’est peu de chose pour toi et pour moi dans ma position ce serait beaucoup. Vois donc si tu peux me rendre ce service et réponds-moi, je te prie le plus tôt possible.

Tout à toi.

Ton beau-frère, Eugène Picheran

Embrasse bien Valentine et Fernand pour nous, serres la main à Nanteuil.

Orléans, le 19 janvier 1868

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Mon cher Alfroy

Il faudrait que tu ais l’obligeance d’écrire au syndic de la Foulette, une lettre ainsi conçue.

Je consens à abandonner à M. Picheran le dividende de qui me reviendra dans sa Foulette dont cinq cents francs pour payer le premier versement à faire pour le paiement de son mobilier et el surplus lui sera versé par le syndic.

Tu m’obligeras mon cher ami de lui adresser cette lettre le plus tôt possible tout dépend de ta bonté en cette circonstance.

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Tout à toi, Eugène Picheran

Embrasse Valentine et Fernand pour nous.

Orléans, le 4 janvier 1868

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Mon cher Alfroy

C’est lundi à midi précise que doit avoir lieu la réunion pour mon concordat. Je viens donc te demander à ce que tu me répondes de suite par le courrier si ton intention est de vouloir l’accepter. Voici ce que je demande qu’on m’accorde : mon mobilier dont je paierai le prix d’après l’estimation dans le courant de l’année, la vente de mon matériel et le produite de celle des marchandises produiront de trente-cinq à quarante pour cent.

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Je pense donc que tu ne voudras pas m’être hostile en cette circonstance et me refuser ton adhésion à ce sujet.

En attendant ta réponse, je te serre la main.

Tout à toi, ton frère, Eugène Picheran

Embrasse bien Valentine pour moi. Il faudrait aussi pour la constatation de ta créance que tu fournisses des billets de douze cents francs que je t’ai envoyé et au dos duquel j’ai mis doit neuf cents francs avancés par M. Alfroy.

Orléans, le 17 janvier 1869

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Valentine,

Je suis de retour à Orléans, mais j’y suis rentré le cœur bien navré de voir que ma sœur n’ait pas même daignée m’attendre pour me rendre réponse, elle-même, à ma demande qui écrite n’était pas exagérée ; car je n’ai plus que toi pour parent ; songes à la triste position que me serait réservée si les propriétaires venaient me mettre dehors ; ce serait pour moi pire que la mort ; penses à ton malheureux Léon que nous aimions tant et dont j’ai toujours douces souvenances ; et rappelle dans ton cœur de mère un peu d’amitié pour ton frère afin de lui éviter la honte et la misère. Souviens toi aussi de notre bon frère qui était si serviable et si obligeant, car jamais on n’est venu frapper à sa porte avec un refus pour réponse ;

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souviens toi aussi de toute l’amitié de notre famille en un mot ne laisse pas ton malheureux frère tomber ainsi surtout quand il te serait si facile de me rendre ce service sans avoir de ton côté un sous à débourser : tu n’aurais qu’à t’adresser à ton notaire qui a en main l’acte de vente de ta maison et lui demander de t’avancer sur le prochain paiement de l’acquéreur une somme de mille francs. Car j’ai pu réaliser à Paris cinq cents francs dont je te rendrais compte des intérêts et te verserais le moins cent francs de mois en mois en partant de Pâques jusqu’à parfait paiement de ladite somme et intérêts.

Vois donc chère sœur si ton cœur a encore quelque affection pour ton frère si ennuyé en ce moment et sur le point de devenir très malheureux par ton refus.

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Je ne comprends pas qu’après avoir fait tout ce que je pouvais pour toi tu viennes encore me demander quoique ce soit et surtout pas une maisons qui n’est même pas en ton nom et vous des étrangers. Je ne peux rien pour ta situation. Ne me récris donc jamais à ce sujet car je refuserai toute lettre venant de toi.

Eugène Picheran à Valentine, 1871

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Ma chère Valentine,

Tranquillise toi, ne soit pas inquiète sur mon sort et quoique rien ne soit encore changé à Courbevoie, ma santé est toujours bonne ; mais ce n’est pas grâce aux Parisiens car nous sommes toujours bombardés. Hier encore nous avons eu la visite de trois obus qui ont percés les murs de l’usine mais heureusement n’ont détruit aucune machine. Cela nous a fait pour l’instant 17 d’arrivés chez nous. Lorsque le dernier est venu dans la cour, en train de laver la voiture, j’avais presque fini mais il a fallu recommencer car les éclats d’obus et de murs sont venus m’asperger de tous côtés. Je n’y voyais plus clair. J’en étais presque suffoqué, surtout avec cette odeur de soude et tous ces débris de moellons tombés tout à l’entour de moi.

Tu devras te demander comment j’étais à laver la voiture ; c’est que le 29 du mois dernier, le patron s’est disputé avec son charretier et qu’à la suite de la discussion, il lui a donné son compte immédiatement ;

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je suis donc par ce fait monté en grade. C’est-à-dire que je suis passé cocher palefrenier et piquer des poules et lapins ; car j’ai trois chevaux à soigner, à étriller, à leur donne à manger et leur faire leur literie ; cela ne serait rien si j’étais toujours à la maison. Mais tous les jours, il faut que je sois en route car Mme Colas a quitté Courbevoie et habite à Ruel. Il faut donc que tous les jours je la sorte seule avec la voiture ou avec le patron porter des œufs, du vin du Bois ou autres denrées à M. Colas, heureux encore lorsque je ne vais qu’à Rueil, je rentre de bonheur, mais quand il faut aller à Saint-Denis ou à Saint-Germain ou à Versailles, je rentre des fois à 10 heure ou 11 heure du soir. Il n’en faut pas moins partir el lendemain vers les 7 heure ou 8 heure du matin et toujours la voiture et les harnais propres ou sinon je passé à la Daudée comme on appelle ici un attrapage par la patron et je te prie de croire qu’il n’en n’est pas chiche. Il nous donne plutôt cela que de l’argent car depuis le 1er avril, je n’ai rien vu, seulement le patron répond de ma nourriture. Heureusement, je rencontre encore quelque fois des voyageurs que j’emmène à Rueil ou que je ramène à Courbevoie et grâce à leur pourboire je puis en fournir en tabac.

Je ne sais chère sœur quant à tout cela finira, mais je te prie de le croire, tout le monde en est réellement fatigué et découragé. Espérons que cela aura une fin et que j’aurais le bonheur de te revoir ainsi que mon bon Tote.

En attendant cet heureux jour, je t’embrasse bien de tout cœur. Embrasse bien Tote pour moi, serres la main à Nanteuil, mes compliments, je te prie à M. de Grouchy.

Tout à toi, ton frère, Eugène Picheran

Je n’ai pas encore reçu de réponse d’Alfroy, je ne sais ce que cela veut dire. Je mets ma lettre à la ¨Poste à Rueil car je pense qu’elle arrivera plus tôt.

Courbevoie, le 26 avril 1871

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Ne m’en veux pas si je ne t’ai jusqu’à ce jour donné de mes nouvelles ; mais comme tu dois le savoir, depuis le dimanche des Rameaux, 2 avril, nous sommes entre Versailles et Paris ; en pleine guerre civile, de façon que nous autres à Courbevoie, nous sommes postés entre les deux parties, aussi depuis ce jour, le 2 avril, la poste a-t-elle cessé complètement son service à Courbevoie et ne l’a repris que lundi dernier et encore n’y a-t-il qu’un départ et une distribution par jour.

Tranquillise toi donc ma chère sœur il ne m’est encore rien arrivé de fâcheux jusqu’à ce jour. Ce n’est pourtant pas faute du bon vouloir des Parisiens qui ne cessent de nous bombarder jour et nuit, en un mot c’est horrible à penser que des Français se battent ainsi. Depuis près d’un mois, et pourquoi ?

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La plupart de ceux qui font le coup de feu et tirent le canon ne sauraient le dire, c’est ce qui m’exaspère.

Il faudrait que tu voies ces malheureuses maisons qui avoisinent le pont de Courbevoie dans quel état elles sont, car c’est là que s’est passé les premiers engagements, les Parisiens ayant pris possession du pont du côté de Neuilly, s’y établissent, soutenus par une formidable barricade, appuyée de deux pièces de quatre et de deux mitrailleuses. Pendant deux jours, les Versaillais ont battu en brèche la barricade avec l’artillerie placée au rondpoint de l’empereur et le troisième jour, malgré les mitrailleuses et les canons, ont traversés le pont et ont pris la barricade et ont refoulé les Parisiens jusque dans Neuilly et Levallois Perret ou le théâtre de la guerre s’est porté depuis ce jour et dure encore. Aussi recevons nous de Paris des obus à chaque minute, bien des maisons en pourront être réparées, il faudra finir de les abattre ; chez M. Colas, nous n’avons jusqu’à cette heure reçu que onze obus, mais qui n’ont fait qu’un petit dégât en proportion de ce que l’on aurait pu craindre. Cela n’empêche que voici aujourd’hui 25 jours que cela dure et que nous ne travaillons pas. Juge quelle désolation doit régner dans le pays ; espérons que cela va finir, car tout le monde en est fatigué.

Je reçois une lettre d’Alfroy au moment où je t’écrivais ces mots. Je m’empresse de lui répondre ; Écris-moi donc si tu peux, tu me feras bien plaisir. En attendant le bonheur de te revoir, je t’embrasse de tout cœur. Embrasse bien aussi Toto pour moi et serres la main à Nanteuil pour moi. Mes compliments à madame Desouche.

Tout à toi, ton frère Eugène Picheran.

Courbevoie, le 26 avril 1871

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Mon cher Alfroy

Je te remercie bien de ta petite lettre qui m’a pu donner de tes nouvelles ainsi que de celles de Valentine et de mon bon Toto. Il fallait du reste que nous ayons soit l’un ou l’autre de vos nouvelles réciproques, car depuis le dimanche des Rameaux 2 avril jusqu’à lundi 24, la poste de Courbevoie a été arrêtée complètement, c’est-à-dire qu’elle ne faisait plus aucun service qu’à partir du lundi 23 courant, aussi me disposais-je à te faire savoir la triste position dans laquelle nous nous trouvons tous à Courbevoie ; recevant les premiers jours le feu du Mont Valérien pour faire déloger les parisiens qui étaient venus prendre possession de la ville puis à la suite de cela les parisiens refoulés du côté de Neuilly, défendu par de bonnes barricades appuyées par deux pièces de quatre et deux mitrailleuses ont tenus le pont jusqu’au vendredi 7 à quatre heures du soir, heure à laquelle les gendarmes et les troupes de Versailles s’en sont bravement emparés et ont repoussés les parisiens dans Neuilly, Levallois Perret et Asnières où ils se battent continuellement depuis ce jour

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mais cependant les troupes de Versailles avancent de plus en plus les Parisiens sont presque tous décimés à l’heure où je t’écris, les Versaillais sont maîtres du château de Bécon par la hauteur près d’Asnières où ils ont établi une batterie de 24. Ils ont aussi pris Asnières et ont aussi établi en batterie sur le chemins de fer même, en un mot, nous sommes complètement assaillis jouet et nuit par un bombardement général de Paris ; c’est affreux à voir les maisons près du pont de Neuilly. On ne comprend à peine comment elles restent encore debout. C’est abominable une guerre pareille entre français et pourquoi aucun des deux parties ne saurait peut-être le dire. Enfin espérons que cela finira car voici 25 jours pleins aujourd’hui que cela dure et que les travaux sont complètement arrêtés partout et qui sait quand cela recommencera car une fois cette guerre finie, il faudra remettre les ateliers et usines en état de pouvoir marcher.

Dans l’usine de M. Colas nous avons été assez heureux ; nous n’avons jusqu’à présent que onze obus qui n’ont fait que peu de dégâts contrairement à ce qui aurait pu avoir, car nous n’avons peu que le marteau pilon de cassé puis la de la raboteuse, deux machines dont on peut se passer, mais la toiture est en grande partie démolie, il n’y a presque plus de carreaux et les tuiles sont en majeure partie cassées soit par les balles ou les éclats d’obus ; nous avons été cependant moins maltraités que chez M. Durennes et chez M. Bourgin qui ont leur usine au bord de l’eau. La nôtre étant plus dans le pays a été préservée un peu par les maisons avoisinantes. Enfin je t’expliquerai tout cela verbalement sitôt que je pourrais aller te voir. Espérons que ce sera la plus tôt possible. En attendant je te serre la main de tout cœur. À bientôt, j’espères, tout à toi, ton beau-frère

Eugène Picheran

J’écris aussi à Valentine

Décès Catherine Joyer, 1878

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Extrait des registres de l’état civil de la mairie du 2e arrondissement à Lyon.

Décès de Catherine Joyer, âgée de 42 ans, native de Nancy (Meurthe), épouse de Laurent Eugène Picheran, employé à Lyon, fille du défunt Charles et de vivante Élise Martin.

Rente viagère Laurent Eugène Picheran en 1892

La retraite à 50 ans ! !
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Le sous-directeur, chargé du Service de la caisse nationale des retraites pour la vieillesse, certifie que Picheran (Laurent Eugène), né le 15 juillet 1824, est inscrit au Grand livre des rentes viagères de la vieillesse pour une rente de dix-neuf francs avec jouissance des arrérages à compter du 1er juin 1892.

Extrait de la déclaration de versement

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M. Picheran (Laurent Eugène), profession : mécanicien au Chemin de fer de Lyon, demeurant à Montereau, arrondissement de Fontainebleau, département de Seine et Marne, né le 15 juillet 1827 à Paris, 11e arrondissement, département de la Seine, jouissance de la rente viagère à cinquante ans.

Marié à M. Joyer (Catherine), sans profession, demeurant avec son mari, née le 3 janvier 1835 à Nancy, arrondissement de Nancy, département de la Meurthe, jouissance de la rente viagère à cinquante ans.

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18 novembre 1898

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Paris, le 18 novembre 1898

Geneviève

Ta charmante petite lettre m’a fait bien plaisir ; tu me demandes ce que je fais ?

Le matin, vers 7 h ½ ou 8 h, mon cuirassier (j’ai donné ce nom à la bonne qui fait ma chambre, car c’est une grande femme comme la mère Roze mais un peu plus vielle car elle est comme moi de 1829, dont 71 ans), dont le matin, mon cuirassier m’apporte ma tasse de chocolat, puis m’allume un peu de feu. Alors je me lève et fait ma toilette. Cela fait, je prends ma canne et mon chapeau et part chercher mon journal en face la rue de Buffon, ce qui aller et retour me procure une petite promenade d’environ quatre ou cinq cents mètres. Rentré dans ma chambre, je lis mon journal jusqu’à l’heure du déjeuner. Midi et demi, après déjeuner, je rentre fumer une pipe puis finir mon journal et à 2 heures je reprends ma canne et mon chapeau et part me promener jusqu’à 4 h Alors je me repose et à 5 h, j’allume ma lampe et attend 6 h l’heure du diner. Après diner, je rentre chez moi et rallume ma lampe et fait des réussites jusqu’à 9 h, heure à laquelle je me couche pour ne plus bruler inutilement du pétrole. Voici l’emploi de tous mes jours.

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Si je ne suis pas encore allé vous voir, c’est parce que j’avais pensé que vous n’aviez pas entièrement fini votre installation ; mais mon intention était d’aller vous voir un de ces jours de la semaine prochaine. Donc, si rien ne s’y oppose, j’irai jeudi vous demander à déjeuner car je préfère cela afin de pouvoir rentrer à la maison avant la nuit, ayant de grandes difficultés à marcher pendant le jour. Je ne voudrais pas m’exposer la nuit dans des rues, surtout dans la rue qui est très mal éclairée et dont le trottoir est très étroit. Donc jeudi, à moins d’avis contraire ou en cas de pluie car n’ayant pas de parapluie, je serais trempé jusqu’aux os.

Je te donnerai ma première sur le personnel de notre table d’hôte.

Serres la main à ton père et à ta mère ainsi qu’à Nanteuil, embrasse ta sœur pour moi.

Je t’embrasse de tout cœur, ton oncle

Eugène Picheran

Décès Eugène, 1900

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Extrait des minutes des actes de décès de la mairie du Cinquième arrondissement de Paris

L’an 1900, le 22 mars à onze heures du matin, acte de décès de Laurent Eugène Picheran, âgé de 73 ans, sans profession, né à Paris, et décédé en son domicile, rue Daubenton 14, le 22 mars courant, fils de père et mère décédés, veuf de Catherine Joyer.